La ballerine de Kiev
Parution le 26 août 2024
249 pages
20,90 Euros
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Thème
Le 23 Février 2022, un jeune couple de danseurs étoiles Dmytro et Svitlana, amoureux à la ville comme sur scène dans Le Lac des Cygnes termine sous les ovations une représentation à l’Opéra de Kiev. A 5h07, le 24 février, les premiers obus russes tombent sur Kiev.
Entre le journal écrit par Svitlana, cette jeune danseuse et le récit précis sur le déroulement de cette invasion, nous suivons les faits réels de cette guerre atroce. Dmytro s’engage dans les combats sur le front ; Svitlana comme volontaire pour aider les civils….
Dans un témoignage sur cette Ukraine en guerre, se déroulent toutes ces vies anonymes, ces « aventures » des danseurs et autres travailleurs de l’Opéra de Kiev entrés malgré eux dans des combats mais aussi en résistance.
Points forts
Au côté de ce couple de danseurs, nous sommes plongés au plus près de cette tragédie avec tous les thèmes qu’elle aborde :
- La violence des attaques, les moyens employés pour la destruction de ce pays.
- L’impréparation de ces hommes, jeunes ou moins jeunes, mais qui veulent tous servir leur pays, leur épuisement.
- Un pays déchiré : la fuite de certains, des familles décimées mais aussi divisées entre pro-russes et pro-ukrainiens.
- La solidarité d’un pays qui ne s’avoue pas vaincu, la résilience de tous ces hommes et ces femmes. Tous ces héros anonymes.
- La danse pour résister, se reconstruire : malgré les blessures, les faiblesses, les absences, danser à l’hôpital pour les blessés, puis faire revivre le ballet de l’Opéra.
- La Force de l’Art face à la barbarie : le ballet contre les horreurs de la guerre.
Quelques réserves
Ne pas se fier à la couverture qui pourrait faire penser à un livre « feel good » !
Encore un mot...
Plus qu’une histoire (tragique) entre les danseurs-étoiles, le livre de Stéphanie Pérez est un témoignage d’amour au cœur de la tragédie ukrainienne. L’auteure est Grand Reporter de Guerre qui a vécu deux ans en Ukraine, et connaît le sujet.
Elle sait retranscrire, dans un style précis mais agréable, la vie terrible sous les bombardements, les descentes dans les abris anti-aériens. Mais aussi le quotidien des soldats, des prisonniers, la vie difficile pour toutes les générations et le courage de nombreux anonymes.
C’est une lecture émouvante sur le peuple ukrainien qui lutte pour ne pas disparaître, sur la jeunesse et ses espoirs d’avenir perdu.
Une grande question : l’art est-il indépendant de la politique ? Doit-on interdire (comme c’est le cas actuellement) la musique de Tchaikovsky, sous prétexte qu’il est le compositeur de Staline et de Poutine ? « La musique de Tchaikovsky est notre alphabet intime » p.11, dit la ballerine. Doit-on oublier les ballets chorégraphiés par des artistes russes ? Et comment oublier la littérature ?
Un livre pour ne pas oublier cette guerre qui se passe à nos portes.
Une phrase
« Si on n’y va pas, si on ne se bat pas, les chars russes seront devant chez nous. Et il n’y aura plus de chez nous. On ne va pas les laisser entrer dans Kiev. Je viens d’en parler avec Sergii. Demain, on s’inscrit au bureau de recrutement. » p. 23
« Svitlana se souvient de Babouchka lui contant combien Le Lac était étroitement lié à l’histoire politique soviétique. A l’époque de l’URSS, si on allumait le poste de télévision et qu’on voyait les cygnes, cela signifiait que l’heure était grave. Ce sont les cygnes qui avaient annoncé de leur battement d’ailes la mort de Brejnev ou le coup d'État de 1991. Doit-on censurer les œuvres du pays ennemi au prétexte qu’il vous agresse ? L’art n’est-il pas censé unir les peuples plutôt que de les diviser ? » p.101
L'auteur
Stéphanie Pérez est Grand Reporter pour France Télévisions, chargée de l’International. Elle s’est rendue plusieurs fois en Ukraine et a couvert de nombreux conflits. Ce livre est son deuxième roman après Le gardien de Téhéran (Editions Récamier, 2023).
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