L’entretien d’embauche du KGB

Petit manuel d’espionnage à l’intention des espions russes
De
Iegor Gran
Bayard
Parution le 24 janvier 2024
222 pages
19 €
Notre recommandation
3/5

Infos & réservation

Thème

  • Iegor Gran est le fils du dissident soviétique Andreï Siniavski (1925 – 1997). Aussi, lorsqu’il tombe presque par hasard sur un manuel de formation à destination des futurs agents du KGB, ne peut-il s’empêcher d’en faire une œuvre littéraire.
  • On y apprend, dans le plus pur style soviétique, comment se comporter en toutes circonstances dans le recrutement d’agents étrangers en territoire capitaliste.
  • Ce manuel est doublé des commentaires, parfois historiques mais le plus souvent ironiques, que l’auteur distille depuis sa position de fils de victime du KGB et son statut de journaliste engagé contre l'État russe.

Points forts

  • Ce polycopié datant de 1969 est intitulé : « le recrutement des agents », ou comment trouver, convaincre et recruter, par tous les moyens, les « honorables correspondants » qui vont servir la grandeur de la cause soviétique contre les méchants états capitalistes.
  • C’est tout un programme qui commence ainsi : « Le succès des services de renseignement des pays socialistes dans la résolution des tâches qui leur sont assignées dépend, tout d'abord, de la bonne organisation du travail dans chacun des domaines de leur activité dans les Etats capitalistes ». Ce polycopié passe en revue toutes les techniques et les cas de figure.
  • L’écriture ne s’embarrasse pas de figure de styles ni d’alléger une dialectique bien pesante. On est dans le dur de la propagande, qui commence avec ses propres soldats, afin de leur donner les clés d’un recrutement réussi. Et en traduisant lui-même cet opus, Iegor Gran s’est appliqué à retranscrire ce style lourdingue et répétitif, si caractéristique de la bureaucratie soviétique.
  • S’il est le pur produit de l’URSS, il est hélas aussi représentatif de ce qu’est devenue la Russie de Poutine, lui-même biberonné par l’appareil du KGB.

Quelques réserves

  • On l’a dit le texte original, qui tire ses atouts de sa qualité historique et de représentation qu’il donne du KGB, est quand même d’une portée littéraire et d’un intérêt qui restent limités.
  • On regrettera par conséquent que l’auteur n’ait pas accordé plus d’importance et mis plus de verve, celle-là même dont il gratifie les lecteurs de Charlie Hebdo, aux commentaires qui accompagnent le texte. S’ils sont par moment savoureux ou éclairants, il y avait matière à une vraie satire du KGB et, à travers lui, de l’appareil du parti communiste de l’Union Soviétique.

Encore un mot...

  • Au carrefour de la littérature et du réel, L’entretien d’embauche du KGB, est publié dans une nouvelle collection chez Bayard « Récits «.
  • Ce livre complète parfaitement un de ses précédents ouvrages, Les services compétents, publié en 2020, et que j’avais déjà chroniqué à l’époque. L’auteur avait parfaitement su décrire les ennuis de son père avec le KGB en transformant en récit romanesque une histoire vraie.

Une phrase

  • « Il est généralement difficile d’amener un citoyen d’un Etat capitaliste à accepter de coopérer avec les services de renseignement d’un pays socialiste. Afin de le pousser à coopérer secrètement, autrement dit de le convaincre ou de le forcer à accepter cet état de fait, les officiers du renseignement des pays socialistes doivent pouvoir influencer la vision du monde du recruté et agir sur sa psychologie dans le sens souhaitable pour nous. » Pages 19-20
  • Et, pour les commentaires : « Je suis tombé sur ce trésor pendant que je travaillais l’écriture d’un roman biographique racontant les aventures de ma famille avec le KGB (Les services compétents), et j’ai été immédiatement ébloui par la portée historique de ces documents. Pour la première fois, on accédait aux méthodes du KGB, non pas à travers un témoignage ou des souvenirs de quelque vieux général, mais par des textes originaux à la base de l’enseignement de chaque élève-tchékiste ». Page 78

L'auteur

  • Iegor Gran, de son vrai nom Iegor Andreïevitch Siniavski, est arrivé en France à l’âge de 10 ans.
  • Après des études et une première carrière d’ingénieur, il entreprend en parallèle une carrière d’écrivain et prend le nom de Gran, nom de jeune fille de sa mère.
  • Il publie une vingtaine de romans et essais, aux éditions POL et Les Echappées et reçoit le Prix de l’Humour noir en 2003 pour son livre ONG.
  • Culture-Tps a chroniqué 2 autres de ses livres :
    - Le retour de Russie
    - Le journal d’Alix

 

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