LA RELIGION FRANCAISE
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Thème
Partant de la question de la laïcité qui agite périodiquement le monde politico-médiatique, l’auteur revisite l’histoire des rapports entre la religion et l’Etat en France. Il s’efforce de démontrer que de Hugues Capet à la IIIème République, l’Etat s’est construit en prenant progressivement son autonomie vis à vis de la papauté, quitte à en utiliser les méthodes, comme l’édification d’une cléricature laïque, ou à en singer les rites, comme après la loi de séparation de 1905 qui visait plus à pacifier la relation entre l’Eglise et l’Etat qu’à envenimer une situation déjà délétère. De fait, l’Eglise s’est recentrée sur les âmes et a laissé au “César“ républicain ce qui lui restait de pouvoir temporel.
Points forts
- Etymologiquement, la religion, c’est ce qui unit. Les romains ont persécuté les Chrétiens parce qu’ils refusaient de rendre un culte aux dieux de la cité, s’affichant ainsi au ban de la communauté dans laquelle ils vivaient. Par analogie, la “religion française“ constitue le principe actif de la nation française et Colosimo montre comment ce principe a fonctionné à travers les âges. Soustrayant le pouvoir royal à l’autorité de Rome, il a permis la construction de la France contre l’Empereur et contre le Pape.
- Grâce à sa prodigieuse érudition, l’auteur, à la fois historien et théologien, offre un panorama original de l’Histoire de France et esquisse des rapprochements vertigineux qui défient la chronologie en soulignant la permanence de cette religion française sur les dix derniers siècles. L’analyse est d’autant plus fertile pour le lecteur contemporain que, vivant dans un monde déchristianisé, il peine à comprendre l’importance capitale des phénomènes religieux jusqu’à l’orée du XXème siècle. Colosimo explique et décrypte : les légistes de Philippe le Bel, la révocation de l’édit de Nantes, le Concordat, la séparation de l’Eglise et de l’Etat…
Quelques réserves
Comme toute thèse originale en sciences humaines, le point de vue de l’auteur peut être contesté.
Mais c’est le style qui pêche souvent chez Colosimo et rend la lecture de l’ouvrage difficile. Certes l’écriture a du souffle, voire parfois un certain lyrisme; à cet égard le premiers chapitres, consacrés à sa ville natale d’Avignon, sont attachants. Malheureusement, à force de recherche, les phrases sont souvent obscures et requièrent du lecteur un effort constant pour saisir la pensée de l’auteur. “D’amour, belle marquise vos yeux beaux mourir me font“…
Encore un mot...
Une œuvre aussi riche que foisonnante d’idées qui offre une grille de lecture originale de l’histoire de la France et de la construction de son Etat, malheureusement altérée par une écriture qui gagnerait à un plus grand dépouillement.
Une phrase
Page 359: « …l’on dira qu’en France, l’appréhension du fait religieux dans son intrication innée avec le fait politique, la perception de la nécessité à devoir démêler les deux, la conviction quant à l’impératif de les ordonner et les restituer chacun à sa sphère, a constitué le laboratoire de la nation qui en est ressortie le plus grand bien commun dans l‘épaisseur temporelle parce que gage à la fois de limitation et d’indépendance, et a suscité une longue recherche expérimentale sur la nationalisation des croyances afin qu’elles ne deviennent par ferment d’hostilité ou force de sédition à l’intérieur, vicaire d’une puissance étrangère et vecteur d’un ennemi posté à l’extérieur. »
L'auteur
Jean-François Colosimo est un personnage à multiples facettes. Il est historien, philosophe, théologien et exerce le métier d’éditeur ; il dirige depuis 2013 les éditions du Cerf. Il a publié de nombreux ouvrages et, ce qui n’est pas neutre eu égard à l’ouvrage sous revue, il est chrétien orthodoxe.
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