Outre-Terre
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Thème
Lors d’un dîner du dimanche soir, en 1997, Jean-Paul Kauffmann propose à sa famille d’aller à Eylau pour célébrer le bicentenaire de la bataille, le 8 février 2007, sans susciter le moindre enthousiasme ! Pourtant « la famille Fenouillard » se retrouve bien à Kaliningrad, au « pays des ex-soviets ». Ils vont arpenter les lieux désolés de cette Outre-terre en minibus jaune, à la recherche des traces de la victoire napoléonienne au goût amer, qui annonce les désastres futurs. Le récit des différentes séquences de cette journée si meurtrière reprend les mémoires historiques, en s’appuyant aussi sur le célèbre tableau de Gros, sur le Cimetière d’Eylau de Victor Hugo, sur le Colonel Chabert, la nouvelle de Balzac et le film d’Yves Angelo. Le narrateur alterne habilement les actes héroïques de la Grande Armée, qui atteignent leur apogée à travers la charge éblouissante de Murat, avec leurs propres découvertes dans cette ville improbable et les échos intimes qu’il retire de ce deuxième voyage à Eylau.
Points forts
• Pourquoi J.P. Kauffmann se passionne-t-il pour Eylau ? pour son caractère incertain, la victoire étant revendiquée encore aujourd’hui par les russes, et pour les ombres qu’elle porte en germe sur la suite et la fin de l’Empire. Les interrogations sur ses propres motivations répondent en échos aux questions de Napoléon ou de ses généraux.
• Un titre magnifique et symbolique, Outre-Terre: Eylau est une bataille d’au-delà, elle outrepasse toutes les autres dans son déroulement, son statut, sa signification.
• La quête d’un lieu intact, comme les îles Kerguelen, Sainte-Hélène ou Eylau : il éprouve une vraie jouissance devant ces lieux désolés. Il se définit comme un « chasseur de traces ».
• Il évoque avec pudeur ses trois ans d’emprisonnement au Liban, en refusant d’être réduit à ce passé d’ex-otage, tout en reconnaissant qu’il a profondément changé.
• Le thème du revenant : il s’identifie à Chabert, le mort-vivant, le fantôme qui réapparaît, alors que personne ne l’attend ; un « personnage fétiche dans notre famille. Un modèle d’endurance. On lui attribue un pouvoir magique et bénéfique … héros lazaréen qui surgit d’entre les morts, avec ce mélange de fierté et de dérision qui fait son charme. »
• Les différences et les rapprochements qu’il établit entre le travail du journaliste et celui du romancier : écrire l’a sauvé, comme les livres, qui lui permettaient d’échapper à la morosité de la pension.
• Des portraits éblouissants et particulièrement vivants des héros de cette bataille : Augereau, Marbot, Hautpoul, Davout et bien sûr Murat.
Quelques réserves
Je n’en vois pas …
Encore un mot...
Grâce à ce voyage accompli au milieu des fantômes de l’Histoire, Jean-Paul Kauffmann nous offre un récit remarquable de la bataille d’Eylau ; la précision dans la description des différentes attaques souligne son admiration pour les exploits de ces héros, animés par le goût de la gloire et le sens de l’honneur, et galvanisés par Napoléon ; la fascination pour le sombre romantisme du tableau de Gros ou pour la scène de la charge formidable de Murat, « le moment le plus envoûtant » du film d’Angelo révèle sa passion pour cette victoire manquée, qui n’intéresse plus personne. Ce livre magnifique, écrit avec élégance, enrichit le lecteur : il nourrit son esprit et élève son âme !
Une phrase
« J’ai mis longtemps à comprendre que le passé n’était pas un refuge … C’est la mise en absence qui m’émeut, le signe irrémédiable qu’il manquera toujours quelque chose. Seuls des personnages de roman comme le colonel Chabert parviennent à combler le vide … Il est l’éternel présent. Remuant, vigoureux, immortel. » p. 122
L'auteur
Né en 1944, Jean-Paul Kauffmann a été journaliste à RFI, à l’AFP, au Matin de Paris. Grand reporter à l’Evènement du jeudi, il est pris en otage à Beyrouth en 1985 et restera enfermé pendant trois ans. Libéré en 1988, il renonce à son métier de journaliste pour devenir écrivain; ses romans connaissent le succès :L’Arche des Kerguelen : voyage aux îles de la Désolation (1993), La Chambre noire de Longwood, Prix Roger Nimier et prix Joseph Kessel 1997, Courlande (2009),Remonter la Marne (2013).
Et aussi
L'ultime campagne militaire de l'Empereur s'est terminée non loin de Fontainebleau où il passera vingt jours avant de signer son abdication et de partir en exil pour l'ile d'Elbe (20 avril 1814). Lisez la chronique d'Anne Jouffroy sur l'ouvrage de Michel Bernard 1814, La Campagne de France.
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