DE GAULLE, 1969, l’autre révolution
380 p.ages
22 €
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Thème
Je dois reconnaître avoir eu du mal à aborder ce livre à cause de son parti pris de départ : considérer que 1969 fut une année clé, et même « révolutionnaire » selon le sous-titre, dans l’œuvre du Général de Gaulle. Après une crise de société inédite (mai 1968) et une démonstration de la fragilité de la Vème République (le voyage à Baden), la transformation institutionnelle (et la suppression du Sénat) couplée avec une régionalisation jacobine se révéla à contretemps des préoccupations et des besoins d’un peuple désormais porté à l’individualisme et au quotidien, fatigué par l’ultime effort d’un président vieillissant. Ce parcours d’une année de rupture permet à Arnaud Teyssier de remonter à la source du gaullisme et de la Vème République avant d’évoquer la mort du Général, toujours en veille dans l’esprit du grand homme.
Points forts
Tout au long de cette « année témoin » qui vit la fin d’une époque, c’est toute l’œuvre gaulliste qui remonte en surface. De son grand dessein institutionnel, les évènements de mai 68 révèlent la vraie nature et le chaînon social manquant, celui de la troisième voie que De Gaulle avait appelé de ses vœux dans ses discours de la Libération. Mais la IVème République et sa fin algérienne douloureuse, le retour aux affaires, la réforme constitutionnelle, l’essor économique des 30 glorieuses ont fait passer la question sociale à l’arrière-plan.
La mise en œuvre technocratique et sans souffle de l’idée du Général prit son monde à contrepied, hormis la frange des gaullistes de gauche. La stratégie politique risquée se doubla, au plan tactique, d’une conduite chaotique de la campagne électorale référendaire du 27 avril. Avec, au terme du plébiscite d’un dirigeant sortant de son siècle, une défaite prévisible, assise par la candidature annoncée de Georges Pompidou, un gouvernement aux allures de transition et le lâchage de Giscard d’Estaing qui, déjà, prenait date avec l’avenir. Les derniers chapitres, évoquent les derniers actes de la vie du Général jusqu’à la foudre que sa mort inattendue fit s’abattre sur un peuple surpris et hébété.
Quelques réserves
Il n’y en a guère. L’ouvrage est richement documenté et écrit avec talent même s’il n’opte pas pour le style de l’épopée.
Encore un mot...
En une seule année, 1969, s’est joué, sur un sujet institutionnel d’intérêt secondaire, le départ sans adieu d’un géant de notre histoire. Prélude à un retour à la politique ordinaire, même revêtue des oripeaux de la modernité, et une réduction de notre pays dans l’échelle de l’espace et du temps. Mal entendu, mal compris, le héros d’un demi-siècle d’Histoire prit progressivement congé du peuple français dans la solitude de voyages symboliques et de l’écriture de ses Mémoires d’Espoir, œuvre qui s’arrêta, après « Le Renouveau (1958-1962)», au milieu de « L’Effort (1962-1965)» et ne verra jamais « Le Terme (1966-1969)». Proposant de l’organisation là où la France attendait encore du rêve, cette réforme institutionnelle mort-née illustre la formule de Mac Arthur : Toutes les défaites peuvent se résumer à un « trop tard ! »
Une phrase
De plus, comment « régner après la mort » ?
Sa vision, celle d’un présent inscrit dans une histoire en mouvement qui doit tout au passé.
Pour De Gaulle, le temps est un ennemi que l’on peut combattre si on le comprend.
On lit toujours l’Histoire à rebours.
Pour lui, l’impossibilité d’agir, c’est la mort.
Il s’agit de se montrer réformateur dans le domaine où il l’est le moins spontanément.
L'auteur
Normalien et énarque, haut fonctionnaire, écrivain, professeur associé, et biographe, Arnaud Teyssier, né en 1958, est un expert reconnu du gaullisme (Histoire politique de la V° République) et des grands hommes (Lyautey, Péguy, Richelieu, Louis Philippe, Philippe Seguin, dont il a été proche). Il s’intéresse particulièrement à l’histoire institutionnelle et aux rapports entre l’Etat et la société française.
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