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Thème
Restituée avec ses passions et ses désespoirs, ses coups de cœur et ses coups de blues, l’adolescence de deux femmes dans l’Italie des années soixante. L’une (Lina) épouse un homme violent qu’elle n’aime pas et arrête ses études. L’autre (Elena) s’interroge sur l’acceptation du sort des femmes ou le refus des conventions : en choisissant de quitter la pauvreté et la misère d’une existence semblable à celles des femmes qui l’ont précédée, Elena entame un parcours du combattant. Des études soutenues, des efforts insurmontables pour gravir les échelons sociaux garantissent-ils le droit au bonheur?
Points forts
Une violence narrative qui tient le lecteur en haleine. Un visuel des années soixante oscillant entre obscurantisme provincial et miroir aux alouettes de la modernité.
Quelques réserves
Sous le microscope d’Elena Ferrante, les hommes n’ont pas la partie belle : entre brutes épaisses, beaux parleurs et arrivistes, violeurs ou ratés, on ne sait que choisir. Un peu réducteur, non?
Encore un mot...
Les mariages ratés sont un terrain sur lequel Elena Ferrante se fait les dents depuis son entrée en littérature (L’amour harcelant, Les jours de mon abandon, Poupée volée, L’amie prodigieuse, Ceux qui partent et ceux qui restent). Ses héroïnes ont en commun d’être prises au piège par la violence masculine, qu’elle soit d’ordre sexuel, social, psychologique ou les trois à la fois. L’attachement et l’abandon s’y disputent une partie où tous les coups sont permis. La force d’Elena Ferrante est que chacun de ses personnages a un visage, un parfum, des habitudes, une démarche, une manière de raisonner qui nous font les suivre, guetter leurs attentes et nous inquiéter pour leur avenir.
Un roman qui, comme les précédents, filme la réalité et l’inscrit pour longtemps dans notre mémoire : la plage d’Ischia, les ruelles de Naples, la place des martyrs, les magasins aux enseignes au néon dessinent une toile de fond aussi prégnante que celle des films de Fellini ou de De Sica.
Une phrase
Au tout début du roman, cette phrase donne le ton:
"Si rien ne pouvait nous sauver, ni l'argent, ni le corps d'un homme, ni même les études, autant tout détruire immédiatement".
L'auteur
Depuis 1992, date de parution de son premier roman,L’amour harcelant, l’anonymat d’Elena Ferrante lui réussit à merveille. Depuis vingt-quatre ans, celui ou celle qui s’abrite derrière ce pseudonyme a bien misé : le vent de première curiosité soulevé par son identité s’est apaisé, laissant la place à l’intérêt pour les œuvres d’un écrivain à part entière reconnu des deux côtés de l’Atlantique. Nombre de ses précédents ouvrages ont été portés à l’écran et la plupart d’entre eux, traduits. Un parcours sans faute où, de roman en roman, le lecteur retrouve chacun des personnages qui vieillissent avec lui. Avant même la parution de son premier ouvrage, l’auteur(e) avait prévenu son éditeur : "je crois que les livres, une fois écrits, n’ont aucun besoin de leurs auteurs. S’ils ont quelque chose à dire, ils trouveront leurs lecteurs".(Propos rapporté par James Wood dans The New Yorker – 21 janvier 2013 : Women on the verge : the fiction of Elena Ferrante).
Excellent pronostic et pari gagné haut la main pour Elena Ferrante.
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