La Fille mal gardée
Arrangements musicaux John Lanchbery
Décors et costumes Osbert Lancaster
Lumières Jean-Pierre Gasquet et Pascal Neniez
2h05 avec 1 entracte
Infos & réservation
Thème
Ballet comique chorégraphié par Jean Dauberval à l’aube de la Révolution française, La Fille mal gardée a traversé les siècles et inspiré de nombreuses réinterprétations. Aujourd’hui, on la connaît surtout dans la version de Frederick Ashton, créée en 1960 au Royal Ballet de Londres et transmise à l’Opéra en 2007. Le chorégraphe britannique y remet au goût du jour les amours de la jeune fermière prénommée Lise et de son berger, le beau Colas. Les deux tourtereaux se déclarent leur flamme, échangent des rubans et des serments, et filent la parfaite amourette. Mais Simone, la mère de Lise, ne l’entend pas de cette oreille et s’évertue à les séparer. Du même pas, elle projette le mariage de sa fille avec Alain, le fils d’un vigneron bien loti. Mais Lise et Colas ont plus d’un tour dans leur sac et usent de mille ruses pour faire triompher leur union.
Points forts
Créée au Grand-Théâtre de Bordeaux en 1789 sous le titre Le Ballet de la paille ou Il n’est qu’un pas de mal au bien, l’œuvre de Jean Dauberval n’est renommée La Fille mal gardée que deux ans plus tard, lors de sa présentation à Londres. Bucolique à souhait, cette composition dansée transporte le genre du ballet-comique dans un monde idéalisé de la campagne paysanne, mettant en scène les amours contrariées et facétieuses de Lise et Colas. Près de deux siècles plus tard, le chorégraphe britannique Frederick Ashton reprend l’univers et l’argument de cette pastorale pour livrer une version en deux actes où priment la narration et l’expression. Tandis que les deux amoureux barattent gaiement le beurre dans la basse-cour, les villageoises et villageois moissonnent les blés dans la joie, avant de se laisser porter par la liesse d’une fête champêtre. Plein d’humour et de friponneries, le ballet tisse des liens étroits entre pantomime et musique et semble baigner dans une atmosphère de douce naïveté, telle un sourire d’enfant.
Pour conter cette idylle des champs, les deux étoiles jouent de tous leurs charmes. Comme une évidence, Léonore Baulac rayonne dans le personnage de Lise, qui lui va comme un gant. On apprécie son jeu plein de malice et de naïveté, mais aussi sa musicalité fine et sa technique fluide et légère. À ses côtés, Guillaume Diop réussit haut la main sa prise de rôle dans les pas de Colas. Son interprétation trouve un bel équilibre entre la technicité des variations en solo – notamment des tours d’une grande précision et des sauts d’une amplitude remarquable – et la sensibilité de son personnage, un amoureux candide mais futé, qui vient conter fleurette à la paysanne élue de son cœur. Entre leurs chassés-croisés et leurs pas de deux enlacés de rubans, la complicité du couple sur scène ravit. Autour d’eux, les solistes et le corps de ballet forment une joyeuse foule, dans des tableaux de farandoles et de rondes plutôt bien coordonnés.
Quelques réserves
Entre le zèle espiègle de Lise et Colas, les bouffonneries maladroites et embarrassées d’Alain et les taquineries des uns et des autres qui font tourner Mère Simone en bourrique, les amours de La Fille mal gardée forcent les traits d’humour. L’œuvre de Frederick Ashton met à dessein la virtuosité en retrait pour faire la part belle à la théâtralité. Mais à la longue, le ballet épuise les ressorts comiques qui jalonnent son intrigue, dont les charmes sont ceux d’un autre temps. À l’inverse, on s’étonne des imprécisions qui subsistent dans l’exécution des ensembles, pourtant sans difficulté technique majeure. Tantôt, des atterrissages de sauts vacillants, tantôt des mains en manque de tenue… Si les personnages du ballet ont le sens de la fête, leurs interprètes peuvent encore affiner leur sens du détail.
Encore un mot...
Repris pour la cinquième fois depuis son entrée au répertoire de la compagnie, le ballet de Frederick Ashton poursuit son petit bonhomme de chemin à l’Opéra de Paris. Parenthèse bucolique et comique, La Fille mal gardée s’apprécie avec un esprit léger et un regard d’enfant.
Une phrase
« La popularité de ce ballet n’est certainement pas due à l’originalité du sujet, mais au fait que l’on peut toujours lui insuffler une nouvelle vie. Je voulais exploiter à nouveau ma fibre comique, donner au ballet une franche gaîté et un lyrisme naturel, et aussi développer le thème des rubans comme un genre de leitmotiv ou de thème symphonique », Frederick Ashton, « My conception of La Fille mal gardée », dans Ivor Guest, La Fille mal gardée, Londres, The Dancing Times, 1960 (Extrait), cité par Opéra de Paris, programme de La Fille mal gardée, saison 2023-2024, p. 75.
L'auteur
Sir Frederick Ashton (1904-1988) naît à Guayaquil mais grandit au Pérou. Parti pour l’Angleterre au début des années 1920, il commence une carrière de danseur en secret, avec Léonide Massine et Marie Rambert. Cette dernière l’oriente rapidement vers la chorégraphie, lui permettant de présenter une première création dès 1926, A Tragedy of Fashion. C’est également avec Marie Rambert que Frederick Ashton fonde le Ballet Club en 1930, avant de rejoindre une autre compagnie londonienne, le Vic-Wells Ballet de Ninette de Valois. Il signe de nombreuses chorégraphies pour les plus grandes troupes du monde, dont les Ballets Russes de Monte-Carlo, les Ballets de Paris de Roland Petit, le New York City Ballet et le Ballet royal danois. Il chorégraphie une cinquantaine de pièces pour le Vic-Wells Ballet (devenu Royal Ballet en 1956) , dont Cendrillon (1948), La Fille mal gardée (1960) et Les deux pigeons (1961), avant de succéder à Ninette de Valois en 1963.
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