Guillotinées

Une tentative méritoire pour faire revivre quatre victimes de la dictature robespierriste. Une analyse psychologique et historique un peu courte
De
Cécile Berly
Passés/composés
Parution 1er février 2023,
200 pages, 17€
Notre recommandation
3/5

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Thème

Des murs suintant d’humidité de la Conciergerie, Mme Cécile Berly fait surgir quatre figures de martyres de la Révolution: Marie-Antoinette, reine de France déchue, Mme du Barry, la dernière favorite de Louis XV, Mme Roland, l’égérie des Girondins et Olympe de Gouges, écrivain et précurseur du féminisme, toutes exécutées pendant la Terreur, à l’automne 1793.

Points forts

S’agit-il d’une référence aux Vies Parallèles? Mme Berly nous propose des morts parallèles. L’idée, louable en son principe, est de comparer, dans la prison et dans la mort, des personnages qui, au fond, n’ont pas grand chose en commun. 

L’auteur s’efforce de décortiquer cette période sombre séparant l’arrestation de la mort en cinq étapes, dans lesquelles les personnalités de chacune des suppliciées se révèlent : l’arrestation, l’incarcération, le jugement, la condamnation et ses suites, l’exécution. Il est vrai que l’apposition de leur parcours judiciaire et de leur réaction face à l’injustice d’une condamnation inique permet de caractériser leur personnalité mieux qu’un simple récit de leur calvaire. Ainsi le courage joyeux de madame Roland fait mieux ressortir l’angoisse mortelle de la comtesse du Barry.

Notre auteur étant une femme, elle est mieux à même de comprendre leur psychologie et de représenter leurs réactions, notamment en ce qui concerne l’hygiène, les humiliations, l’absence de linge de rechange ou la surveillance constante dont ces femmes ont fait l’objet de la part d’une soldatesque, probablement avinée et voyeuse.

Enfin, les récits sont documentés et précis, même si en moins de 200 pages, il est difficile d’entrer dans des détails trop nombreux, et même si la duplicité du Comité de Salut Public et de ses séides est bien décrite par notre auteur.

Quelques réserves

N’est pas Plutarque qui veut. Chez lui, les vies parallèles ne sont pas morcelées; on peut suivre au plus près l’existence et les hauts faits de ses héros. Chez Mme. Berly, le découpage en séquence apparaît vite comme un procédé qui, au demeurant, ne permet pas de proposer une analyse psychologique et historique assez fouillée et précise de chacune des quatre femmes. 

En outre le ton est assez froid et détaché, même si l’on croit comprendre que l’auteur ressent une certaine empathie avec ses héroïnes. Ainsi le procès de la reine est-il bâclé, les réactions de la foule des assistants passées sous silence. On aurait aimé, non du lyrisme, mais un peu plus de sentiment pour exprimer l’indicible. Mme Berly cite Juger la Reine, de Waresquiel: voilà un ouvrage dont le lecteur ne sort pas indemne, à la différence du livre sous revue.

Enfin, le lecteur intéressé d’un peu près à la Révolution n’apprend pas grand chose de nouveau.

Encore un mot...

Une tentative méritoire pour faire revivre quatre ombres, victimes, à des titres très divers, de la dictature robespierriste, malheureusement gâchée par une écriture un peu trop distanciée et un traitement pas assez fouillé de l’information historique.

Une phrase

« Quatre femmes qui représentent, chacune dans un registre différent, tout ce que la Révolution déteste. Et, en premier lieu, des femmes physiquement présentes dans l’espace public. Des femmes sorties de l’espace privé du foyer et qui se montrent. Des femmes qui affirment une personnalité, des idées, exercent une forme d’influence. »  Page 13.

L'auteur

Historienne, spécialiste du XVIIIe siècle, Mme Berly a publié de nombreux ouvrages sur la Révolution et Marie-Antoinette, ainsi que, par exemple, Madame de Pompadour ou Madame Vigée-Lebrun. Elle est manifestement focalisée sur la place des femmes dans cette histoire récente, comme en témoignent ses productions.

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