Giselle

À l’Opéra de Paris, un ballet à la belle Étoile. Un enchantement !
Chorégraphie Jean Coralli, Jules Perrot
Musique Adolphe Adam
Livret Théophile Gautier, Jules-Henry Vernoy de Saint-Georges
Décors et costumes Alexandre Benois
Avec Marianela Nuñez (artiste invitée), les Étoiles, les Premières danseuses, les Premiers danseurs et le Corps de Ballet de l’Opéra de Paris
2h10 avec 1 entracte
Notre recommandation
5/5

Infos & réservation

Opera de Paris
Jusqu’au 1er juin 2024

Thème

Parangon du ballet romantique, Giselle est créé en 1841 à l’Académie royale de Musique, aujourd’hui l’Opéra de Paris, sur la partition d’Adolphe Adam et la chorégraphie de Jules Perrot et Jean Coralli. Dans le livret composé par Théophile Gautier et Jules-Henri Vernoy de Saint-Georges, Giselle, une jeune paysanne, s’éprend d’un bel inconnu qui prétend s’appeler Loys. Charmé en retour, celui-ci jure à la belle villageoise une fidélité éternelle. Mais Hilarion, le garde-chasse également amoureux de Giselle, soupçonne le nouveau venu d’être plus noble qu’il ne le dit. Qu’importe. Dans la liesse du village, Giselle danse pour son amant, malgré les mises-en-garde de sa mère contre les Willis, ces jeunes femmes trahies avant leurs noces qui errent dans la forêt sous forme de fantômes. Alors que le Prince de Courlande fait halte avec sa fille, la Princesse Bathilde, et toute sa suite au milieu des festivités, la véritable identité de Loys est révélée : il n’est autre que Albrecht, duc de Silésie et fiancé de la Princesse. Giselle, sous le choc de la nouvelle, sombre dans la folie et meurt de chagrin.

Désespéré, Albrecht se rend en pleine nuit à l’orée du bois pour pleurer sur la tombe de Giselle. Hilarion l’y rejoint et tous deux sont surpris par un cortège d’ombres blanches, les Willis, guidée par leur reine Myrtha. Celles-ci condamnent les jeunes imprudents à danser jusqu’à la mort. Giselle, devenue Willi, supplie Myrtha d’épargner Albrecht, mais elle et ses consœurs demeurent inflexibles. La jeune défunte soutient alors son amant dans ses pas meurtriers jusqu’au point du jour, qui contraint les Willis à regagner leurs ténèbres et sauve la vie d’Albrecht. 

Points forts

Cette série de Giselle fut marquée par de nombreux temps forts. D’abord plusieurs prises de rôles (Hannah O’Neill, Bleuenn Battistoni, nommée Étoile à peine un mois plus tôt, et Inès McIntosh, Première danseuse très prometteuse) ; puis les adieux à la scène de l’Étoile Myriam Ould-Braham, saluée le 18 mai dernier avec une émotion profonde, mélange de joie et de nostalgie ; enfin, la venue exceptionnelle de Marianela Nuñez, Principal dancer (équivalente d’Étoile) du Royal Ballet, pour deux représentations, les 25 et 27 mai. Une première pour la ballerine londonienne originaire de Buenos Aires, dont on se réjouissait depuis plusieurs mois.

Et l’on ne fut pas déçu. Marianela Nuñez est tout simplement merveilleuse dans le rôle de Giselle, personnage qu’elle connaît par cœur. D’une grâce et d’une sensibilité rares, sa jeune paysanne enamourée ravit par son espièglerie et sa naïveté, tandis qu’en Willi, dans une tristesse pleine d’espérance, elle touche d’une émotion singulière. On ne cesse d’admirer la légèreté finement maîtrisée de ses arabesques et de ses grands jetés. Mais plus que sa technique sans faille – impressionnante de vivacité pour une danseuse de quarante-deux ans, l’âge de la retraite dans le Ballet de l’Opéra de Paris – c’est sa générosité et son intelligence du détail, qu’elle met dans chaque pas et expression, qui disent tout son talent d’interprète. Si bien qu’il faut parler de « prodige » pour rendre justice à Marianela Nuñez, une artiste unique, et bien l’une des plus grandes (si ce n’est la plus grande) de sa génération. 

Si « Nela » honore le Ballet de l’Opéra de Paris de sa présence, à ses côtés, Hugo Marchand atteint lui aussi des sommets de virtuosité et d’émotion. L’Étoile française s’impose par son gabarit robuste et élancé, qui ne l’empêche pas de survoler les défis techniques du rôle d’Albrecht (notamment une redoutable série d’entrechats au second acte). Mieux, toute sa danse respire la joie d’être en scène. Avec sa partenaire, il forme ainsi un duo complémentaire, qui parvient à tisser une complicité dramatique irrésistible. Tout autour d’eux, le Corps de Ballet se présente en grande tenue et assure de beaux ensembles de bout en bout. Le charme opère surtout avec la distribution exclusivement féminine du second acte, dévoilant les Willis en longs tutus blancs romantiques. Coordination précise, lignes harmonieuses, mouvements délicats, les danseuses de la compagnie parisienne ont mis tout leur art au service du ballet. 

Quelques réserves

Face à l’excellence des artistes tenant les rôles principaux, les solistes ont souvent du mal à se hisser au niveau. Dans l’acte I, le Pas de deux des paysans manque malheureusement de relief et de précision. Andréa Sarri propose des variations un peu brouillonnes, avec une réception de saut assez maladroite, tandis que Nine Seropian, plus nette techniquement, ne convainc guère côté interprétation. Dans l’acte II, Valentine Colasante s’impose dans le rôle de Myrtha avec une technique impeccable, mais son autorité laisse quelque peu de marbre.

Encore un mot...

Ballet phare du répertoire de l’Opéra de Paris, Giselle est témoin de nombreux accomplissements de carrières depuis près de deux siècles. Entre débuts, adieux et rencontres au sommet, cette série de représentations fera date. 

Une phrase

« Je ne connais pas d’autre ballet, où la danse donne si parfaitement l’illusion d’une narration dramatique… La danse n’y est pas un exercice de virtuosité acrobatique, elle est expressive : l’action se traduit de la sorte uniquement par des moyens dansants et acquiert une force, une intensité d’émotion rarement égalée », Serge Lifar, à propos de Giselle, programme de spectacle Giselle, Opéra de Paris, saison 2023-2024, p. 81.

L'auteur

Jean Coralli (1779-1854) est un danseur et chorégraphe de ballet d’origine italienne. Formé à l’École de Danse de l’Opéra, il se produit à Paris puis à Londres au début du XIXe siècle. Entre-temps, il entreprend une carrière de chorégraphe à Vienne. Également maître de ballet, il voyage de Milan à Lisbonne en passant par Marseille avant de se mettre au service de l’Académie royale de Musique en 1831. C’est là qu’il règle les chorégraphies de L’Orgie (1831), Le Diable boiteux (1834), La Tarentule (1839), Giselle (1841, avec Jules Perrot) et La Péri (1843). 

Jules Perrot (1810-1892) est l’un des danseurs les plus célèbres de l’époque romantique. En 1831, à l’Opéra de Paris, il est le partenaire de l’illustre Marie Taglioni dans Flore et Zéphire de Didelot. Parti à Londres puis à Naples, où il développe des activités de chorégraphe, il rencontre Carlotta Grisi et le couple se produit sur les grandes scènes européennes jusqu’en 1840. De retour à Paris, Jules Perrot règle notamment les variations de Giselle dans le ballet éponyme, dont le rôle est créé par Carlotta Grisi. Ayant quitté l’Opéra pour Londres, il occupe le poste de maître de ballet du Her Majesty’s Theatre jusqu’en 1848. Parmi ses ballets, beaucoup sont de grands succès, à l’image d’Alma ou la Fille du feu (1842, pour la ballerine Fanny Cerrito), Ondine ou la Naïade (1843) et La Esmeralda (1844).

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