Chaleur Humaine
Parution le 23 août 2023
345 pages,
21,90 Euros
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Thème
Janvier 2020, Nous sommes aux Bertranges . Alexandre Fabier, agriculteur fidèle à la tradition, élève ses vaches salers dans cette nature entre rivière et collines du Lot. Les parents, retraités, vivent plus bas désormais, pratiquant le maraîchage. Ils regardent le JT de 20 Heures.
Janvier 2020 donc… un virus arrive de Chine ; chaque jour se suivent les annonces du gouvernement, elles se contredisent.
Les trois sœurs de la fratrie, qui vivent en ville, voient leurs angoisses augmenter au fil des jours. Elles décident de « se mettre au vert » en retournant aux Bertranges. Comment va se passer la promiscuité de cette fratrie qui ne se parle plus depuis une quinzaine d’années ? Entre les règlements de compte, l’épidémie qui fait peur et les amours retrouvés, la famille va vivre un huis-clos intense au milieu d’une nature qui reprend ses droits.
Points forts
Des personnages attachants:
- Alexandre le fils, le frère, le sage qui rassure. Il a repris la ferme familiale et se trouve bien sur ses terres. Il a misé sur une pratique agraire respectueuse de la nature et s’en félicite.
- Les parents, agriculteurs retraités, pleins de bons sens ; leur vie est rythmée par la culture de leur potager, la préparation des repas, leurs petits maux.
- Les trois sœurs : Caroline, divorcée, est professeur à Toulouse; Agathe tient avec son mari un bar-restaurant à Rodez, deux enfants; Vanessa habite à Paris et travaille dans la com’digitale. Elles ont renoncé à leur identité rurale et ont vendu lors de l’héritage leurs parcelles où sont installées depuis des éoliennes. Nous partageons leurs quotidiens, leurs terreurs… leur isolement. Nous entendons leurs confidences sur leurs vies de couples, de célibataire, leur travail. Elles ont peur de contaminer les Anciens et se voient “contraintes” de vivre à la ferme avec leur frère.
- Constanze, l’amour d’Alexandre : ils ne vivent pas ensemble. C’est une militante écologiste « apaisée » ; partie au loin, puis revenue, elle s’occupe d’une réserve biologique naturelle non loin en Corrèze.
- Et les animaux : vaches, chiens mais aussi les geais joyeux et les sangliers sauvages. Et trois chiots bichons maltais pleins de fantaisie.
Tous ces personnages bien croqués nous donnent un récit tendre fait de petits riens.
Quelques réserves
Des passages où le Coronavirus et les Gilets Jaunes (avec le mari d’Agathe, entre autres) prennent trop de place . Et des personnages très secondaires inintéressants.
Encore un mot...
Ce roman n’est pas un roman sur la Covid mais Serge Joncour nous replonge dans ces jours de janvier à mars 2020 avec les annonces quotidiennes gouvernementales. Annonces se contredisant parfois : celles des premiers malades, des morts, des quarantaines dans le monde entier, des masques obligatoires ou pas obligatoires, puis du manque de masques. Tout cela nous ramène à des jours où même le climat était perturbé puisque nous connaissions des journées exceptionnellement ensoleillées !
A travers cette famille contrainte de vivre ensemble, l’auteur aborde des thèmes importants : le réchauffement climatique, l’impact sur les bêtes, la ruralité, les cultures intensives, le désert médical (on fait appel au médecin faute de médecin !!). Joncour nous interroge donc sur les conséquences de cette pandémie sur les hommes, l’économie mondiale, les animaux et la nature.
Dans cet hymne à la nature, que de poésie pour nous la décrire ! Ainsi la description de la joie des vaches retrouvant leurs pâtures. Il nous faut être à l’écoute de cette nature : le chant des oiseaux, le réchauffement qui bouleverse l’arrivée des légumes, des fleurs. C’est ainsi que nous découvrons les pâturages naturels, les épidémies connues et surmontées par les agriculteurs, celles qui ravagent les forêts, le rôle des blaireaux et des renards, le repiquage des radis. Le tout sans nous donner de leçons.
Une belle chronique familiale, où l’on retrouve la réalité et la chaleur des liens. C’est toute la bienveillance et l’humanité de Serge Joncour.
Une phrase
- “Les bêtes se jetaient sur le chemin comme des gamins à l’eau, elles s’ébattaient entre les haies avec une gaieté folle.” p.7
- “Les vaches tournèrent à droite et entrèrent d’instinct dans le pré, des sifflements montaient des branches nues, rouges-gorges, pinsons et chardonnerets devaient croire que l’hiver était fini pour de bon, le long de la haie les pruniers sauvages étaient prêts à dégoupiller leurs bourgeons, dans une poignée de jours ils lanceraient leurs fleurs blanches à l’assaut du grand air. D’année en année, la nature était un peu plus en avance, les arbres se dépêchaient pour dresser des ombres.”p.9
- “Jean et Angèle en restèrent là, sachant depuis longtemps qu’il en était ainsi : la vie va d’une peur à l’autre, d’un péril à l’autre, en conséquence il convient de s’abreuver du moindre répit, de la moindre paix, parce que le monde promet de donner soif” p. 345
L'auteur
Serge Joncour, né en 1961, publie son premier roman, Vu, en 1998. Ses thèmes de prédilection sont les complexités de la nature humaine, les relations amoureuses, l’homme et la nature, l’observation précise de la nature. En 2020, il publie Nature Humaine dans lequel apparaît déjà la famille Fabier.
Commentaires
Lire absolument « Nature humaine « . Magnifique.
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