Lettres à Anne

Oubliez qu'il s'agit de François Mitterrand...
De
François Mitterrand
Editions Gallimard - 1250 pages
Notre recommandation
5/5

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Thème

L’histoire d’une rencontre, d’une passion, d’un amour total, splendide par son ampleur et sa puissance. Trente-trois années de deux vies avec un seul narrateur, le tout sur 1250 pages retraçant jour après jour l’épopée de l’amour.

Points forts

Dès les premières lettres, tout y est : la puissance du désir, l’émoi des premières rencontres, l’incertitude, la force et la stupeur de voir une passion naître contre vents et marées. Elle voit le jour à Paris autant que sur les bords de la Loire ou dans les forêts du Morvan. La France éternelle qui en est le cadre se parfume d’humus et d’ombre, tandis que les saisons se succèdent dans le tourbillon de deux vies perpétuellement séparées. Pas un temps mort mais au cœur de chacun des amants, cette tension si perceptible, si tangible qu’elle bouleverse le lecteur.

La maîtrise de la langue, la poésie qui s’en dégage a sa source dans le cœur de cet homme amoureux dont on oublie qu’il fut un jour, dans une autre vie, à la tête de l’Etat français. Un homme nu dont on n’en finit pas de fouiller le cœur et les pensées, qu’il soit au volant de sa voiture ou dans les couloirs de l’Assemblée Nationale. Si présent, si extraordinairement humain dans ses exigences comme dans ses renoncements.

En contre-jour, se dessine pour le lecteur une Anne Pingeot de vingt ans, dansant sa vie, droite et aimée, éprise d’absolu comme elle en a le droit et l’âge. 

Tout sonne si magnifiquement juste que les pages ne comptent plus et n’en reste que ce chant somptueux où les mots se font musique et couleurs et revêtent un parfum d’éternité. 

A la veille des fêtes de Noël, pouvait-on souhaiter cadeau plus somptueux que cet hymne à l’amour qui efface doutes et rides du temps ?

Quelques réserves

Un kilo et cinq cents grammes, c’est le poids des Lettres à Anne et, comme on ne quitte pas ce livre sans regret, son transport d’un point à un autre n’est pas chose aisée...

Autre point faible : après une première centaine de pages, les voyages de l’homme politique donnent le tournis comme les allers-retours Château-Chinon-Latché-Hossegor-Paris. Se souvenir qu’ils suivent la trame d’un ambitieux, onze fois ministre sous la IVème république et deux fois Président de la République sous la Vème république de 1981 à 1995.

Encore un mot...

Magistral est le mot qui vient à l'esprit comme une oeuvre totale où rien n'aurait été laissé au hasard. Chacune de ces lettres est une bouteille à la mer qu'il faut saisir, garder, préserver pour en goûter toute la saveur et relire.

L'amour est là, si intensément à portée de nos vies.

Une phrase

- "Je t’aimais sans souvenir et sans histoire. J’étais ce regard brûlé …ô mon inconnue attendue depuis toujours ; tu étais la femme du commencement, force entrée en moi et qui me rendait souverain tout en m’asservissant".

- "L’absence pour ceux qui s’aiment est comme une bête vivante, avec ses colères et ses repos, ses faims et ses angoisses. Tout recommence pour elle chaque jour ; hier et demain sont abolis".

- "T’aimer est la grande aventure d’une vie sur le faîte, d’où l’on aperçoit aussi bien les rivages du passé que ceux de l’avenir. Et je sais, sans nul doute, qu’aucun être au monde n’a été, n’est et ne sera aussi proche de moi….notre accord est un don du ciel dont nous devons nous débrouiller avec les moyens du bord….. nous avons été privés de l’intimité, de la tendresse naturelle du sommeil. Du coup a été coupé le lien très puissant qui réunit le jour au jour et, sans bien le percevoir, nous en avons été déséquilibrés".

L'auteur

Vingt ans ont passé depuis la disparition de François Mitterrand le 8 janvier 1996. Le voici de retour par la volonté d’Anne Pingeot, qui fut l’amour de sa vie.

Commentaires

Anonyme
ven 05/01/2018 - 11:37

magnifique écriture "d'une autre époque" ! J'ai eu par contre, et j'en ai encore un fort sentiment de manipulation intellectuelle .. Cet homme a enlevé à la jeunesse le droit de vivre SA vie. Il l'a modelé à sa manière. Après les 500 pages, jai perdu . le reste de respect que j'ai eu. pour lui.

Thierry
mer 21/11/2018 - 02:16

Le commentaire d'Anonyme est bien étriqué, comparé à l'aventure intellectuelle et amoureuse que fut pour Anne l'échange profond avec un homme supérieur.
D'ailleurs les résistances qu"elle a mises longtemps entre eux avant que de se livrer à leur amour avec certitude prouvent bien , s'il le fallait, qu'elle savait ce qu'elle devrait "sacrifier": beaucoup de futilités, de quêtes hasardeuses, de déceptions médiocres. Choisir tôt une vie d'adulte, ce n'est pas résilier un droit à SA vie. C'est agir selon sa maturité.
Les amours nés de la rencontre entre une jeune femme et un homme mûr peuvent donner les plus magnifiques histoires. Chacun donne à l'autre ce dont il a le plus impérieux besoin.
Cette histoire d'amour est à mon sens la plus belle part de "Francois", qui par ailleurs ne recueuille pas toute mon estime pour ce qu'il eût en lui de roué.

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