La beauté et la grâce. Itinéraire d’un aristocrate européen, Alex Rzewuski
480 p.
25 €
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Thème
Aristocrate russo-polonais à la trajectoire à nulle autre pareille, Alex-Ceslas Rzewuski (1893-1983) voit le jour alors que l’empire des Romanov jette ses derniers feux. La révolution bolchévique pousse ce jeune homme à la fibre artistique, habitué à la vie de cour et aux fastes, à fuir l’Est de l’Europe pour Paris où il n’arrive qu’avec « quelques billets de mille francs en poche » lors de l’année 1919. Porteur d’un des plus illustres noms de la noblesse polonaise, habité par la passion des arts, ce grand dandy d’1m90 va, par son entregent et son talent, mettre le tout Paris à ses pieds en quelques années, lorsqu’il devient un illustrateur et un portraitiste de renom, que s’arrachent magazines, courtisanes et grands de ce monde. Sa fortune est (re)faite et sa réputation dépasse rapidement les frontières de la France. C’est bientôt Londres et les Etats-Unis qui s’accapareront cet artiste dont certains diront alors qu’il est le plus coté au monde.
Mais, cependant qu’il semble être au sommet de sa gloire et de ce que la Fortune peut apporter, Rzewuski décide brutalement, à la faveur d’une rencontre avec le philosophe chrétien Jacques Maritain, de changer d’existence et d’épouser un Ordre “mendiant”, celui des Dominicains.
Points forts
En peignant le portrait de cet aristocrate singulier, c’est toute une époque que réussit à faire rejaillir, par bribes et non sans une certaine émotion, David Gaillardon manifestement fin connaisseur d’une aristocratie européenne, celle de la Mitteleuropa, aujourd’hui disparue.
La vie de Rzewuski permet au lecteur de pénétrer dans les couloirs du temps : d’abord en une Russie impériale qui connaît les influences du spiritisme et s’apprête à sombrer, en passant par l’Europe de la Belle Epoque, Venise et les palais romains dignes des romans de Lampedusa puis par les Etats-Unis des Années folles ; c’est le crépuscule d’une certaine Europe que Rzewuski caresse du regard et qui est la toile de fond de l’aventure inclassable qui forme sa vie de jeune homme.
Nous croisons dans ce récit, comme autrefois le grand monde se croisait dans les salons, Félix Youssoupoff, Liane de Pougy, Coco Chanel, Boni de Castellane et toute une constellation de princesses et de grands ducs au sein de ce Paris qui est encore une fête. L’index de 500 noms est particulièrement bienvenu.
Cette biographie emmène également le lecteur dans un aventure spirituelle, celle d’un homme qui, fidèle à son extravagance, affirme qu’il part pour les Etats-Unis et se volatilise dans la nature pour se faire dominicain en Provence. Occasion pour David Gaillardon de rappeler l’influence de quelques grandes figures, notamment celle de Jacques Maritain (1882-1973).
Quelques réserves
Le lecteur pourrait être dérouté par le changement de « rythme » qui augure dans le récit la nouvelle existence du dominicain Rzewuski, mais il ne faut pas s’y tromper : si le protagoniste est loin de sa vie de sybarite d’antan, son quotidien n’en connaît pas moins nombre de soubresauts et autres péripéties qui le relient à ses anciennes amitiés.
Encore un mot...
L’émotion qui se dégage de cet ouvrage parvient naturellement au lecteur, au fil des pages, naviguant entre un sentiment qu’on pourrait situer entre la nostalgie et la curiosité d’une époque où des destinées -à peine imaginables aujourd’hui- ont bel et bien existé. Aussi, le souci de la recherche et du détail avec lequel l’auteur a exhumé ses sources, renforce la biographie de l’étonnant Alex-Ceslas Rzewuski, au point que, parfois, on se surprendrait à lire un roman historique remarquablement documenté.
Une phrase
« Il était beau, jeune, intelligent, fin, bien né ; il avait son art. Il a tout déposé aux pieds de Dieu. Il est devenu, comme il dit, un mendiant. Mendiant magnifique qui donne toujours mille fois plus qu’il ne reçoit » (selon Liane de Pougy)
L'auteur
Journaliste féru de l’histoire européenne des XIXe et XX siècles, David Gaillardon est l’auteur d’une quinzaine d’ouvrages notamment, deux ouvrages consacrés aux langues régionales : Le parler du Bourbonnais et Le parler du Berry (avec Marcel Bonin, éd. Bonneton) ; plusieurs recueils de nouvelles dont La nuit de Blankenfeld et Au Caffè Dinelli (Via Romana).
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