Rigoletto
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Thème
Inspiré par Le Roi s’amuse, publié en 1832 par Victor Hugo, Rigoletto relate la tragédie d’un être difforme et sarcastique qui exerce la profession de bouffon auprès d’un duc volage et désinvolte.
Tenu à l’obligation de faire rire, souvent aux dépens d’autrui, Rigoletto, objet de tous les quolibets et de toutes les détestations, n’a dans la vie qu’un seul bonheur, sa fille, Gilda, qu’il cache pour éviter qu’elle ne tombe dans les bras des dépravés qui pullulent à la Cour. Mais Gilda va parvenir à échapper à la vigilance de son père et tomber amoureuse du… duc. Un jour, pour jouer un vilain tour à Rigoletto qu’ils n’aiment pas, des courtisans vont enlever la jeune fille… Le drame est en marche… Rigoletto deviendra l’assassin de sa propre fille.
Points forts
Equilibre, magnificence des arias, participation chorale, ampleur orchestrale, intrigue aussi (un drame parfait)… Cet opéra est un chef d’œuvre. Il est impossible de résister à sa charge émotionnelle.
Il est d’autant plus difficile d’y résister ici, que la direction musicale de cette production est assumée par un chef qui restitue, avec autant de fougue que de maitrise, toutes les nuances, tous les éclats, toute la tension de la partition. Ce chef s’appelle Daniele Rustioni. Il n’a que 34 ans, mais déjà une très belle carrière qui l’a amené à diriger un peu partout dans le monde. Il était le Chef principal de l’Orchestre de Toscane. Il deviendra à l’automne prochain celui de l’Opéra de Lyon. On n’a sans doute pas fini de parler de lui.
Si le public a ovationné ce chef italien, les chanteurs l’ont aussi remercié chaleureusement le soir de la première. Il faut dire que, de son pupitre de fosse d’orchestre, il a guidés ces derniers, avec une belle et rassurante précision.
Tonnerre d’applaudissements pour le Rigoletto du serbe Zelijko Lučić . Voix ample et nuancée, présence incontestable, le baryton a donné à voir et à entendre toutes les facettes de son personnage, de la plus détestable (quand il moque ses semblables) à la plus émouvante, lorsqu’il exprime son amour pour sa fille, sa douleur, insupportable, de l’avoir tuée.
Même type d’accueil pour la Gilda de Nadine Sierra, et qui s’explique par la tenue scénique et la voix pure et lumineuse de la soprano américaine.
Acclamations aussi pour Vittorio Grigolo à qui le rôle du Duc de Mantoue va comme un gant. Pour l’interpréter, le ténor italien a tout : la prestance, l’insolence, la masculinité, la désinvolture et la …voix, une voix affirmée, dynamique et solaire.
Les chœurs n’ont pas été « épargnés » non plus par l’enthousiasme de la salle. Ils sont, comme d’habitude, plus que parfaits.
Très chaleureusement applaudie aussi (ce qui n’avait pas été le cas à la première présentation de cette production l’année dernière), la mise en scène, qui met l’histoire de Rigoletto, en abyme. Claus Guth a imaginé faire revivre le drame de ce dernier, à un double, muet et clochardisé. Ce double arrive en scène en portant une boite en carton dans laquelle il conserve des souvenirs. Des souvenirs qu’il va extraire au fur et à mesure que se déroule l’intrigue… Le théâtre dans le théâtre, c‘est une belle idée. Pas nouvelle, mais ici, très bien réalisée.
Quelques réserves
Ce ne sont pas des points faibles à proprement parler ; ce sont des points qui pourront prêter le flan à des reproches:
- On pourra, par exemple, ne pas aimer le parti pris de la mise en scène, dont on pourra penser qu’en le dédoublant, elle nous éloigne de Rigoletto.
- On pourra aussi regretter, sur le fond du décor, la projection de vidéos illustratives, ou décalées, parce qu’il faut bien convenir que ces images filmées n‘apportent rien à la compréhension de l’œuvre.
- Bien qu’elle ait été sans doute conçue comme un clin d’œil appuyé à l’encanaillement des gens de cour, la revue de danseuses emplumées genre Folies Bergère qui accompagne le fameux « Comme la plume au vent » pourra être discutée.
- Enfin, malgré de somptueux jeux de lumière, on pourra ne pas être convaincu par le décor, une immense boite en carton dans laquelle évoluent les personnages, et qui est comme une représentation géante du petit carton dont le double de Rigoletto extrait ses souvenirs.
Mais, selon son état d’esprit, on pourra, à l’inverse, trouver que tous les points évoqués ci-dessus rendent passionnante cette proposition de lecture de Rigoletto.
Encore un mot...
Comment ne pas approuver la direction de l’Opéra de Paris d’avoir repris cette mise en scène, même si c’est juste un an après sa création ? Car si elle ne fait toujours pas l’unanimité de la critique, cette production déchaine, cette fois encore, l’enthousiasme du public.
Les spectateurs qui avaient eu la chance de la découvrir l’année dernière peuvent même y retourner. Musicalement et vocalement, tout a changé. Ce n’est pas mieux, parce que c’était formidable, mais c’est au moins, au moins, aussi bien. Ce qui n’est pas peu dire.
Une phrase
« Ô hommes ! Ô nature ! c’est vous qui avez fait de moi un vil scélérat ! O rage ! Etre difforme ! Etre bouffon ! Ne devoir, ne pouvoir faire autre chose que rire ! » ( Rigoletto, acte 1).
L'auteur
Né le 10 octobre 1810 à le Roncole (province de Parme) dans un milieu simple mais relativement aisé, Giuseppe Verdi est un musicien précoce. Il a tout juste onze ans quand on le nomme organiste de l’église de Busetto. Grâce à un négociant en spiritueux qui devient son mécène et dont il épousera plus tard la fille en première noce, il part approfondir ses études musicales à Milan.
Il n’a pas vingt ans quand la Scala lui commande son premier opéra. Son Oberto lui vaut un succès qui l’encourage à persévérer dans le lyrique, pour lequel, d’ailleurs il n’arrêtera plus de composer, exception faite de la période qu’il lui fallut pour surmonter l’épreuve de la disparition de sa femme et de leurs deux enfants. En 1842, son Nabucco, d’une véhémence vocale sans précédent connaît un triomphe. On en donnera 65 représentations, un record absolu dans l’histoire de la Scala.
Après Attila et Macbeth, il se retrouve sans rival. En 1851, Rigoletto qui sera le premier volet de ce qu’on appellera plus tard sa trilogie populaire (avec le Trouvère et la Traviata) assoira encore sa notoriété qui deviendra planétaire. Suivront Un Bal Masqué, Aida et Falstaff.
Verdi mourra à Milan le 27 janvier 1901, en léguant ses biens à la maison de retraite pour vieux musiciens qu’il avait fondé dans cette ville.
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