La vengeance du pardon
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Thème
Décidément, le roman en mode "nouvelles" a le vent en poupe ces temps-ci.
Ici, quatre nouvelles sur un même sujet : le pardon, sous ces différentes formes, et les différentes réactions que celui-ci provoque:
- Dans la première nouvelle, chez des soeurs jumelles, le ying et le yang, le pardon est-il une bonne chose ?
- Dans la deuxième, chez ce ponte de la haute finance, le pardon passe-t-il par la rédemption ?
- Dans la troisième, entre une mère et l'assassin de sa fille, le pardon n'est-il pas là pure vengeance ?
- Enfin dans la dernière, chez cet homme d'âge mûr qui ignorait avoir mal agi, comment peut-il se le pardonner ?
Points forts
- L'écriture extrêmement fluide de cet académicien et le foisonnement des descriptions léchées, méticuleuses, remplit d'aise les amateurs de beaux textes.
- Ah, l'usage de l'imparfait du subjonctif, devenu si rare...
- L'aspect serein qui subsiste dans chaque histoire malgré une certaine forme de violence. Peut-être est-ce dû aux descriptions des jardins, des arbres, des oiseaux?
- Les récits qui nous proposent des histoires fortes et dont les chutes sont épatantes : soit brutales, soit suggérées, soit expliquées.
- Il y a une dimension évangéliste dans ces contes, un petit côté "l'ouvrier de la dernière heure", qui est dans la lignée des ouvrages d'Eric-Emmanuel Schmitt.
Quelques réserves
Je n'en vois guère.
Encore un mot...
Cet ouvrage, à l'apparence légère, ne l'est pas tant que cela et demande réflexion. Notamment avec ces chutes que l'on n'attendait pas et qui, surtout dans la première histoire, laissent pantois.
Mais, comme à chaque fois, Eric-Emmanuel Schmitt nous entraîne dans son monde et nous force à nous poser des questions, très subtilement. On s'arrête après chaque nouvelle pour en intégrer la chute avant de repartir, très intéressé par la suivante.
Très bel ouvrage, que l'on abandonne à regret.
Une phrase
- D'abord, une "jolie" expression : p. 108, pour parler d'une jeune fille magnifique mais souffrant de retard mental : "Sa grâce physique n'équivalait que sa disgrâce intellectuelle". Délicat, non ?
- Et trois phrases qui semblent enfoncer des portes ouvertes mais qui ont néanmoins le mérite d'être dites, et avec tant d'élégance :
- p. 103 "L'honnêteté ne détient pas le privilège du discernement". Malheureusement.
- p. 195 "Jeune, on voudrait que son père soit un héros. Vieux, on voudrait que son fils en soit un. Au fond, on n'accepte jamais ses proches tels qu'ils sont". Tellement vrai.
- Une petite dernière pour la route, p. 287 "On devrait toujours se fier au pire : il ne déçoit jamais". Si l'on peut éviter...
L'auteur
Que dire de cet auteur et dramaturge prolifique, philosophique ?
Eric-Emmanuel Schmitt (né en 1960) engendre le succès depuis des années, en France et ailleurs. A 16 ans, en sortant d'une représentation de Cyrano de Bergerac, il décide d'être écrivain et dramaturge. La suite lui a donné raison : c'est un bon ! Il ajoute à sa palette un aspect philosophique, après une expérience mystique dans le Sahara.
Il a commencé par le théâtre. Entre autres pièces : Variations énigmatiques (F. Huster), Le Libertin (B. Giraudeau), L'hôtel des 2 mondes. Que ce soit ses romans ou ses pièces, l'ensemble, mâtiné de philosophie, reçoit, le plus souvent un accueil très favorable du public.
Avant "La vengeance du pardon", début 2017, Eric-Emmanuel Schmitt a parlé de sa jeunesse dans "Plus tard, je serai un enfant", livre d'entretiens avec Catherine Lalanne.
Couronné de nombreuses distinctions et prix, il a été élu à l'Académie Goncourt en 2016.
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