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Thème
C’est à 82 ans, soit plus de 50 ans après la disparition de Proust, que finalement celle qu’il appelait affectueusement «ma chère Céleste» se décide à livrer ses souvenirs pour rendre à celui qu’elle a adulé au delà de tout, ce qu’elle estime être sa véritable image trop souvent déformée et malmenée à l'époque.
Proust duquel elle dit: «Si son génie était immense, l’homme l’était tout autant, et le coeur aussi».
Points forts
On découvre, on apprend, et on hallucine aussi.
Les huit dernières années de Proust sont celles d’un homme asthmatique, reclus, écrivant la nuit, dormant le jour, se nourrissant d’un café au lait, d’un croissant, d’une bière. Il a transformé sa vie en rituel: son heure de réveil, la température de l’eau du bain, la bougie brûlant 24h/24 à un endroit bien précis, le déroulement des fumigations quotidiennes, le geste de la main pour remercier ou renvoyer Céleste, les journaux sur son lit, le pli de ses pantalons, son linge de corps chauffé au four dans une serviette, la vingtaine de serviettes utilisées chaque jour pour sa toilette et jetées sur le sol, les piles de mouchoirs fins entassés, à peine effleurés et tout de suite jetés également par terre...
Parfaitement tyrannique et despotique, il lui arrive d'appeler à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit pour qu’on aille déposer un pli, une lettre, ou bien lui chercher une bière fraîche, une glace, dans les cuisines - fermées - du Ritz. Détestant le bruit et la lumière, il ordonne que volets et rideaux soient constamment fermés. Jamais il ne se souciera d’avoir des clefs sur lui; Céleste, corvéable à souhait, est là jour et nuit pour lui ouvrir la porte... Obsessionnel, il interdit qu’on craque une allumette à côté de lui, le souffre pouvant être nocif pour ses muqueuses; mais il proscrit aussi le feu dans la cheminée, les fleurs, les parfums, les fenêtres ouvertes, les plumes des oreillers.Terrorisé par les microbes, il exige que son courrier soit passé dans du formol avant qu’il ne l’ouvre.
La nostalgie du passé est omniprésente dans la vie de celui qui a la sensation d’avoir perdu son Paradis. A la recherche permanente des goûts et des souvenirs de son enfance, il demande à Céleste de cuisiner ce qu’il aime, mais il ne mange rien. Cela n’a pas d’importance, elle continue à acheter, à cuisiner et à jeter.
A travers l’oeil de Céleste, on découvre un Proust totalement obsédé par l’écriture de la fin de son dernier roman. A bout de forces, il s’oblige à honorer ses invitations pour observer, encore et encore, tout et tous afin de nourrir ses personnages.
Nous devenons les témoins de ses rarissimes sorties, détaillées à Céleste à chacun de ses retours, c’est à dire en pleine nuit.
Sa délicatesse, son charme et sa finesse lui autorisaient tous les excès. D'après Céleste, «Il avait la grâce même de ses tyrannies». C’est dire...
Quelques réserves
Les rectifications de Céleste sur certaines rumeurs de l’époque qui ont peu d’intérêt.
Inversement, son adoration sans faille doublée de son aveuglement forcené fait qu’elle en arrive à nier certaines évidences, tels les penchants homosexuels de Marcel Proust et les relations qu’il a pu avoir.
L’édition du livre bourrée de fautes et de coquilles.
Encore un mot...
« Monsieur, vous n’êtes pas seulement un enchanteur, vous êtes un magicien» disait Céleste... Si son témoignage n’est clairement pas très objectif, on reste abasourdi et ému de tant de dévotion...
L'auteur
Gouvernante -et confidente- pendant les huit dernières années de la vie de Marcel Proust, Céleste Albaret a été à ses côtés jours et nuits jusqu’à son dernier souffle, en novembre 1922. Ses propos ont été recueillis par Georges Belmont.
Commentaires
A vous lire, on dirait bien que Céleste a raté sa mission, à savoir rendre l' image la plus juste de Marcel Proust.
"Jamais il ne se souciera d’avoir des clefs sur lui; Céleste, corvéable à souhait" Vous rendez dans votre critique un Marcel aux lubies égoïstes, bourgeoises et étriquées (bien loin du Marcel qu'a connu Céleste), quand il faut à mon sens voir un homme qui a sacrifié toute son existence pour son oeuvre, un homme au coeur immense, d'une finesse et d'un génie sans pareils.
Tout le témoignage de Céleste égrène d'ailleurs la sensibilité de celui-ci "Céleste, vous avez l'air mal", "Céleste, cela ne vous gêne pas?", et vous le faites passer pour un homme qui se moque d'elle, ou encore gaspille de la nourriture alors qu'il ne cherche qu'à survivre à sa maladie pour son oeuvre encore une fois, c'est à dire pour nous, la postérité .
"Monsieur, vous n’êtes pas seulement un enchanteur, vous êtes un magicien» disait Céleste... Si son témoignage n’est clairement pas très objectif" Lisez des morceaux de la Recherche, revoyez s'il n'y a pas là de la magie... Votre critique porte à croire que vous connaissez mal l'écrivain.
Il y a dans ce livre quelque chose d'exceptionnel, il fait approcher la création de Proust d'une manière unique. Alors bien sûr, tous les petits intellos sourient de la candeur de la Céleste, et campent sur leur robuste bon sens: c'est que c'était un tyran, le Marcel ! Et puis c'est pas une bonniche qui va nous en apprendre.
Le livre de Céleste Albaret est intensément humain, et pendant ce temps, la Véronique scrute, compare, juge, et détient la norme.
Que de naïveté... Mais chez Céleste ou Véronique ?
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