Histoire des bibliothèques
296 pages - 23.90€
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Thème
La bibliothèque a une très ancienne et très noble histoire. Cet essai de Frédéric Barbier en raconte la genèse et la relation féconde avec le développement des formes écrites de transmission du savoir - parchemins, codex, incunables, livres. Car sans livres, pas de bibliothèques, sans bibliothèques, pas d'organisation du savoir, et sans espaces de préservation et de conservation, pas de moyen de partage des connaissances. Espace, puis meuble, puis méthode de classement, la bibliothèque - d'Alexandrie aux bibliothèques virtuelles - est née de la relation entre savants, mécènes et hommes de pouvoirs, à la recherche du recueil des connaissances de leur temps. Si les empires ont constitué les premières grandes bibliothèques, la république romaine avec les familles "nobles", le christianisme, l'Islam, les monastères, les églises, les écoles religieuses, les républiques naissantes du 18ème siècle ont permis de constituer ces collections essentielles à la connaissance des idées et du monde. La révolution française (notamment), la fortune des grandes familles aristocratiques d'Europe, mettront à contribution les meilleurs architectes afin de concevoir ces temples de la connaissance, dont il reste des monuments remarquables - comme le fut la bibliothèque Sainte Geneviève à Paris.
Cet essai est un voyage dans le temps jusqu'aux édifices modernes de la Part Dieu (à Lyon) ou de Birmingham, ou encore dans les métadonnées de Google Books, qui interrogent nos usages modernes de partage de l'information.
Points forts
Abondamment illustré, cet essai est tout simplement bien construit et accessible.
Il associe plusieurs angles "d'exploration", qui rendent sa lecture intéressante et didactique. L'angle historique - chronologique explique le rôle des pouvoirs et des puissants dans la constitution, l'enrichissement (notamment lors des conquêtes), la sélection, la copie et le partage des œuvres.
L'approche par les usages et les choses explore les solutions, inédites au cours des époques du fait de l'évolution des modes de production des textes, pour conserver, archiver, reproduire et offrir à la lecture les ouvrages.
L'approche par l'utilité et les publics, initiée avec la révolution française, montre la volonté de vulgarisation des savoirs comme moyen de libérer les esprits et de cultiver un sentiment universaliste et démocratique.
Comme le dit l'une des premières pages de l'essai, cette histoire des bibliothèques se confond avec "l'histoire matérielle de la pensée".
Quelques réserves
On pourra dire que la somme de lieux, de personnes et d'événements historiques cités est considérable voire submergeante ! Mais elle tisse la trame qui a uni capitales, grandes familles régnantes, humbles religieux, juriste ou négociants, centres intellectuels d'Europe, d'Asie, du Moyen Orient, d'Orient et d'Afrique pour que se perpétuent des lieux où la pensée s'incarne et se diffuse à travers des livres.
Malgré cette observation, pour peu que ce sujet intéresse ou intrigue, je ne lui trouve pas de point faible.
Encore un mot...
Vous croyez qu'un tel sujet est ennuyeux et sans intérêt ? Détrompez vous ! Après la lecture de cet essai, vous ne regardez plus livres et bibliothèques comme avant. Du mobilier aux lieux de lecture "physiques" et maintenant virtuels, les bibliothèques ont accompagné et promu toutes les formes de transmission écrite du savoir depuis la plus haute antiquité. Cela peut paraître évident, mais ce livre l'explicite avec érudition et simplicité. Il apprend aussi qu'il n'y pas eu de transmission et de valorisation des savoirs sans volonté politique, qu'elle soit impériale, royale, républicaine, aristocratique ou révolutionnaire. Le livre demeure un trésor que les moteurs de recherche risquent de nous faire oublier, à orienter nos curiosités vers des sites internet où la connaissance hésite entre l'approximatif, le falsifié, l'anecdotique et l'essentiel. Livres et bibliothèques ont été considérés longtemps comme des biens très précieux - et cet essai contribue à nous convaincre qu'il faut que cela demeure !!
Une phrase
"Lorsque Charlemagne et ses proches conseillers et collaborateurs procèdent à la renovatio imperii de 800, ils affirment que l'héritage de l'Antiquité est désormais relevé par l'Occident, et qu'il s'accompagne d'une renaissance intellectuelle portée par l'écrit et par le livre. La société chrétienne s'organise autour du double pouvoir de l'empereur et du pape." P 73
A propos des bibliothèques privées - celle de Montaigne
"Si la pièce est aujourd'hui conservée, nous ne savons rien du mobilier lui-même (la collection a compté environ 1000 volumes dans les années 1590), le plus probablement constitué d'armoires et de tablettes sur cinq niveaux. L'abbé Prunis explique, en 1770, que l'ensemble est surmonté d'une inscription de dédicace à La Béotie - il s'agit d'une sorte de temple à l'amitié. " P 165
A propos de l'Abbé Grégoire (1750- 1831)
"Grégoire innove lorsqu'il montre comment la problématique moderne du patrimoine doit échapper aux catégories de l'idéologie politique. Mais il se montre aussi un politique fin et convaincu, lorsqu'il exprime comment la circulation des "Lumières", donc des livres, est le meilleur garant des choix politiques de la majorité en faveur de la révolution - une problématique qui dominera une grande partie du XIXème siècle…" P 232, 233
L'auteur
Frédéric Barbier est un historien français du livre. Enseignant chercheur au CNRS, puis à l'Ecole Nationale des Chartes et à l'Ecole Pratique des Hautes Etudes, il a écrit plusieurs ouvrages sur l'histoire des médias, l'histoire du livre et des bibliothèques (première édition en 2013). Ses travaux ont été largement diffusés en Europe.
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