Le goût de la politique. Un observateur passionné de la Vè République
Parution le 6 mars 2024
256 pages
22,90 €
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Thème
C’est à un véritable patchwork que nous convie Pascal Perrineau, l’un des politologues les plus avertis du paysage français. Dans ce qui est à la fois recueil de souvenirs, mémoires, analyse politique et constitutionnelle, l’auteur retrace sa vie, sans épargner les détails, même les plus personnels, comme la psychanalyse qu’il dit avoir suivie autour de l’an 2000.
Points forts
C’est évidemment les considérations sur la vie politique française qui sont l’élément marquant de l’ouvrage. Perrineau s’est intéressé depuis bien longtemps au Front, puis au Rassemblement National, dont il a souligné l’importance avant que le populisme ne prenne l’ampleur qu’il connaît aujourd’hui. Il identifie six facteurs essentiels de la poussée de ce parti; il en décrit l’électorat composite et montre comment dans des zones où il n’avait aucune implantation, il a engrangé graduellement des succès notables. Sans se prononcer sur sa capacité à dépasser le fameux plafond de verre qui empêche sa candidate d’emporter l’élection présidentielle, il suppute les chances qu’aurait ce parti, une fois installé à l’Elysée, d’atténuer les aspects les plus saillants de son programme.
Il partage avec Jérôme Fourquet l’idée que le clivage traditionnel gauche-droite est devenu obsolète et que la véritable opposition passe désormais entre le souverainisme, repli identitaire, et l’ouverture sur le monde. Il dessine les contours d’une nouvelle démocratie, plus participative, où les pouvoirs du Président de la République seraient limités, au profit du Parlement.
Perrineau enveloppe toutes ces analyses techniques dans la présentation de sa vie, depuis sa naissance en Moselle jusqu’à sa retraite de Sciences Po. Sa formation intellectuelle doit beaucoup au gaullisme de son père et au patriotisme de sa mère qui connut les horreurs de l’occupation allemande dans ce département annexé par le Reich au mépris de la convention d’armistice de 1940. Étudiant sage, effaré par le gauchisme ambiant des années 1970, il borne son rejet du monde capitaliste à une adhésion au parti socialiste. Il le quittera après avoir compris en 1981, les dégâts que le mitterrandisme était en train d’infliger à l’économie française.
Quelques réserves
On peut se demander quel est le public que vise Perrineau avec cet ouvrage. Si ce sont des mémoires ou une autobiographie, genre à la mode, le lecteur peut n’être pas passionné, d’autant que - n’est pas Saint-Simon qui veut - le style ne retient pas plus l’attention que le fond du récit. La candeur du personnage contraste avec le monde chaotique qu’il lui revient d’étudier; et puis cette manie de citer des litanies de personnes avec qui il a travaillé, totalement inconnues du lecteur…
Si, en revanche, il s’agit d’un ouvrage technique d’analyse politique, le lecteur reste un peu sur sa faim, en espérant que l’auteur fournisse des clés de lecture du monde politique plus fines ou moins convenues que celles qu’il expose dans cet ouvrage, forcément succinct.
Encore un mot...
Un livre qui ne tient pas ses promesses: voici un des meilleurs spécialistes de la science politique en France, observateur de longue date de notre démocratie qui raconte sa vie d’élève à Tours, d’enseignant à Paris, puis à Grenoble, puis à Tours, de chercheur… alors que le lecteur attend des analyses fines sur la politique française, sur l’avenir du pays, de la démocratie, voire des anecdotes sur le sujet.
Une phrase
« Enfin, dernier détour, celui de l’écriture à la première personne. J’ai attendu d’avoir 72 ans pour m’autoriser ce type d’écriture. À la fois, je n’osais pas mettre en avant mon regard, mes sentiments, mon interprétation du monde qui m’entoure, mais aussi la discipline intellectuelle des sciences sociales m’avait convaincu de mettre à distance tous ces filtres personnels qualifiés de “ prénotions”.» Page 246
L'auteur
Bien connu des médias, Pascal Perrineau était le directeur du CEVIPOF, le centre d‘études sur la vie politique française qui fait partie de Sciences Po. C’est un spécialiste de sociologie électorale et un politologue très respecté. Il a publié, souvent en collaboration, des ouvrages sur la matière dont il est spécialiste, avec une prédilection pour l’analyse de l’extrême droite.
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