Homo Deus

Impressionnant, mais, mais...
De
Yuval Noah Harari
Editions Albin Michel - 456 pages
Notre recommandation
3/5

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Thème

Dans les pas de "Sapiens" publié en France en 2015, Homo Deus expose l'être humain sur la dernière marche de l'évolution. Et il pourrait bien en tomber ! Depuis plus de 50 ans, le développement et l'usage des algorithmes informatiques modifient profondément nos sociétés au point de questionner sur le devenir de l'humanisme et du libéralisme. Comment vont-ils résister à l'invasion du Big Data ? 

Dans une large fresque historique, le Pr Harari nous invite à comprendre les lois qui ont régi la vie en société, leur construction et leur déconstruction, comme une mise en garde contre le risque que fait peser sur notre avenir le développement exponentiel, et potentiellement incontrôlé, de l'intelligence artificielle. 

A l'image des animaux domestiqués et sur exploités dans notre ère moderne, le genre "homo sapiens" n'est-il pas condamné à une existence accessoire et contrainte, dominé par une intelligence contre laquelle il ne peut rivaliser. Face au "techno- libéralisme" et au "dataïsme", l'homme perd son caractère "in - divisible" pour ne devenir qu'un moyen au service du partage de l'information - religion suprême dont ce livre dénonce les risques. 

Points forts

- Pour comprendre l'avenir que dessine le progrès des nouvelles technologies de l'information, Yuval Noah Harari nous invite à réfléchir sur ce qui a fait "sens" dans notre histoire pour nous conduire à notre état de civilisation. 
Parmi d'autres analyses, il constate que les religions monothéistes ne sont plus des forces de progrès mais des forces de réaction aux progrès du monde. Quels seront alors les valeurs et défis d'un 21ème siècle "débarrassé des famines, des guerres et des épidémies" ? Arguments à l'appui, il expose la quête d'une nouvelle spiritualité pour hisser l'homme au niveau de Dieu - mais pas le Dieu de la Bible ou du Coran, mais Dieu de l'Olympe, démiurge "aux supers-pouvoirs" de l'ère nouvelle du web omniscient et de l'intelligence artificielle.

- Coopération, écriture, capacité à adhérer à des "réalités intersubjectives", ce livre propose beaucoup d'analyses intéressantes, (dont certaines pourront choquer) sur les mécanismes qui construisent religions et sociétés, et  ont conduit à la prééminence de l'homo sapiens sur le monde vivant. Sur ces bases conceptuelles et par analogie, il nous invite à envisager les conséquences actuelles du culte des "data", de l'internet, de l'interconnexion des données sur notre modèle humaniste et libéral. 

- Malgré la gravité du propos, ce livre conserve une qualité didactique et un humour provocateur, servis par des titres (une brève histoire des pelouses, la vie déprimante des rats de laboratoires…) et des formules bien pensées.

Quelques réserves

- A la différence de Sapiens, les démonstrations d'Homo Deus portent  en elles un certain nombre de ses partis pris. Bien que très argumentés, les développements sur l'identité animale, la quête du bonheur, le rôle de l'histoire, le libre arbitre, le moi… m'ont semblé longs et parfois ennuyeux. Et parfois cousus de fil blanc comme la négation de l'identité animale et son exploitation intensive, analogies possibles à la menace d'asservissement et d'exploitation que fait peser l'intelligence artificielle sur l'humanité au cours du 21ème siècle.

- Ce livre met Dieu en mauvaise posture. La démonstration qui est faite de la construction des monothéismes ou de l'animisme peut paraitre sans concession, réduisant toute transcendance à une réaction biochimique ou à un des algorithmes qui déterminent les lois du vivant. Si ces développements peuvent choquer plus d'un, ils méritent d'être lus pour l'indépendance d'esprit - qui n'est pas un manque de respect - dont ils témoignent.

Encore un mot...

Harari nous annonce qu'Homo Deus est le nouveau démiurge que les GAFA (Google, Amazon, Facebook, Apple) nous préparent. Concepteurs sans état d'âme - si nous n'y prenons garde -d'un monde singulièrement inégalitaire, ils aboliront sans qu'on s'en rende compte le libéralisme, sanctifieront les riches, immortels aux corps augmentés,  pilotes d'une gouvernance planétaire orchestrée par des algorithmes qui connaitront mieux nos désirs et nos failles que le meilleur de nos psychiatres. 

Bref, pas gai ! Dans ce livre, l'humain et le divin y sont désenchantés au regard de l'intelligence artificielle, nouveau dictateur des flux de données. 

Pour autant, ce livre est d'une grande utilité si on le prend pour ce qu'il est  : une aide à la réflexion proposée par un chercheur indépendant d'esprit et for peu adepte des raisonnements conformistes. Si "Homo Deus" n'a pas la force didactique de Sapiens, à l'époque des lanceurs d'alertes, son pessimisme visionnaire ne peut être que salutaire.

Une phrase

- "Au cours de la révolution scientifique, l'homme réduisit aussi les dieux au silence. … L'humanité se retrouva seule sur une scène vide, à soliloquer, ne négociant avec personne et acquérant d'immenses pouvoirs sans la moindre obligation en retour. Ayant déchiffré les lois muettes de la physique, de la chimie et de la biologie, elle les utilise désormais à sa guise." P 111

- "… D’où pensez vous que viendront les grands changements du XXI ème siècle : de l’État Islamique ou de Google ? ... Des milliards de gens, dont beaucoup d'hommes de science, continuent à utiliser les écritures religieuses comme une source d'autorité, mais ces textes ne sont plus source de créativité.". P 299

- "… la Silicon Valley. C'est là que les gourous de la high-tech nous concoctent les meilleures des religions, qui n'ont pas grand-chose à voir avec Dieu, et tout avec la technologie. Elles promettent toutes les anciennes récompenses - bonheur, paix, prospérité et même vie éternelle - mais ici et maintenant, avec le secours de la technologie, plutôt qu'après la mort, avec le concours d'êtres célestes." P 377

L'auteur

Docteur en Histoire, diplômé d'Oxford, Yuval Noah Harari balaie l'histoire d'un œil singulièrement transversal et novateur. Professeur à l'Université hébraïque de Jérusalem, son cours sur "une brève histoire de l'humanité" est suivi, en ligne, par plus de 100.000 personnes. Il a publié en hébreux en 2011, le fameux "Sapiens", livré en Français en octobre 2015. Publié en 30 langues, c'est un best seller planétaire. Homo Deus est son second grand ouvrage de vulgarisation, dont les éditions en hébreux et en anglais ont été achevées en 2015 et 2016.
Si affinité, voir la chronique de Sapiens sur Culture-Tops : http://www.culture-tops.fr/critique-evenement/livres/sapiens-une-breve-histoire-de-lhumanite#.WdIC4dFpyUk

Commentaires

ahmed
mar 20/02/2018 - 13:08

bonjour
je suis tres interessé par les idées de ce livre mais aparament il est pas disponible en algerie je l'ai pas trouvé .
esperant que sa va aboutir a la fin a une bonne conclusion
j'aimerais le lire parceque il est intriguant pour moi
merci de votre travail perpetuel pour le monde de la litterature
cordialement

Nicolas
dim 29/07/2018 - 02:45

Une critique subjective ne saurait refléter l'expérience qu'aurait un autre lecteur. Peut être que moi je trouverais ça cool d'apprendre le point de vue de l'auteur sur la sensibilité animale, la quête du bonheur, et peut-être que ça ne me dérangerait pas de lire que la religion est une fiction intersubjective.

Michel THYS
lun 20/08/2018 - 20:49

Je n'ai lu que les commentaires sur "Sapiens" et "Homo deus" (ouvrages que je lirai sans plus tarder !), et bien que n'étant pas neurophysiologiste, je constate que Harari n'y fait apparemment aucune mention des observations de la psycho-neuro-physiologie relatives à l'origine de la foi et à sa fréquente persistance dans les neurones des amygdales du cerveau émotionnel, puis rationnel, à la suite d'une imprégnation inconsciente et le plus souvent indélébile des influences religieuses précoces. Cela expliquerait que même des scientifiques croyants ou déistes, aussi éminents soient-ils, le sont restés parce qu'ils n'ont "pas compris le fonctionnement de leur cerveau", comme suggérait le neurobiologiste Henri Laborit ?
J'ai émis à ce sujet, dans mon modeste blog, quelques hypothèses explicatives, lisibles ici :
http://originedelafoi.eklablog.com/-a126973612

Bertrand Gournay
jeu 29/11/2018 - 21:55

L'auteur de Sapiens et Homo Deus rejette en bloc les religions, c'est clair. Que les croyants en Dieu demeurent croyants, dans la condition qu'ils ne fassent pas de leurs convictions une idéologie totalitaire, ne semble pas déranger le Pr Harari : "Elles sont nécessaires pour donner du sens", explique-t-il. Ayant lu l'un à la suite de l'autre ses deux études, plus de 900 pages, leur grand apport est de signaler avec une part d’humour dans nombre d'exemples pédagogiques (surtout en Sapiens, mieux construit), le grand bouleversement qui nous attend et qui nous rejoint déjà. Que le "dataïsme" (le Big data introduisant l'IA, l'intelligence artificielle) remplace ou non les grandes religions, Harari nous avertit que cette nouvelle religion est déjà installée et pour longtemps, dans le paysage humain du 21ème siècle. S'ajoutant au danger de l'évolution du climat et ses conséquences sur le devenir de millions d'hommes, le pouvoir exercé par les centres de collecte des moindres données de chacun, sans qu'un seul ne puisse échapper au filet déjà tendu, est un défi de plus qui demanderait d'anticiper les conséquences comme il se fait dans la douleur pour le climat. . BG

Ben Deus
jeu 07/02/2019 - 18:32

Par rapport à votre point faible : je trouve que sa déconstruction des réligions monothéistes est faite avec un tact olympien, c'est tout simplement d'une limpidité extra ordinaire qui ouvrira j'espère, les esprits de tous. La transcendance dont vous parlez est bien traitée par Harari et elle est clairement distinguée des religions en tant que fiction figée dans le temps. Ce sont pour lui 2 questions totalement séparées. J'aimerais échanger avec des pratiquants de vive voix pour argumenter sur ces notions. J'ai l'impression que si ce livre était lu par une bonne partie de l'humanité, nous aurions moins de mal à nous comprendre et pourrions nous concentrer sur l'essentiel.

Anarchik
lun 23/05/2022 - 10:23

Il manquaient JUSTE quelques années pour voir à quoi ce livre aurait servit et qui a commandé cette aventure loin de la science et de l'esprit rigoureusement scientifique.
Une fois salué par les gouvernants des puissances qui n'ont jamais eu ni l'humanité dans le coeur ni les religions (véritable rempart à toute asservissement de l'humanité à l'Homme anti-traditionnel, sans valeurs !), on saisi vite la vocation d'une telle mésaventure littéraire.
Aujourd'hui, on comprend mieux quel est l'avantage de démunir l'Homme de toute référence à Dieu, à la transcendance, à la spiritualité; Yuval condamne les monothéismes (parce que lui même condamné pour son homosexualité) et parle même avec mepris d'une humanité insignifiante et inutile qu'il faut ménager de faire partir de cette planète (propriété de Davos !).
Ce livre est un prélude à un changement de paradigme, celui de l'homme-sans-Dieu, l'Homme délié de sa tradition spirituel qui deviendra un rat de laboratoires, un artefact(@Attali), ou un objet sur lequel on appliquera tout les changements prévus par les rats de la cour de Davos !
Salut !

véroniqye henry
ven 29/07/2022 - 18:00

aucune notion d'objectivité sur le plan scientifique , géopolitique , philosophique , historique ....cet auteur est un manipulateur , un fabulateur qui écrit pour l' humain n'ayant aucune connaissance . Il se prétend historien mais devrait apprendre mieux l'homosapien ! il y a cruellement manque de synthèse , manque de rationnalité ,trop de jugements portés par lui qui me donne la nausée ! aucune explication déployée objective scientifiquement fiable , que de l' irrationnel . Son bouquin est tellement nauséabond que je ne le recommande surtout pas ! jamais plus je ne veux lire un livre de ce facétieux .

Agnès
ven 09/12/2022 - 17:38

Je suis rassurée en lisant les commentaires qui précèdent de voir que certains gardent encore l'esprit clair face à ce manipulateur, prétentieux, pervers qui aspire à la disparition de 2000 ans de civilisation. La secte qu'il sert infiltre toutes les mentalités, distille un venin qui me fait penser, dans un autre genre, à Mein Kampf.
Eternelle recommencement d'extermination et de soumission de tous ceux qui n'appartiennent pas à la caste. Cet ouvrage est toxique, pervers parce que très insidieux.

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