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par Culture-Tops
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Thème
Journal intime d’une aristocrate anglaise désargentée, la petite quarantaine, mère de deux enfants, affublée d’un mari taciturne et vivant entre ennui et obligations sociales au fin fond du Devonshire. L’auteure nous livre, presque au jour le jour, ses états d’âme sur la plantation des bulbes d’hiver, la naissance d’une portée de chatons indésirables, le mauvais caractère de la cuisinière et le snobisme de la richissime Lady voisine.
Entre auto-flagellation et ambitions d’émancipation, la jeune femme nous plonge dans un univers caricatural « so british », reflet d’une époque et d’une manière de vivre encore très victorienne.
Points forts
1-Une étude de mœurs si caricaturale qu’elle en devient le ressort du comique
Entre sarcasme et ironie, on sourit à la description d’un petit train-train quotidien, de Mademoiselle, la gouvernante française, hystérique et bigote (merci pour les poncifs sur les français), du mari bourru et absent dont les silences concurrencent ceux du Colonel Bramble, de la femme du pasteur aux ventes de charité et aux trajets folkloriques en train pour la Côte d’Azur. Mais on ne peut s’empêcher d’admirer cette femme qui se débat dans sa quête permanente d’un graal que nous trouvons si facilement à notre portée aujourd’hui : l’indépendance.
2-Un style lucide, sans hypocrisie
Si l’héroïne paraît gaffeuse et empêtrée dans sa quête pathétique d’émancipation, le style de cette autobiographie est tout le contraire. Un entre-deux tons, doux et hésitant, mais très lucide et c’est ce qui fait le charme suave et l’intérêt de ce récit jamais moralisateur mais émaillé de perles : « S’il y a bien une différence entre les sexes, c’est la tendance masculine à remettre quasiment tout au lendemain, sauf s’il s’agit de passer à table ou d’aller se coucher. »
Quelques réserves
Avant de commencer ma lecture, je pensais tomber sur un récit grinçant et pétillant sur les travers de la vie convenue de l’Angleterre campagnarde de l’entre-deux guerres, avec des pointes de cet humour si typiquement britannique fait de dérision et de détachement. Un journal intime de Bridget Jones… qui aurait été écrit par Jérôme K. Jérôme ou George Bernard Shaw ! Unfortunately not !
Encore un mot...
"Robert me demande pourquoi je ne viens pas me coucher. Je lui réponds : « Parce que j’écris mon journal. » Il dit gentiment, mais d’un ton péremptoire, qu’à son avis, je perds mon temps. Une fois couchée, je suis assaillie par cette question : Et si Robert avait raison ?"
Une phrase
Si on ne retrouve pas le raffinement complexe de Downtown Abbey, l’élégance des sentiments de Jane Austeen, ni la violence des passions des sœurs Brönte, on aimera plonger dans l’univers étriqué de la province anglaise, vue par une femme qui se veut libérée et originale, mais qui pourtant, ne dit pas un mot de la crise de 29, et sur la qui la vie semble couler comme « de l’eau sur les plumes d’un canard ».
L'auteur
Edmée Elisabeth Monica Dashwood, 1890-1843. (N’est-ce pas merveilleusement prédestiné de porter le nom, des célèbres Misses Marianne et Elinor Dashwood de « Sense and Sensibility » de Jane Austeen)! Le pseudonyme Delafield est une adaptation franglaise du patronyme de son père, le comte Henry de La Pasture, descendant d’aristocrates français émigrés sous la Révolution. E.M Delafield est une femme qui se cherche, en ce début de siècle charnière pour la condition des femmes. De ses expériences variées (religieuse, infirmière de guerre, présidente d’Association littéraire, écrivain, épouse et mère), elle tire ses romans, presque toujours autobiographiques. Spécialiste reconnue des sœurs Brönte et de Jane Austeen, peu traduite en français, elle est extrêmement populaire en Angleterre et aux Etats-Unis; elle sera même parodiée dans l’un des épisodes des Simpson !
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So british, oui mais pour en faire quoi ?
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