LOUIS LE MAGNIFIQUE
Parution le 13 octobre 2022
192 pages
15 €
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Thème
Le narrateur, Jacques Rodenbach, écrivaillon au chômage, entreprend la biographie d’un de ses anciens condisciples, Louis Gilet, dit P’tit Louis, dit Zéphir, dit Mike the Fool, qui obtint une petite réputation de poète engagé après avoir été guitariste dans un groupe de hard-rock, les « Belzebuth Carnivores » (ayant à son actif six titres jamais distribués) et dont il vient d’apprendre dans Ouest France qu’il a disparu au Tibet.
Points forts
- Cette « fiction sans précautions », ainsi que la présente l’éditeur, est une ode à tous les médiocres prétentieux de notre temps dont P’tit Louis, est le symbole parfait à travers son parcours chaotique : s’il gagne sa vie comme garçon coiffeur ou serveur de restaurant, il s’efforce de séduire les fans de hard métal, accessoirement gérante de bar-tabac ou coiffeuse à La Rochelle, avant d’organiser des ateliers d’écriture dans un EHPAD et de se découvrir poète en compagnie de quelques versificateurs sentencieux persuadés d’être de nouveaux Rimbaud.
- L’auteur égratigne au passage le surréalisme et le dadaïsme, tendance Benjamin Péret (1899-1959) avec de jolies trouvailles comme le “Chinisme” de Zéphir, poésie rimbaldo-chinoise proche de la langue mimique d’Henri Michaux (1899-1984)
- Le chapitre XII qui relate la promotion du premier recueil de Zéphir « Éclats du silence » par le coach des Editions Aphrodite est un petit bijou de méchanceté, juste reflet de ce que l’on peut constater tous les jours ; écrire un poème, même mauvais, ça ne fait de mal à personne mais, pour vendre le « produit », il est indispensable d’être un intellectuel concerné, mieux, engagé.
Quelques réserves
- Les divers avatars du héros sont peu crédibles et le roman paraît peu ou mal construit ; de ce fait, le lecteur reste étranger au personnage aussi bien au hard-rocker qu’au mauvais poète qui ne donne même pas l’impression de s’impliquer lui-même en quoi que ce soit.
- La caricature un peu outrée dessert le propos et l’auteur ne met en scène que des minables, à commencer par le narrateur lui-même dont l’œuvre restera au placard.
- Le style, souvent bâclé, déçoit sous la plume d’un écrivain que l’on s’était accordés à classer parmi les grands.
Encore un mot...
Peut-être Patrice Jean écrit-il trop ? (trois livres en 2022 !) Lui qui possède à fond l’art de pointer les absurdités de notre temps avec justesse et profondeur, humour et légèreté dans un style éminemment littéraire ne pourra que décevoir ses admirateurs avec cette caricature pesante, écrite trop vite.
Une phrase
P’tit Louis, ou plutôt Zéphir prend la parole au cours d’une manifestation contre le nazisme :
« Je l’écris dans Éclats du silence “ le vin danse, le cristal s’égoutte, le reptile vomit ses diamants de feu” et comment aurais-je pu dire de façon plus claire la honte qui pèse sur ce gouvernement ? » P.163
L'auteur
Patrice Jean, né en 1966 à Nantes, fut professeur de lettres modernes après des études de philosophie. Il vit désormais de sa plume avec huit romans, dont L’homme surnuméraire (Rue Fromentin, 2017) et La poursuite de l’idéal (Gallimard, 2021) sont les plus célèbres.
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