Le rouge vif de la rhubarbe
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Thème
Dans un petit port d'Islande, Agustina, quatorze ans, vit sous la garde de Nina, entre la mer, un jardin de rhubarbe où elle va méditer sous les grandes feuilles, et à l'ombre de la montagne qu'elle rêve d'escalader appuyée sur ses béquilles, pour voir le monde d'en haut.
Points forts
Une très belle écriture toute en nuance et infinie délicatesse pour décrire les ambiances, les petites scènes de la vie quotidienne, les couleurs, les odeurs, les paysages sauvages sous le climat rude tout en contraste de ce bout de terre islandaise.
Chaque personnage s'y inscrit de façon discrète et attachante, à la fois mélancolique et optimiste car la vie prend toujours le dessus.
Agustina nous aimante par sa grâce mystérieuse, sa volonté et sa témérité, happée par l'appel de la montagne qu'elle rêve de gravir en équilibre sur ses jambes de coton avec l'aide de ses béquilles. Nina veille sur elle avec douceur et la protège sans la couver. Leur relation est complémentaire, quasi filiale, émouvante et juste.
Vermandur, l'homme à tout faire, un peu rustre mais toujours attentif, fait office de père de substitution.
Et puis il y a Salomon qui suit Agustina de son regard amoureux et complice.
Quelques réserves
Il n'y a pas à proprement parler de construction mais plutôt une juxtaposition de moments de vie et d'impressions. L'écriture n'est pas encore aussi aboutie dans ce premier roman inédit que dans les livres suivants ("Rosa Candida" ou "L'Exception") même si elle laisse déjà entrevoir l'immense talent de l'auteur.
Le personnage de la mère d'Agustina, présente par les lettres épisodiques qu'elle envoie des antipodes où elle étudie les oiseaux migrateurs, a du mal à prendre vraiment corps.
Encore un mot...
Il émane un charme étrange et poétique d'ombre et de lumière dans ce livre intimiste qui se lit lentement, mot après mot, avec une riche palette de couleurs, d'odeurs et de sentiments. La vie y est rude, simple et belle.
Il vaut mieux aimer la rhubarbe avec son rouge flamboyant, ses grandes feuilles et ses confitures acidulées pour goûter la magie du livre...
Une phrase
- "Pour huit kilos de rhubarbe, il en fallait autant de sucre. Cette proportion pouvait toutefois varier d’une ménagère à l’autre. Sucre, cuisson, calibre et taille de morceaux, texture, couleur, tout dépendait de l’imagination, du caractère et du temps disponible de chacune."
- "Agustina exerce une attraction singulière, diraient les gens, elle a un si beau port. Et elle rirait en sautant entre les flaques tout le long de la rue, si robuste, si normale, si extraordinairement digne d'admiration. Et puis, sans raison ni crier gare, elle bondirait très haut et sentirait la force élastique de ses nouvelles jambes. Pourquoi les gens qui en ont ne sautent-ils pas en l'air sans raison ?"
L'auteur
Audur Ava Olafsdottir est née en 1958 à Reykjavik. Son roman "Rosa Candida" a connu un large succès et a reçu le prix Page des libraires en 2010. "L’Embellie", écrit en 2012, puis "L' Exception", en 2014, ont aussi connu un grand succès. "Le Rouge vif de la Rhubarbe" est son tout premier roman, inédit en France jusqu'à aujourd'hui.
Commentaires
Adur Ava Olasdottir est vraiment passionnante.
Tout d'abord, l'auteure plante le décor et nous invite à y débarquer.
Comme des touristes, nous découvrons le paysage et tout de suite une adolescente accroche notre regard. Elle a un étrange comportement - animal, sirène ? Une voix appelle "Agùstina" et nous ramène dans le réel. Dès lors, en poursuivant, nous commençons à ressentir l'inconfort, sans vraiment savoir pourquoi.
Arrivée au terme de ma lecture, j'ai eu la sensation de n'avoir pas tout compris. Qu'avais-je raté ?
Il semblerait que cet "inconfort" a été souhaité par l'auteure. Il contribue à mettre le lecteur dans la situation de la "fille aux jambes de coton". Nos déplacements dans le texte ne nous sont pas facilités. Il apparaît aussi que tous les personnages ont leur propre vie imparfaite dans le village. Et comme dans la vraie vie, on ne sait pas tout de ses voisins. Pourtant si chacun a sa propre histoire il joue tous un rôle auprès de la jeune fille.
Ce roman de 155 pages comprend XXX chapitres. Dans chacun d'eux, ou presque, une lettre de la mère "épisodiques, de plusieurs pages ou de quelques mots" est un des personnages à part entière et parallèle.
Peut-être qu'il nous faut continuer l'ascension de la montagne pour découvrir tous ses mystères que nous n'avons pas encore compris.
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