Nouvelle histoire de l'Indochine française
Parution le 10 mars 2022
448 pages
24 €
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Thème
La France fut présente en Indochine pendant une centaine d’années. C’était la perle de l’Empire, celui qui figurait en rose sur les Atlas des années 1950. Sept ans durant (1947-54), elle y a mené une guerre, prélude à la guerre du Vietnam, dont chacun se plaît aujourd’hui à dénoncer l’inutilité. Tout ceci est aujourd’hui bien oublié ; c’est à l’historien qu’il appartient de tenter de comprendre pourquoi et comment ces évènements sont intervenus et d’en tirer les leçons pour le présent. C’est ce que propose M. François Joyaux, universitaire, en publiant une Nouvelle histoire de l’Indochine française, riche d’enseignements, à plus d’un titre.
Points forts
Cet ouvrage, bien écrit et agréable à lire, propose des lectures de la colonisation et de la décolonisation bien différentes de celles qui aujourd’hui sont couramment admises.
Il souligne d’abord la diversité de l’Indochine française : deux pays sont en effet de culture indienne, le Cambodge et le Laos, le Vietnam, de culture et d’influence chinoise, même s’ils font tous, à des degrés divers, partie du glacis protecteur méridional de l’Empire du Milieu. D’ailleurs, M. Joyaux considère que l’histoire de l’Indochine doit se lire à la lumière de la relation entre la France et la Chine.
La phase de colonisation est bien décrite. Sous l’influence conjuguée de la Marine et de l’Eglise catholique, l’une pour se doter de bases sur la route de la Chine, l’autre pour défendre les missionnaires et les convertis des persécutions du pouvoir impérial annamite, le Second Empire, prudemment, met la main sur le delta du Mékong et sur Saigon. Le relai est pris par le courant Franc maçon et radical (Jules Ferry) au pouvoir des années 1880 à la guerre de 1914 qui offre un protectorat au Tonkin et à l’Annam, puis au Cambodge et aux principautés laotiennes, au nom des grands principes : éducation, progrès, développement… L’auteur note, en opposition avec la vulgate léniniste, que les hommes d’affaires, avides de débouchés économiques, sont arrivés bien après les “civilisateurs“ (Paul Doumer).
L’affaire s’inverse avec la guerre de 1914-18 qui révèle la vulnérabilité des puissances européennes et donne au communisme une base géographique et idéologique en Union Soviétique où seront formés les futurs révolutionnaires vietnamiens, ceux qui opéreront un hold up sur le nationalisme vietnamien, grâce à un “coup d’Etat“ dans la plus pure tradition bolchevique (Ho Chi Minh).
M. Joyaux propose enfin une analyse passionnante de la décolonisation et de la guerre d’Indochine. Il avance ainsi que l’occupation – presque – pacifique de l’Indochine par les Japonais, à partir de 1940, leur a donné, au moment de leur entrée en guerre contre les Etats-Unis, une base idéale pour occuper rapidement l’Asie du Sud Est jusqu’à Singapour et aux Philippines.
Originale aussi est la liaison qu’il opère entre l’évolution de la Chine, devenue communiste en 1949, et la guerre du Vietnam. En aidant l’Indochine à s’émanciper du protectorat français, la Chine reconstitue son glacis protecteur au Sud. Beaucoup d’autres points sont également intéressants : l’idée que la guerre était loin d’être perdue après Diên Biên Phu, que ce sont les politiques qui ont lâché prise, que la négociation de Genève en 1954 fut un succès de Bidault bien plus que de Mendès France, que la Chine aurait bien préféré que la France conservât une influence déterminante au Sud Vietnam pour éviter l’arrivée des Américains, la haine de Ngo Dinh Diem pour la France…
Quelques réserves
La thèse de M. Joyaux a le mérite de la cohérence et de la vraisemblance ; il faut pourtant constater qu’elle est en opposition frontale avec ceux qui considèrent la colonisation comme un “crime contre l’humanité“, et avec le discours officiel sur les guerres du Vietnam, puisqu’il présente la guerre d’Indochine comme un conflit, non de décolonisation, mais d’endiguement du communisme.
Encore un mot...
Comme souvent, l’Histoire renvoie au présent : voici un ouvrage qui donne plusieurs clés pour comprendre la géopolitique actuelle de la Chine en mer de Chine et dans ses rapports avec ses voisins méridionaux.
Une phrase
« A compter du tout début de 1950, le conflit d’Indochine allait changer d’ampleur du fait de la jonction des troupes communistes chinoises avec celles du Viêt Minh à la frontière tonkinoise. » (P. 365)
L'auteur
Grand spécialiste de l’Extrême Orient, François Joyaux est professeur de langues et de civilisations orientales à la Sorbonne et à l’Institut d’Etudes Politiques. Il a publié de très nombreux ouvrages sur la Chine et l’Extrême Orient. Il est par ailleurs spécialiste des roses sur lesquelles il a également publié ainsi que sur la numismatique.
Commentaires
Fille d'un militaire de 1935 à 1954 qui avait combattu pour la France et que le gouvernement français communiste de cette époque nous a bâillonnés. Mon père, ma maman et mes soeurs aînées ont souffert du Nazisme japonais et des Vietminhs jusqu'au au Camboge. Je suis d'accord avec François Joyaux le seul au jour d'aujourd'hui a écrire la Vérité sur les héros oubliés de l'Indochine Française. Donne-t-il des conférences ?
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