Le café sans nom
Traduit par Elisabeth Landes
Publié le 7 septembre 2023
246 pages
23 Euros
Infos & réservation
Thème
Vienne 1966. Robert Simon est un modeste ouvrier journalier sur le marché des Carmélites. Lorsque se présente l’opportunité de reprendre en gérance un café, Robert Simon se lance dans l’aventure. Il retape, nettoie, installe…. Mais ne sait comment appeler ce café ! Ce sera donc Le Café sans nom. Il peut compter sur ses connaissances, les petits commerçants du coin et le soutien de ses amis. Le café devient vite le point de ralliement où il fait bon venir bavarder, se taire, boire et surtout trouver la chaleur humaine. Bientôt, Robert Simon sera secondé par Mila car le travail ne manque pas.
Points forts
L’Autriche a perdu son Empire il y a longtemps, le pays a connu et souffert du nazisme. Mais Vienne se reconstruit en ces années 60 comme de nombreuses villes. L’auteur qui connaît fort bien sa ville nous fait vivre le bruit, la poussière avec les travaux, dont le percement du métro…
Une galerie de personnages évoluant dans ce délicieux livre :
- Mila la jeune couturière qui a perdu son travail ; elle secondera avec énergie et gentillesse Robert Simon
- René, le catcheur, amoureux de Mila
- La veuve de guerre, chez laquelle Robert Simon loue une chambre. Elle lui prépare des repas, une présence maternelle et encourageante.
- Mais aussi le boucher, et sa nombreuse famille … la crémière…
Et la bienveillance ressentie tout au long de cette lecture.
Quelques réserves
Je n’en ai pas trouvé. L’histoire est belle, le style superbe.
Encore un mot...
Nous voici donc à Vienne en 1966. Robert Simon, orphelin, la trentaine, est ouvrier journalier sur le Marché des Carmélites, Il loue une chambre chez une veuve de guerre qui lui prépare des repas. Nous sommes dans un quartier populaire non loin de la Grande Roue du Prater. Robert Simon va réaliser un vieux rêve « être son patron » en prenant la gérance d’un vieux café abandonné près du marché. Nous le suivons nettoyant, aménageant, lui donnant vie sans toutefois lui trouver un nom. Il n’oserait pas afficher le sien ! Ce n’est pas un café mondain comme il y en a dans le centre de Vienne aux noms bien connus ! Ce sera donc Le Café sans nom,point de ralliement du quartier, où l’on vient partager ses espoirs, ses vieilles blessures, et surtout profiter d’un accueil plein de chaleur.
Il ne s’y passe pas grand- chose. Ce sont des tranches de vie qui se déroulent sous nos yeux : des images saisissantes grâce à un ton attentif, précis et bienveillant.
Comment résister à la recette du punch donné par la veuve « un hiver sans punch n’est pas un hiver digne de ce nom », ce punch qui réchauffe encore davantage l’atmosphère ?
Dans ce refuge pour Viennois frigorifiés, comment ne pas sentir ces tartines de saindoux avec de jeunes oignons ou du cornichon au sel ?
Comment ne pas se laisser porter par le rythme de vie dans ce café : « les feuilles mortes en automne, les flocons et le punch en hiver, les bourgeons et les cris des enfants au printemps, la chaleur de l’été », par la solidarité entourant Simon lorsqu’il sera blessé ?
Lorsque la mauvaise gestion du propriétaire lui laisse des dettes l’obligeant à vendre son immeuble, Robert Simon n’a plus de bail et se voit contraint de fermer son café. On ne sait s’il est fataliste ou résigné ! Mais il organisera, avec Mila, une belle fête de départ afin que chacun profite encore de cette convivialité et de cette chaleur humaine.
Ce roman excelle à raconter le rien, l’ordinaire. Il est plein de tendresse et de bienveillance. Grâce à un style plein de douceur, nous, lecteurs nous nous sentons accueillis dans ce Café sans nom parmi tous ces personnages attachants, un café où chacun vient pour discuter, rester tranquille, échapper aux pressions du monde du travail, ou de la vie familiale. Une bien belle balade viennoise.
Une phrase
- « …. Il faut toujours que l’espoir l’emporte un peu sur le souci. Le contraire serait vraiment idiot, non ? ». P. 24
- « Messieurs, Il s’agit de mon café au marché des Carmélites. Je dis que c’est un café, bien que personne à part moi ne l’appelle comme ça. Et je dis que c’est le mien, bien que sur le papier il ne m’ait jamais appartenu. Il y a 10 ans c’était un trou poussiéreux, maintenant, tous les soirs, sauf le mardi, il y a des gens qui veulent oublier au moins quelques heures tout ce bazar autour d’eux. Il y fait chaud, l’hiver les fenêtres ferment bien, on peut boire quelque chose et surtout on peut parler quand on en a besoin et se taire quand on en a envie. Le monde tourne toujours plus vite, et parmi ceux dont la vie ne pèse pas assez lourd, il y en a parfois qui sont laissés sur le bord de la route.
Alors n’est-ce-pas une bonne chose qu’il y ait un endroit auquel se raccrocher ?
Maintenant, vous allez peut-être vous dire : ils n’ont qu’à aller ailleurs ces pauvres bougres, le changement ça fait mal, rien n’est éternel, etc. Et bien sûr, vous avez raison. Mais je connais des gens pour qui le bout de la rue, c’est déjà trop loin. Ceux-là, ce n’est pas le changement qui leur fait mal, mais tout le corps, parce qu’ils passent leur journées à crapahuter sur un chantier, ou à se courber devant une machine, ou simplement parce qu’ils sont trop vieux ou trop abîmés, ou les deux à la fois.» P. 209
L'auteur
Robert Seethaler, né à Vienne en 1966 ces années pendant lesquelles il situe son roman, est écrivain, scénariste et acteur. Il a écrit Le Tabac Tresniek (2012), Une vie entière (2014), Le dernier mouvement (2020). Le café sans nom est son cinquième roman traduit chez Sabine Wespieser.
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