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Thème
Dans ce pavé de 634 pages, l’auteur de la Petite Femelle (biographie de Pauline Dubuisson), revient une nouvelle fois sur une histoire de meurtre. C’est la vie d’Henri Girard et le terrifiant triple crime familial dont il a été accusé que Jaenada reconstitue ici.
Plus connu sous son nom d’écrivain, Georges Arnaud, Henri Girard est l’auteur du Salaire de la peur, qui inspirera le film du même nom, plus célèbre que le livre et réalisé par Clouzot.
Mais avant de devenir écrivain, Henri Girard a eu mille vies : enfant colérique, capricieux, malhonnête, instable, dépensier, il passera sa jeunesse à ne rien faire et à dépouiller sa tante et son père pour financer une vie oisive et chaotique largement au-dessus de ses moyens.
C’est pendant la Seconde Guerre Mondiale que survient le drame, alors qu’il est en vacances avec sa tante et son père dans la propriété familiale périgourdine, le château d’Escoire. Un matin, on découvre qu’Amélie et Georges Girard, ainsi que leur bonne, Louise, ont été massacrés à coups de serpe.
Henri, étrangement placide, affirme n’avoir rien entendu et nie évidemment avoir un quelconque lien avec cet atroce triple meurtre. Et pourtant, absolument tout l’accuse : mis à part quelques complotistes qui élaborent des thèses alternatives facilement démontables, chacun est persuadé de la culpabilité du fils Girard, qui a un mobile (l’héritage familial), un passé tumultueux, des relations houleuses avec sa famille et une multitude d’éléments et de témoignages à son encontre.
C’est au cours d’un procès retentissant, au terme duquel tout le monde s’attend à voir Henri condamné à mort, qu’il est, à la surprise générale, acquitté. Pour l’opinion publique, c’est une erreur judiciaire.
Plein aux as, le futur Georges Arnaud reprend alors sa vie, finit par se ruiner, part en Amérique du Sud un temps, revient, se met à écrire, et s’investit toute la fin de sa vie dans l'indépendance de l’Algérie, mais aussi dans de nombreux procès pour la défense des plus vulnérables. Personnage ambivalent, surprenant, détestable souvent et parfois impressionnant d’exemplarité.
Jaenada revient dans La Serpe sur cette vie étonnante et ce mystère demeuré irrésolu : au cours d’une enquête minutieuse qu’il raconte avec beaucoup d’humour, il s’interroge. Et si Henri était réellement innocent ?
Points forts
- Le ton quasi oral qu’emploie Jaenada est un vrai délice. Le personnage qu’il est dans son livre s’étale en permanence en digressions, en jeux de mots, en commentaires plus ou moins pertinents mais qui m’ont arraché de nombreux sourires et quelques éclats de rire !
- La manière dont il mène l’enquête est extrêmement précise et rigoureuse et malgré la quantité de détails et d’informations, on réussit aisément à suivre le fil de l’histoire dans laquelle on se plonge comme dans un roman.
Quelques réserves
Il y a parfois quelques longueurs malgré tout. L’histoire étant longue et nécessitant souvent des informations précises pour qu’on en comprenne la globalité, certains passages mériteraient un peu plus de concision !
Encore un mot...
L’incroyable histoire de ce meurtre et la vie de Girard constitueront pour beaucoup une véritable découverte.
Personnellement je me suis plongée avec régal dans ce livre grâce, entre autres, à l’irrésistible déluge de parenthèses et calembours que Jaenada manie avec brio.
D'une histoire de morts, Jaenada réussit à faire un récit exceptionnellement vivant.
Une phrase
« J’ai lu le Club des Cinq, je sais qu’avant une journée qui s’annonce riche en aventures, il faut prendre un solide petit déjeuner. Pour moi, ce matin, une grande tasse de café (un grand bol de chocolat chaud, dans les livres, mais je n’ai plus onze ans), un grand verre de jus d’orange, deux grosses tranches de pain de campagne, du jambon, du fromage, des œufs brouillés, du bacon croustillant et luisant, et trois mini-spécialités charcutières cylindriques. Il doit se dire à la fois que j’ai de la chance, que sa vie est bien terne, et que je devrais me regarder plus souvent dans une glace, gros tas, que je vais claquer d’un infarctus dans deux mois. »
L'auteur
Philippe Jaenada est né à Saint Germain-en-Laye en 1964. Ses premiers romans sont d’inspiration autobiographique, puis il s’attaque au fait divers : après Sulak, qui retrace la vie d’un braqueur français souvent comparé à Arsène Lupin, il publie en 2016 La Petite Femelle, biographie de Pauline Dubuisson, une jeune femme ayant assassiné son ex-petit ami dans les années 1950. Avec la Serpe, Jaenada affronte l’un des mystères les plus brumeux de la justice française.
Commentaires
Après avoir lu "La petite femelle", j'ai enchaîné sur "SULAK" et maintenant "LA SERPE". Que du bonheur! Vivement le prochain!
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