La Maison Atlas
Parution en mars 2022
263 pages
21 Euros
Infos & réservation
Thème
Emily, jeune étudiante du Minnesota (Etats-Unis) arrive à la faculté de Droit de Bordeaux ; elle vient d’une famille juive non pratiquante.
Daniel, juif d’Algérie, est également étudiant à la faculté de Droit de Bordeaux ; il semble obsédé par les traumatismes vécus en Algérie.
Ils mènent tous deux une vie insouciante, deviennent amoureux et s’installent ensemble. La judaïté ne semble pas avoir de place dans leurs vies ; ils font des projets d’avenir.
Mais la guerre civile gronde en Algérie, nous sommes dans les années 1990.
Daniel, inquiet pour sa famille, part pour Alger avec l’intention de revenir bien vite. Emily, restée à Bordeaux, l’attend. Mais le rapport de chacun à l’Histoire les sépare. Sans nouvelles, Emily le cherche, perd sa trace et finit par retourner chez elle dans le Minnesota où elle fera sa vie. Elle a une fille Becca qui connaît son histoire ; c’est elle qui recherchera ce père et apprendra ce qu’il a vécu.
La Maison Atlas relate aussi l’histoire de cette famille de commerçants juifs bien implantés en Algérie depuis des générations, bien connus dans la Casbah et dans les environs. A travers Daniel, nous suivons la vie avant les évènements et pendant ces évènements terribles de la guerre civile.
Points forts
- A travers l’histoire de ce jeune couple et des années terribles de la guerre civile, nous découvrons (ou redécouvrons) toute la complexité de l’Algérie et de ses habitants.
- La transmission de génération en génération qui est importante mais se trouve bloquée car, avec les guerres, il n’y a plus de communautés comme auparavant. L’histoire part de Henri, le grand-père figure tutélaire ; des extraits de ses journaux lors des différents évènements nous renseignent sur son rôle de « juif arabe ». Il réclame les mêmes droits pour les musulmans. Sammy le père adhérera au FLN lors de la guerre d’indépendance. Daniel s’engagera également et restera en Algérie. Tous luttent pour la survivance de leur judaïté tout en se sentant arabes.
- La belle construction dans le style et la finesse dans le récit. Un récit à plusieurs voix, celles de Daniel, Emily et Becca.
Quelques réserves
Difficile d’en trouver devant cette lecture de l’Histoire, cette étude des sentiments vis-à-vis de son peuple, même si l’on peut moins aimer l’histoire d’amour toutefois émouvante !
Encore un mot...
Années 1990, années sanglantes et terribles pour ce pays en pleine guerre civile. A travers l’Histoire de tout un pays, nous suivons l’histoire de cette famille, les derniers juifs arabes restés après l’indépendance : une traversée où l’on sent les odeurs de ce pays, où l’on entend les bruits d’Alger, où l’on voit vivre la grande Synagogue, devenue la Mosquée des Juifs !
L’Histoire avec sa documentation ; ces juifs arabes deviennent français en 1870 par la loi Crémieux, loi qui sera abolie lors du régime de Vichy. Henri, le grand-père, sous le régime colonial, protégera les siens mais aussi tous ceux de la Casbah car pour lui c’est une même communauté entre juifs et musulmans.
Alors que cela fait 60 ans que furent signés les accords d’Evian, sur un fonds historique de tout ce que vécut ce pays, cette Maison Atlas nous fait revivre cette histoire des derniers juifs restés lors de l’indépendance de l’Algérie.
Une phrase
«( …) les problèmes avaient commencé quand les islamistes avaient remporté une élection aussitôt annulée par l’armée. Il s’agissait qu’ils ne feraient pas de l’Algérie un Etat religieux fondamentaliste. Mais tout portait à croire que le chaos gouvernait désormais son pays » ( p. 37)
L'auteur
Alice Kaplan est née en 1954 à Minneapolis. C’est une écrivaine universitaire et une historienne américaine. Elle a étudié à l’université de Bordeaux. Elle a été professeure de littérature et d’histoire ainsi que de langue française. Elle est spécialiste d’Albert Camus et c’est à travers lui qu'elle s’est beaucoup intéressée à l’histoire de l’Algérie, pays qu’elle aime beaucoup. La Maison Atlas est son premier roman.
Commentaires
C'est un roman fascinant, une histoire bien contée. Je ne partage pas toutefois le jugement politique qu' Alice Kaplan porte sur la guerre d'indépendance algérienne: un jugement indulgent et positif, soulignant la différence qu'il y aurait entre la violence de la guerre contre la France et celle de la guerre civile des années '90. Mais fondamentalement il n' y a pas de différence substantielle: la violence crée toujours de l'autre violence; elle bâtit les dictatures et le manque de liberté et de respect des droits humains! On ne peut pas construire un état avec la violence et puis en espérer tout le bien pour les gens et le peuple!
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