Chanson bretonne, L’Enfant et la Guerre, Deux contes
160 p.
Infos & réservation
Thème
Dans cette Chanson bretonne, le narrateur tente de redonner vie à l’enfant qu’il était lors de ses étés à Sainte-Marine. Il égrène, comme des couplets, des scènes inoubliables,en les décrivant par petites touches. Par exemple, avec son frère, ils vont chercher le lait dans une ferme hors du temps : le plafond noirci, le sol en terre battue, l’odeur des vaches, la chaleur de l’étable, la saveur des crêpes épaisses, les sonorités de la langue bretonne, toutes ces sensations douces et sauvages sont ravivées. Dévaler les petites routes à vélo, assister à la moisson incarnée par le bruit menaçant de la batteuse, apprivoiser des doryphores ou un poulpe, apprendre à pêcher à marée basse, observer les galets polis par le temps ou écouter les roches qui chantent, il revit la magie et le mystère de ces souvenirs, comme des rituels ancestraux détruits par la modernité triomphante.
Les traces de la guerre découvertes à travers les bunkers sur les plages annoncent le deuxième conte, consacré à ses cinq premières années en Provence de 1940 à 1945, pendant lesquelles il souffre de la faim, de la peur, de l’enfermement, de la solitude, du vide. Deux blessures indélébiles le torturent encore aujourd’hui : le bruit assourdissant de l’explosion d’une bombe à Nice, associé au cri de tout son corps, et la mort d’un très jeune héros de la Résistance, dont on ne retrouve qu’une mèche de cheveux. A tous ces maux s’ajoute l’absence de son père, même s’il est réconforté par le giron maternel et les histoires d’un petit singe si bien racontées par sa grand-mère.
Points forts
• Les seize couplets de la Chanson bretonne s’assemblent autour du refrain de la disparition d’une époque révolue, comme un temps immuable relié au passé lointain de l’humanité. Même si Le Clezio refuse farouchement la nostalgie, « une faiblesse, une crispation qui distille l’amertume », elle colore pourtant de sa lumière grise ces courts chapitres.
• Autre hantise de l’auteur, l’autobiographie, toujours trahie d’après lui par l’imagination ou la complaisance. Lui, il ne construit rien, il refuse la chronologie, il veut seulement transmettre ce que ressentait l’enfant qu’il était et il y réussit merveilleusement.
• Il s’attache à la symbolique des lieux pour replonger dans cette terre de légendes, où il renoue avec ses origines familiales : la lande sauvage aussi bien que le château de conte de fées du Cosquer ou les environs de Pont-l’Abbé.
Quelques réserves
Je n’en vois pas.
Encore un mot...
Cette ode à la Bretagne de son enfance répond sans doute à la quête des origines, qui hante Le Clezio, l’exilé, « ballotté » entre la France et l’Afrique. En écho, les années de guerre si douloureuses dans l’arrière-pays niçois peuvent expliquer son tempérament secret et inquiet. On retrouve dans ces deux contes sa plume somptueuse qui allie le rythme musical des phrases à la subtilité des sensations et des images.
Une phrase
« Mes souvenirs se mêlent à cette émotion et me font retrouver, un instant, le temps à la fois si bref et si long de l’enfance. » p. 29
« Les cinq premières années de ma vie, je les ai vécues dans une guerre. » p .105
« C’est le temps qui ne passe pas … Pour nous qui étions enfermés, tous les jours étaient identiques, toutes les nuits se ressemblaient. » p. 140
L'auteur
Né en 1940, J.M.G. Le Clezio est l’un de nos plus grands écrivains. Prix Nobel en 2008, Il a publié plus de cinquante livres, essais, contes, nouvelles ou romans, souvent récompensés comme Le Procès-verbal, Prix Renaudot en 1963. Citons, entre autres, Mondo et autres histoires (1978), Désert (1980), Le chercheur d’or (1985), Voyage à Rodrigues (1986), Onitsha (1991), Etoile errante (1992), L’Africain (2004).
Commentaires
Récits très émouvants nous plongeant dans l'intimité de l'enfant que fut Le Clézio. Grande force poétique.
J' adore la prose de Le Clezio: la nature est vivante, l'odeur des vaches. Il utilise touts les senses.
Ajouter un commentaire