Le chaos climatique n'est pas une fatalité

Plaidoyer pour la reforestation de la planète !
De
Jean-François Rial et Matthieu Belloir
Préface de François Gemenne, coauteur du 6ème rapport du GIEC
L'Archipel
Parution en février 2025
155 pages
17,9 €
Notre recommandation
3/5

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Thème

La trajectoire de maintien d'un réchauffement climatique dû aux activités humaines, à +2 degrés d'ici 2050 est-elle réaliste ? C'est la question que posent les auteurs de cet essai, l'un PDG du groupe de tourisme Voyageurs du monde, l'autre conseil dans le domaine de la Responsabilité Sociale et Sociétale des Entreprises. 

Si l'on tient compte de la résistance des opinions occidentales aux concepts de décroissance et d'écologie punitive, si l'on ne peut que respecter le besoin de vie meilleure des pays émergents, ils concèdent qu'il y a peu de chances que l'objectif soit atteint. Alors que faire ? Gagner du temps est leur réponse, et ils proposent comment ! Si les chantiers sont considérables, et les auteurs ne les contestent pas, alors, il faut chercher à ralentir le changement climatique par une initiative aussi colossale que simple : planter des arbres ! Ils sont en effet des "puits de carbone", puisque la photosynthèse se fait par absorption du gaz carbonique de l'air par les feuilles et les racines.

Les conditions de réussite d'un tel défi : planter 18 milliards d'arbres pendant 10 ans - pour faire "baisser d'un tiers l'effort de baisse des émissions de CO²", un moyen de gagner du temps pour laisser à nos sociétés et nos technologies le temps de changer de paradigme de croissance. A l'appui de cette démonstration, ils proposent deux exemples d'application : un transport aérien soulagé d'une partie de sa consommation de combustibles fossiles et l'agriculture intensive, challengée par le maraîchage “bio-intensif".

Points forts

L'originalité de la proposition, dans ses aspects de contribution au ralentissement du réchauffement climatique et dans la proposition elle-même - planter 180 milliards d'arbres dans le monde - constituent les points forts de cet essai. 

Les auteurs, avec un certain bon sens, en pèsent le pour et le contre, les aspects financiers, pratiques, l'effectivité de la mesure dans le temps (un arbre fraîchement planté n'absorbe pas la même quantité de gaz carbonique qu'un arbre à maturité), les efforts déjà fournis par les Etats (Canada, Finlande, France…) et les politiques de décarbonation des entreprises qu'il est intéressant de "survoler", Microsoft, Amazon, le moteur de recherche Ecosia, Unilever, Volkswagen, total Energie ou encore l'Oréal - dont acte !

Intéressantes également les réflexions et solutions prospectives pour rendre plus sobre le transport aérien. Une réponse subliminale au Shift project de Jean Claude Jancovici (un think tank créé en 2010) qui, entre autres réflexions, propose une réduction du vol aérien, à terme, à 4 vols par personne et par vie. Sans aller jusque là, les solutions exposées sont intéressantes.

Le débat entre agriculture intensive et maraîchage “bio-intensif" constitue le dernier chapitre. Ce point est très instructif pour les citadins, quant à l'explication de la chimie des sols comme argument contre les labours profonds, à la rotation des cultures sur les petites parcelles et la préservation des équilibres "naturels" pour lutter contre maladies et intrants, en lieu et  place des pesticides.

A noter d'utiles tableaux de synthèses à la fin des trois grands chapitres. Celui présenté en extrait ci-dessous synthétise la thèse des auteurs.

Quelques réserves

Cet essai original suscite cependant quelques réserves : beaucoup de chiffres, parfois, inaccessibles pour les non initiés, parfois corrompus par de probables coquilles ou des équivalences dont on ne comprend pas la pertinence, et beaucoup de redites. 

La seconde réserve concerne l'objectivité des auteurs. Sans que cela ne retire rien à ses mérites et à ses engagements, Jean François Rial est l'actuel PDG de Voyageurs du monde, et fondateur de la ferme du Perche, support de son exemple sur les vertus de l'agriculture bio-intensive. Il est clair que ses activités sont challengées par les menaces sur le transport aérien et les déséquilibres réglementaires entre le soutien de la Politique Agricole Commune aux agriculteurs conventionnels alors que le modèle qu'il défend (sans doute avec raison), ne bénéficie d'aucune aide publique. Sachant que la société Voyageurs du monde intègre dans ses tarifs des projets de reforestation gérés par un fonds de dotation partenaire, vous pourrez,

Encore un mot...

Si l'idée positive exposée dans Le chaos climatique n'est pas une fatalité, mérite intérêt et réflexion, la démonstration ne m'a pas parue si évidente, dans la forme et dans le fond. J'ai apprécié l'observation à 360 degrés, l'analyse du pour et du contre ; et moins apprécié les calculs, mais il en fallait. L'impression "d'angélisme" macro-économique n'est pas une vérité définitive, car comme l'a dit Coco Chanel probablement inspirée par Martin Luther King, "pour réaliser de grandes choses, il faut d'abord rêver". Un des mérites de l'ouvrage, outre un plaidoyer pour la reforestation de la planète, demeure de proposer non des mesures radicales mais des mesures qui visent à ralentir le processus de réchauffement climatique ; un chemin simple et populaire pour donner à l'intelligence humaine le temps de trouver des solutions durables. Sur ce point, Jean-François Rial et Matthieu Belloir font preuve de pragmatisme et d'une certaine sagesse.

Une phrase

" À partir de 2025,

  • si on plantait 180 milliards d'arbres,

  • soit 18 milliards d'arbres par an pendant dix ans,

  • pour un montant de 540 milliards de dollars,

  • on capterait 150 Gigatonnes de CO2 additionnelles.

  • Cette vaste opération mondiale permettrait de diminuer d'un tiers l'effort de baisse des émissions de CO, proposé par le scénario 2°C dans la période 2025-2050.

  • Le temps ainsi gagné sera mis à profit pour adopter progressivement de nouveaux modes de vie et de consommation plus sobres en énergie, bénéficier des progrès technologiques qui permettront d'émettre moins de CO, grâce au développement des énergies non fossiles, et enfin stocker davantage de carbone grâce à la captation technologique.

  • Entre 2050 et 2055, nous faisons le pari qu'il deviendra possible de réduire davantage nos émissions pour rattraper la trajectoire finale calculée par le GIEC et parvenir, comme prévu, à la neutralité carbone en 2075.

  • Entre 2055 et 2075, nous nous réalignons sur les trajectoires de baisse modérée des émissions du scénario 2 °C du GIEC." P 74

L'auteur

- PDG du groupe Voyageurs du monde - entreprise d'organisation de voyages "sur mesure, culturels, écologiques et philanthropiques"- président du Refettorio Paris (restaurant solidaire destiné aux sans-abris et aux réfugiés), Jean-François Rial est un dirigeant engagé. Il est particulièrement investi dans les causes humanitaires et écologiques, en lien avec sa conception d'un partage des cultures et de l'émergence d'un tourisme durable et responsable. Il s'est lancé avec son fils dans un projet de maraîchage biologique : la Ferme du Perche. Elle est un lieu de production de fruits et légumes et de formation pour promouvoir le concept de maraîchage bio-intensif, issu des recherches de l'agriculteur et écrivain québécois, Jean-Martin Fortier.

- Docteur en communication, diplômé en droit social et médiateur inter-entreprises, Matthieu Belloir dirige un cabinet de conseil en RSE et communication. Il a été directeur de la RSE du groupe Orange et vice-président du Fonds de dotation « Entrepreneurs pour le climat ».

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