Le nègre de Napoléon
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Thème
Né en Martinique en 1767, aux pieds de la montagne Pelée, Joseph Serrant meurt dans l’oubli et dans un relatif dénuement en 1827 à Clermont-Ferrand, sous l’ombre du Puy-de-Dôme. Né métis libre, il est le fils d’une mulâtresse et d’un riche colon blanc ; pour l’administration, il est « juridiquement noir », c’est ce qu’on appelait sous l’Ancien Régime un « libre de couleur ».
Cet enfant qui était destiné à être cordonnier va connaître l’engagement volontaire comme simple soldat dans les armées du roi alors qu’il a à peine seize ans, puis l’exaltation révolutionnaire dans une île déchirée entre des factions brutalement antagonistes.
Initié à la franc-maçonnerie, gagné aux idéaux de la Révolution, intelligent et bon soldat, Joseph monte en grade rapidement. La Révolution l’envoie lutter contre les Chouans en Normandie puis en Suisse et en Italie. Surviennent alors Bonaparte et l’Empire. Joseph Serrant est promu colonel dans les Balkans; et toujours plus loin, à l’Est, avec la Grande Armée, il deviendra général, jusqu’à la terrible retraite de Russie et le retour de la royauté qui sonne le glas d’un destin hors norme.
Points forts
Le travail de recherche et d’utilisation des sources semble très sérieux. Roland Chabaud a littéralement décortiqué les notes qu’a pu laisser Joseph Serrant pour en constituer le fil conducteur de son livre. Nous avons presque à faire à un travail de chroniqueur – au sens historique du terme – tant on suit pas à pas, avec une minutie chronologique limpide, Joseph Serrant dans un commentaire de sa vie par lui-même, éclairé par l’explication et la remise en contexte de Raymond Chabaud. C’est adroit et précis!
Quelques réserves
Peut-être aurait on aimé plus de densité, plus de précisions – bien qu’il y en ait déjà beaucoup, on ne peut l’enlever à l’auteur. Le piège aurait alors été de tomber dans un remplissage style « précis d’histoire de France », mais cet écueil à été évité.
La vie de Joseph Serrant est un sujet de roman. On en viendrait presque à regretter quelque chose de l’ordre du romanesque dans ce livre – une pointe de lyrisme, un peu plus de souffle – tant la vie du « nègre de Napoléon » se prête à l’exercice, mais ce n’est pas là, bien évidemment, le but du travail historique, dommage …
Encore un mot...
Le nègre de Napoléon est un livre surprenant. Il sort de l’oubli un personnage à la trajectoire unique, traversant une des pages les plus mouvementées de l’histoire de France, des Antilles à la métropole en passant par toute l’Europe. Fascinant destin que celui de ce colonel Chabert antillais!
Une phrase
« [Napoléon] : ‘’ Voilà longtemps que tu te bats, Serrant. Je te fais baron de l’Empire. ‘’ J’étais bouleversé. Général, Baron, je ne pouvais désirer rien de plus. Que la guerre dure encore, et je serais maréchal. Cet homme savait parler : je ne sentais plus mes blessures. Je ne pouvais même pas réaliser que j’étais fait baron d’un Empire qui croulait. »
L'auteur
Né en 1950, Raymond Chabaud a été tour à tour libraire, journaliste et éditeur. Docteur ès-lettres, ancien élève de Roland Barthes et disciple de Pierre Gentelle, l’essentiel de ses livres tourne autour de l’idée de territoire.
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