Jeunes cœurs éprouvés
Traduit par Aline Azoulay-Pacvon
Paru en 1984, réédité en Octobre 2023
441 pages
22, 50 €
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Thème
Michael, aviateur pendant la guerre, et Lucy, riche héritière, se rencontrent à Harvard. Très amoureux, ils se marient et auront une fille. Refusant de profiter de la fortune de sa femme, il travaille dans l’édition et tente de publier ses poèmes. Ils rencontrent des amis artistes qui les fascinent par leurs succès apparents. Ils ne se sentent pas à la hauteur. Michael boit beaucoup, admire de moins en moins Lucy, elle-même lassée de son ton péremptoire sur tout. Après leur divorce, ils tentent vainement de trouver leur bonheur chacun de leur côté.
Elle se lance successivement dans le théâtre, l’écriture de nouvelles, puis la peinture, alors qu’elle enchaîne des liaisons passagères : rien ne semble lui plaire. Quant à lui, il ne trouve plus l’inspiration pour écrire des vers, de même qu’il passe de bras en bras sans y croire, étonné de « perdre » à chaque fois ces jeunes femmes, déçues par son comportement excessif ou dépressif. Il sauvera cependant sa fille de ses propres dérives, se remariera à plus de quarante ans et aura un fils, ce qui ne le rendra toujours pas heureux !
Points forts
- Une analyse aussi juste que subtile des affres de la vie conjugale : hantés par le rêve américain des années 1950, Michael et Lucy s’imaginent que les gens qu’ils côtoient s’épanouissent grâce à l’accomplissement de leurs vocations artistiques et au bonheur affiché de leur vie familiale. Leurs frustrations inévitables les minent et les conduisent à un sentiment d’échec.
- Des personnages rendus attachants par leurs maladresses, leurs erreurs, leurs failles. Le lecteur partage leurs hésitations, leurs doutes, leurs incertitudes.
- « Tout est dit », le plus beau poème de Michael, sert de fil conducteur symbolique à ce roman.
- Des passages ironiques sur le recours à l’alcool, les dépressions, et surtout sur l’inefficacité des psychiatres et l’horreur des traitements à l’hôpital.
Quelques réserves
Le pessimisme, revendiqué par le protagoniste dès les premières lignes et entretenu tout au long de son histoire, peut déplaire à certains : « A vingt-trois ans, Michael Davenport avait déjà appris à se fier à son scepticisme. Il n’éprouvait guère d’intérêt pour les mythes et légendes, y compris ceux qui prenaient la forme de lieux communs. Ce qu’il recherchait, en toutes circonstances, c’était ce qui se cachait derrière. »
Encore un mot...
Ce roman, paru en 1984, frappe par sa mélancolie touchante et par sa modernité visionnaire. Écrit d’une plume brillante et agrémenté par de nombreux dialogues si sincères et si justes qui animent le récit, il approfondit les tourments intérieurs de ces êtres aux rêves brisés. Les fêlures de ces Jeunes cœurs éprouvés soulignent leur perpétuelle insatisfaction et leur permettent de traverser le temps.
Une phrase
- « Et il sembla aux Davenport que leur besoin de côtoyer des gens intéressants n’était peut-être pas une cause perdue. » p.56
- « A défaut d’être un homme, il pouvait au moins être un personnage. » p.299
- « Tout le monde est fondamentalement seul”, lui avait-elle dit, et il commençait à voir qu’il y avait beaucoup de vérité là-dedans. » p.441
L'auteur
Richard Yates (1926-1992) rejoint l’armée pendant la Seconde Guerre mondiale, puis il est journaliste et publicitaire à New-York dans les années 1950. Il publie en 1961 La Fenêtre panoramique, adapté au cinéma par Sam Mendes : Les Noces rebelles en 2008. Seront publiés en France, Un été à Cold Spring (2011), Menteurs amoureux (2012), Un destin d’exception (2013), Une bonne école (2017).
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