La Cheffe. Roman d’une cuisinière

Quand la cuisine devient un art sacré...
De
Marie Ndiaye
Editions Gallimard - 288 pages
Notre recommandation
4/5

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Thème

La Cheffe œuvre dans son restaurant du Sud-Ouest de la France- un établissement nommé La Bonne Heure. On sait que cette femme, dont on apprendra le nom seulement en fin de texte, a grandi dans une famille pauvre, qu’elle a commencé à travailler très jeune et découvert son don pour la cuisine à 16 ans quand elle a été employé chez une famille bourgeoise friquée et gourmet.      Dans « La Cheffe. Roman d’une cuisinière », la romancière s’efface derrière un narrateur- un homme aujourd’hui à la retraite dans sa résidence catalane. Il a travaillé au restaurant La Bonne Heure; en cuisine avec la Cheffe, il a été son commis puis son assistant. Il raconte. Beaucoup plus jeune que la cuisinière surdouée, il en a été secrètement amoureux. Il évoque les plats follement magiques qu’elle concoctait : le gigot d’agneau en habit vert, le canard laqué à la gelée de figues blanches, les vol-au-vent aux huitres de Camargue, la soupe de praires et d’asperges vertes, les paupiettes de lapin à l’oseille, le pigeon froid Chantilly aux épices… et que dire, comment qualifier cette simple et aérienne tarte aux pêches des Landes ? En cuisine avec cette femme puissante, «tout paraît aller de soi, la rapidité d’exécution, les gestes méticuleux, la danse laconique de son petit corps bien ramassé »

Points forts

- Marie Ndiaye aurait pu jouer la facilité, dérouler un texte tout en choses vues; c’est simple, ça peut rapporter gros quand on a un petit brin de plume… Mais, chance ultime pour le lecteur, chez cette auteure, au plus profond d’elle-même et depuis son premier roman, il y a l’exigence ultime. Il en va pour un roman comme en cuisine, si on sous-dose ou surdose un ingrédient, le plat est dénaturé !

- Tout comme avec sa Cheffe dans sa cuisine, Marie Ndiaye se lance dans une quête quasi spirituelle avec l’acte d’écriture…

- L’art et la manière du narrateur déroulant l’histoire de la Cheffe. L’ascension, la consécration (avec une première et fameuse étoile pour le restaurant), la chute… Il pointe également une relation aussi compliquée que tendue entre cette femme surdouée en cuisine et sa fille qui, plus tard, reprendra l’affaire.

- On savourera également de belles et douces pages pour le portrait d’une femme toute habitée par cet art sacré qu’est la cuisine…

- En creux, Marie Ndiaye dessine son autoportrait. « La Cheffe. Roman d’une cuisinière », c’est cuisine et… indépendance !

Quelques réserves

D’une jeune bonne à une cheffe cuisinière étoilée, on pourra reprocher à Marie Ndiaye le destin un peu trop romanesque de son héroïne. Sauf que, avec cette écrivaine hantée par les femmes puissantes qu’est Marie Ndiaye, les choses de la vie ne sont jamais aussi évidentes qu’on pourrait l’imaginer...

Encore un mot...

Pour son grand retour avec « La Cheffe. Roman d’une cuisinière », Marie Ndiaye a signé un des meilleurs textes de l’année 2016. L’hymne à la cuisine quand elle est art sacré… Un roman qui enserre, qui happe le lecteur. Un impeccable texte tout consacré à la cuisine et aussi à l’indépendance.

Une phrase

« Elle avait réalisé un mets rigoureusement juste, harmonieux et équilibré dans son austérité, un mets qui, selon l'expression que la Cheffe aimerait plus tard emprunter au vêtement, tombait à la perfection ».

L'auteur

Née le 4 juin 1967 à Pithiviers (Loiret), Marie Ndiaye est une écrivaine française. Elle a grandi en banlieue parisienne près de sa mère, professeure de physique- chimie. A 12 ans, elle commence à écrire ; à 17 ans, elle publie son premier roman, « Quant au riche avenir » aux Editions de Minuit. 

Suivront, entre autres, « Comédie classique » (1988), « En famille » (1991), « La Sorcière » (1996)… En 2001, elle reçoit son premier prix littéraire, le Fémina, pour « Rosie Carpe » ; en 2009, ce sera le prix Goncourt pour « Trois femmes puissantes ». Suivront « La divine » (2013) et, cette année, donc, « La Cheffe. Roman d’une cuisinière ».

Parallèlement, Marie Ndiaye écrit des pièces de théâtre (avec « Papa doit manger », elle est la seule écrivaine vivante à figurer au répertoire de la Coémdie-Française), des scénarios pour le cinéma et des romans jeunesse.

De l’écriture, elle dit : « C’est un processus tellement intellectuel, je trouve, que celui de l’écriture, et l’attention à la phrase, aux mots, est si accaparante… » .Quant au roman, elle explique qu’il « peut être divers, confus par moments, flamboyant, etc. Je cherche plutôt à ce que la « voix » du roman soit honnête ».

Depuis 2007, elle vit à Berlin avec son mari, l’écrivain Jean-Yves Cendrey, et leur enfant.

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