La Reine du labyrinthe

Récit historique et roman policier : la vérité sur “l’affaire du Collier” à travers le labyrinthe des machinations
De
Camille Pascal
Robert Laffont
Parution le 29 août 2024
432 pages
22,50 €
Notre recommandation
4/5

Infos & réservation

Thème

L’épisode dit du “Collier de la Reine“ (1785) a déjà été l’objet d’une abondante littérature. Camille Pascal ajoute sa pierre à l’édifice en retraçant cette ténébreuse affaire sous forme d’un roman, comme Alexandre Dumas l’avait tenté avant lui. Rappelons les faits: une semi-aristocrate désargentée, Jeanne de la Motte-Valois, convainc un prélat en disgrâce, le cardinal de Rohan, d’acquérir, pour le compte de la Reine Marie-Antoinette, un fastueux collier de diamants, moyennant quoi il retrouverait la faveur de la Reine et sa place à la cour. Bien entendu Marie-Antoinette ignore tout de cette requête qui s’avère être une escroquerie très habilement montée. 

Lorsque l’affaire est découverte, Louis XVI, poussé par sa femme et son ministre de la police, Breteuil, fait traduire le cardinal de Rohan devant le Parlement qui, tout à sa lutte séculaire avec la monarchie, le lave de tout péché. L’affaire se retourne contre la Reine et aura de lourdes conséquences sur sa réputation.

Points forts

Voilà une plongée dans l’ancien régime finissant, juste avant la Révolution, qui devrait enchanter le lecteur; par le style, d’abord, car Camille Pascal possède une plume déliée, légère, qui rappelle ses illustres devanciers du XVIIIe siècle. Il rend cette histoire vivante, dessine les protagonistes avec une grande finesse psychologique, imagine les lieux et les emplois du temps; en un mot, il recrée l’époque, la société, les rapports de classes et d’ordres. 

Mais le romancier n’est que le masque de l’historien, car notre auteur puise ses informations aux meilleures sources, archives, mémoires… Il n’invente que lorsque les documents ont disparu, brûlés par les acteurs du drame ou égarés dans le labyrinthe du temps. Il démontre aussi une grande connaissance des arcanes et des structures politiques, administratives et judiciaires de l’ancien régime; il nous y promène avec autorité, et ce n’est pas simple.

La construction du récit est également à porter au crédit de l’auteur, car non seulement il nous tient en haleine avec la narration du montage et du déroulement du mécanisme d’escroquerie, mais surtout, il montre à l’envi les conséquences désastreuses des décisions royales qui suivent la découverte de l’affaire. Louis XVI et Marie-Antoinette, blessés dans leur orgueil et leur intimité, choisissent de donner une publicité considérable à l’affaire en traduisant le cardinal de Rohan, qui n’est que le dupe des escrocs, devant le Parlement. Funeste choix, puisque le Parlement trouve là un carburant idéal dans sa guérilla contre le pouvoir royal, acquitte le prélat à la grande joie de l’opinion publique. La reine se trouve ainsi doublement victime de cette affaire qui la poursuivra jusqu’à sa mort.

Quelques réserves

Il n’y en a guère. Il est juste surprenant que l’auteur, bon historien, semble attribuer le renversement des alliances de 1756 à Choiseul qui ne fut ambassadeur à Vienne que l’année suivante, alors que le mérite en revient au cardinal de Bernis.

Encore un mot...

Tout en se plaçant dans la lignée de tous ceux qui ont écrit sur le collier, Camille Pascal fait finalement œuvre originale. Cet ouvrage, à mi-chemin du roman policier et du récit historique, recrée un monde disparu et en tire des leçons que les politiques actuels feraient bien de méditer.

Une phrase

« En gravissant les marches du perron, le baron de Saint-James crut qu’il montait les premiers degrés de son assomption curiale. Le cardinal de Rohan, grand aumônier de France et prince souverain, avait enfin consenti à le recevoir, ce qui donnait à ses écus la patine qui leur manquait, la légère usure que seul le temps parvient à imprimer à l’or pur par la magie de cette délicate alchimie sociale qui peut offrir à une fortune élevée en quelques années l’élégance des siècles. » Page 168 

L'auteur

Camille Pascal est un agrégé d’histoire qui a tâté de la politique, avec Bayrou, puis Douste Blazy, Baudis,… avant de devenir la plume de Nicolas Sarkozy à l’Élysée, expérience sur laquelle il a publié un récit particulièrement hagiographique (Scènes de la vie quotidienne à l’Élysée). Il a rejoint le Conseil d’Etat en 2012 et continué parallèlement au droit administratif à publier des ouvrages qui font revivre certains moments cruciaux de l’Histoire (L’Été des quatre rois,Plon 2018 Grand prix du roman de l’Académie française; La Chambre des dupes; L’air était tout en feu). 

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