L’eau du lac n’est jamais douce
Parution le 7 avril 2022
352 pages
23 € 90
Traduit de l’italien par Laura Brignon
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Thème
Dans les années 2000, en Italie, la narratrice souligne à quel point sa mère, Antonia, n’a pas été épargnée par la vie : son mari s’est retrouvé en fauteuil roulant après un accident sur un chantier, où il travaillait sans être déclaré, elle assume donc, comme elle peut, la charge de ses quatre enfants. Elle se bat furieusement pour obtenir un logement décent dans une banlieue éloignée de Rome près d’un lac et elle fait des ménages toute la journée. Elle force sa fille Gaïa à se lancer dans des études classiques pour espérer s’en sortir un jour.
Celle-ci travaille d’arrache-pied, obtient de très bons résultats et tente de trouver sa place parmi les lycéens qu’elle côtoie. Animée d’une rage vengeresse, parce qu’elle ne supporte pas les privations et les injustices de la pauvreté, elle se forge un cœur de pierre et une personnalité intransigeante avec ses amis. Incapable de tendresse, elle se montre impitoyable à la moindre trahison. La jalousie la conduira à des actes délictueux comme l’organisation d’un cambriolage, un incendie de voitures ou pire encore une tentative d’assassinat … Son master de philosophie ne lui servira même pas à échapper à sa condition !
Points forts
- La densité du personnage d’Antonia : autoritaire à l’excès, elle impose ses propres principes à sa fille, mais elle reste profondément honnête, digne et respectable à travers ses combats héroïques pour protéger les siens.
- Les conséquences du déterminisme social sont évoquées de manière très réaliste et pessimiste. L’auteur ne croit pas à la possibilité d’échapper à son milieu.
- Les turpitudes et les blessures de l’adolescence sont analysées avec une certaine justesse.
- La cité engloutie dans les eaux sombres du lac symbolise métaphoriquement l’intériorité tourmentée de Gaïa.
Quelques réserves
Gaïa, cette adolescente rebelle, n’attire pas la sympathie du lecteur. Elle ne s’estime pas, elle n’aime personne et a la hantise de ressembler à sa mère. Sa dureté, son impétuosité, sa cruauté la poussent à d’invraisemblables vengeances qui lui font perdre tout sens moral.
Encore un mot...
Ce roman d’apprentissage, ancré dans un milieu social défavorisé, tire sa force de la fougue véhémente de la narratrice et de son écriture rugueuse. L’auteur a sans doute cherché l’originalité en refusant tout pardon, toute bienveillance, et cette absence de rédemption condamne Gaïa à s’enfoncer dans un désastre sans issue. Cependant alourdi par le message politique sous-jacent, l’itinéraire trop noir de l’adolescente n’est éclairé par aucune lueur et finit par déstabiliser le lecteur.
Une phrase
- « Je me sens de trop dans ma propre maison … j’ai toujours agi sur des impulsions, par convulsions, par revanche et par honte. » (p. 177)
- « Parce qu’il n’y a jamais eu un lieu pour moi, je n’ai jamais été au bon endroit. » ( p. 251)
L'auteur
Née à Rome en 1988, Giulia Caminito est diplômée de philosophie politique. Elle écrit dans des journaux et des magazines et elle a travaillé dans l’édition. Son premier roman La Grande A (Gallmeister, 2016) a été récompensé par plusieurs prix. Un jour viendra (Gallmeister) a obtenu le prix Mare Nostrum 2021 et L’eau du lac n’est jamais douce le prix Campiello 2021.Ne manquez pas, sur Culture Tops, la chronique de son roman Quatre amours.
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