Le financement de la santé
3è Trim-2021
285 pages
32 €
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Thème
Si la plupart des pays partagent les mêmes problèmes en matière de politique de santé, et singulièrement pour les soins médicaux, ils s’inspirent paradoxalement rarement des exemples étrangers. L’ignorance sert le plus souvent de repoussoir au développement de synergies planétaires. Aussi en réponse à cette lacune, le premier article de ce brillant nouveau collectif réunissant une dizaine de contributeurs experts de leurs domaines, dirigé par Jean de Kervasdoué, propose de découvrir les réformes des systèmes de santé de douze pays, proches ou très éloignés de la francophonie : Apparaissent ainsi, l’importance du temps ( toujours sous - estimé), et le fossé abyssal qui sépare les discours des réalisations effectives face à l’ objectif « d’une santé axée sur le consommateur.. »
La profonde confusion qui règne entre « assurance sociale » et assurance « médicale » est éclairée par un article qui permet à la fois de souligner les contours de ce débat idéologique et de montrer qu’aux USA la solidarité est bien plus présente qu’on ne le croit (les dépenses publiques sociales de soins médicaux approchant comme en France les 8% du Pib).
Il revient à Jean de Kervasdoué de rappeler les défis de notre système universel d’assurance maladie. Ils tiennent largement à des raisons éthiques et économiques portant de facto une inadaptation par les mécanismes de marché de l’offre à la demande de soins (potentiellement infinie). Contrairement au Royaume Uni, la France a « le rationnement honteux » si bien que la régulation est souvent brutale et que, périodiquement, le système explose ; des signes annonciateurs de ce risque deviennent criants aujourd’hui.
De son côté, Rémi Pellet plaide pour une budgétisation de l’assurance maladie qui permettrait de mettre fin à « l’hypocrisie de l’ONDAM » (objectif national des dépenses d’assurance maladie) qui ne peut rester qu’un « objectif », puisque que les cotisations ouvrent des droits aux prestations sans pouvoir préjuger de la manière dont ils seront exercés… »
Sont aussi successivement traités dans deux articles, le très sensible sujet du devenir des assurances complémentaires santé, « une spécificité française », créant « des géants économiques mais restant des nains politiques ». L’assurance maladie a privé progressivement leur rôle effectif dans la régulation des soins médicaux et de leur accès aux données de santé de leurs assurés. Les auteurs analysent finement les éventuelles futures (et funestes ? ) conséquences d’une fusion avec l’assurance maladie pour réaliser une « .. grande Sécu ».
Points forts
Le déclassement de la recherche biomédicale française, passant du 5e au 9e rang mondial, est analysé, montrant que les signes de cette déliquescence s’accélèrent touchant à la baisse des investissements matériels et humains alors même que la concurrence internationale s’accentue : « en France on finance trop les projets et pas assez les équipes »
Le thème majeur de toutes les déclarations ministérielles et des lois « santé », la prévention, souffre, rapportent les auteurs dans un double article incisif, d’une analyse insuffisamment rationnelle et d’une évaluation des mesures mises en œuvre rarement suffisante.
Sont aussi passées en revue dans des contributions particulièrement stimulantes, certaines interrogations sur le système de facturation globale « à la pathologie » et sur le sujet austère mais essentiel de la comptabilité pour la gestion des hôpitaux publics.
Quelques réserves
Si le sujet est totalement d’actualité, il nécessite tout de même d’être à l’aise avec les questions de gestion et de finances et leur vocabulaire.
Encore un mot...
Le grand mérite de cette nouvelle parution de la REF tient non seulement à ces regards croisés des contributeurs experts auxquels la REF nous a par bonheur habitués, mais aussi en permettant à chacun de mieux mesurer les grands avantages et les ( petits ?) inconvénients du système de santé de notre pays à l'aune des pratiques, des systèmes de financement et des cultures différentes qui en particulier peuvent attacher des prix différents de celui que nous portons dans un domaine qui n’ est pas que philosophique, qui est tout simplement celui de la vie.
Une phrase
.Joseph White s’interroge pour sa part sur l’apport clinique réel de l’ informatique : « l’informatique est une drogue attirante pour tous sauf pour les patients et les professionnels de santé ». Son utilisation reste un « joyeux bazar » qui sert de prétexte pour transférer de plus en plus aux médecins des tâches administratives !
L’industrie pharmaceutique fait l’objet d’un développement soulignant les caractéristiques de sa régulation et de celles de la fixation des « prix » des médicaments mis sur le marché :
La logique mondiale paraissant émerger consistant à prendre en compte la capacité du financeur à payer (en France l’ assurance maladie) plus qu’une prise en priorité du « prix de revient » de leurs molécules et de leurs recherches. Ces pratiques percutent fortement les autres références utilisées par ailleurs : c’est ainsi qu’en France on compare les bénéfices cliniques du nouveau produit aux autres existants, tandis qu’en Angleterre on est beaucoup plus utilitariste (on chiffre le coût du traitement par année de vie gagnée et il n’est pas prescrit s’il dépasse 80 000livres !) tandis que pour l’OMS la référence au juste prix repose tout primitivement sur le revenu par habitant..
L'auteur
Sous la direction de Jean de Kervasdoué , professeur émérite au CNAM, membre de l’Académie des technologies, chroniqueur au magazine Le Point.
De Jean de Kervasdoué, on peut lire également :
Ils croient que la nature est bonne, dont le sous-titre laisse entendre le ton :” Ecologie, agriculture, alimentation, pour arrêter de dire n’importe quoi et de croire n’importe qui”
Ils ont perdu la raison, sous-titré : “pourquoi les politiques prennent les mauvaises décisions”
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