Quand la France était la plus grande puissance du monde
160 p.,
20€
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Thème
L’ombre portée par la Révolution a largement discrédité les 15 années du règne de Louis XVI avant 1789. A rebours de cette vision traditionnelle, Raphaël Chauvancy brosse un tableau bien différent de l’Ancien Régime finissant. Ce fut, explique-t-il, l’apogée de la puissance française ; pays le plus peuplé d’Europe, enfin doté d’une marine capable de rivaliser avec la Royal Navy, d’une armée de terre redoutée sur le continent, la France est alors l’arbitre de l’Europe, sous la férule d’un roi intelligent, compétent et mesuré, Louis XVI, et d’un ministre talentueux, Vergennes. Son économie est en passe de combler son retard sur le Royaume Uni, l’état de droit est à peu près respecté ; même la dette contractée pour financer la guerre d’indépendance américaine n’est, toutes proportions gardées,guère plus grande que la dette britannique. Quant à la langue et à la culture françaises, elles rayonnent sur l'Europe contribuant au “soft power“ du royaume.
Points forts
Un regard neuf et original sur une période bien plus faste qu’on ne l’a dit et dont on ne retient généralement que les aspects négatifs : rappel des Parlements, disgrâce de Turgot, affaire du collier de la reine, incapacité chronique à stabiliser le système fiscalo-financier… La thèse de M. Chauvancy est fondée une réelle maîtrise des sources, données chiffrées et archives de l’époque, non seulement quant à l’équilibre des forces militaires et navales avec l’Angleterre et les États continentaux, mais sur bien d’autres aspects de la vie politique et financière ; ainsi la correspondance de Louis XVI avec Vergennes montre la qualité de la réflexion tant du roi que de son ministre en matière de politique étrangère et d’équilibre des puissances qui tranche avec l’image d’un souverain timoré et benêt.
La subtilité de l’analyse de l’auteur sur les relations internationales, sur la notion de puissance, comme sur les quelques erreurs qui ont mis à bas l’édifice patiemment construit [l’affaire hollandaise], est du meilleur niveau.
Fort de cette lecture, on est conduit à jeter un regard fondamentalement différent sur la Révolution et l’Empire, à la fois pour déplorer que la rupture révolutionnaire ait donné un coup d’arrêt à cette acmé de la puissance française, et pour mieux comprendre les bases du succès napoléonien.
Quelques réserves
Sur la forme on pourrait regretter le côté un peu didactique de la présentation, mais au total, l’ouvrage est plaisant à lire.
Il est surtout dommage que l’analyse se borne à la période pré-révolutionnaire – Chauvancy date le début de la fin de la mort de Vergennes en 1787 - ; on aimerait que l’auteur applique la même grille de lecture aux facteurs et aux événements clés qui ont conduit à une chute aussi brutale de cette première puissance mondiale à partir de 1789, même s’il cite les raisons «classiques » qui sont généralement retenues pour expliquer la révolution; au fond, mutatis mutandis, c’est comme si la puissance des États-Unis disparaissait dans les cinq prochaines années.
Encore un mot...
Aussi remarquable qu’originale, l’analyse de Raphaël Chauvancy modifie du tout au tout la perception traditionnelle d’une fin crépusculaire de l’Ancien Régime ; cette époque n’était pas seulement celle de la “douceur de vivre”, mais peut-être l’apogée de la puissance française.
Une phrase
Page 35. « La puissance française s’exprime aussi, indirectement, à travers l’essor du droit des gens et de la puissance morale. (…) On trouve bien des inégalités et des injustices au royaume des lys, mais à regarder le monde comme il va à l’époque, il est certain que l’on est mieux protégé de l’arbitraire en naissant sujet du roi de France que partout ailleurs sur la planète.»
L'auteur
M. Chauvancy fut officier des troupes de marine ; il a servi en Afrique et fut détaché auprès des Royal Marines britanniques. Il est spécialisé dans les problématiques de puissance et de commandement et dirige un module « stratégies de puissance » à l’Ecole de guerre économique.
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