Est-ce ainsi que les hommes jugent ?
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Thème
Gustavo, cadre financier et père de famille sans histoire vivant dans une banlieue pavillonnaire, voit débarquer, au petit matin, une horde de policiers qui fouille et saccage sa maison avant de l’embarquer menottes aux poings. Tout l’accuse d’un homicide survenu trois ans auparavant. Sont en cause : la couleur de sa voiture dont il a changé la calandre accidentée dans un casse, la couleur de ses cheveux et son blouson en jean.
Placé en garde à vue, la machine judiciaire puis médiatique s’emballent. Alors que le doute s’installe, son épouse, Sophie, va tout mettre en œuvre pour innocenter Gustavo.
Points forts
- Le roman décrit parfaitement le mécanisme du glissement d’une vie tranquille vers une machine infernale. Des indices presque implacables s’accumulent et les chaînes d’information et les réseaux sociaux, surfant sur l’émotion, condamnent sans preuves.
- La tension monte, de la perquisition à la garde à vue. L’engrenage se dramatise au point que Gustavo se met à douter de ses souvenirs et serait prêt à avouer afin que l’enfer cesse. Le lecteur doute aussi, troublé par les concordances qui ne pourraient être, finalement, que des coïncidences.
- Cette confusion nous montre la fragilité du fil qui sépare un coupable d’un innocent et l’impact de la rumeur. Il suffit d’un grain de sable pour que toute une vie bascule. Un enquêteur est persuadé d’avoir sous la main le criminel qu’il s’est fait un devoir de retrouver et cet homme, incriminé, est broyé et condamné par l’opinion car les réseaux de communication diffusent la parole d’une victime en quête de vengeance.
Quelques réserves
Le sujet, l’erreur judiciaire, n’est pas d’une grande originalité et le roman ne tient que grâce au suspense construit par l’auteur.
Encore un mot...
Un ton qui va crescendo et un emballement de l’enquête qui tourne en vindicte populaire. « Est-ce ainsi que les hommes jugent ? » conduit à s’interroger sur la présomption d’innocence lors d’une procédure judiciaire mais dénonce avant tout, dans le dernier quart de la lecture, le pouvoir démesuré des réseaux sociaux et le déchainement de ceux qui les utilisent pour lyncher leurs prochains, gratuitement, dans l’immédiateté, sans contrôle et au mépris de la justice. Que vaut, aujourd’hui, la présomption d'innocence au regard du poids de l’opinion publique et de la fulgurance du web ?
Une phrase
Page 196: " Gustavo regarde machinalement l’écran de son téléphone et s’aperçoit que son compteur de notifications Facebook a explosé. Dans le rond rouge, le chiffre 853. Interloqué, Gustavo en oublierait presque l’injonction de son ami Thierry d’allumer la télévision. Il fait deux choses à la fois. Il allume la télévision, tout en constatant qu’effectivement plus de 800 personnes ont écrit sur son journal. « salaud » « assassin » « on va te faire la peau » « tu vas payer » « ordure »".
L'auteur
Né en 1967, diplômé de HEC, Mathieu Menegaux a débuté sa carrière dans l’industrie, à l’étranger, et travaille toujours dans le domaine du conseil en management. Passionné de littérature et de chanson, il a commencé à écrire à l’âge de 45 ans. Son premier roman « Je me suis tue » est paru en 2015 et a été primé aux Journées du Livre de Sablet. Le deuxième, « Un fils parfait », prix Claude Chabrol du roman noir, est en cours d’adaptation pour la télévision.
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