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Thème
Sur les terrains de l'éducation, de l'économie libérale mondialisée, des modèles démocratique et culturel inspirés du monde anglo saxon, Natacha Polony et ses auteurs s'attachent à démontrer qu'un "soft totalitarisme" étouffe tout débat sur des approches alternatives.
Ces choix de société que beaucoup décrivent comme incontournables (une école pour épanouir plus que pour former, une mondialisation comme seule horizon du bonheur et de la croissance, le multiculturalisme comme modèle d'unité nationale…) sont-ils les bons, sont-ils les seuls, sont-ils contestables ?
Ce livre en propose une lecture critique qui en expose les influences, les enjeux et les attendus.
Points forts
1- Le livre se compose de 4 grands chapitres. Tous intéressants et accessibles. De mon point de vue, ils posent bien les débats qui traversent la société française aujourd'hui, en soulignent les lignes de force et les antagonismes. Le modèle éducatif, le modèle économique, le modèle politique européen fédéral, le modèle pluriculturel sont ils les seuls possibles pour l'avenir de la France et de l'Europe ?
2- Les gens qui pensent différemment ont toujours à apprendre aux autres. A l'image du "cercle des poètes disparus" (film dans lequel Robin Williams excellait en professeur de philo anticonformiste), les auteurs nous invitent à monter sur la table pour voir le monde différemment. Est-ce un point fort ? Oui, car à force de nous dire qu'il n'y a qu'un modèle de société possible, il est heureux de constater que des intellectuels indépendants nous invitent à voir notre société avec recul.
3 - Beaucoup de pépites : des évidences pour les érudits des sciences politiques, sociales et économiques, des révélations pour d'autres. Parmi d'autres d'exemples - les conséquences de la financiarisation de l'économie et de la dévotion des entreprises à leurs actionnaires sur le développement économique à moyen terme ; la globalisation de l'économie et l'ingérence des sociétés multinationales dans le gouvernement des Etats - en témoigne la nomination par Donald Trump du PDG D'ExxonMobil à la tête de la diplomatie américaine ; le conformisme des élites comme garant du développement de leurs carrière et de la pérennité des modèles qui les ont porté au pouvoir ; le caractère mondialiste et ultra libéral des accords de libre échange - que l'on ne saurait contester sans la promesse d'un chaos mondial ; le relativisme culturel, la dictature du "je", la revendication du communautarisme comme modèle d'intégration, la valorisation des identités singulières au détriment de la culture commune - débat entre les tenants d'une France multiculturelle et diversitaire, ou défenseurs d'une identité enracinée dans une culture fondatrice.
4- Une filiation intellectuelle indéniable et une complémentarité de points de vue avec d'autres "lanceurs de pavés dans la mare", comme François Xavier Bellamy, Mathieu Bock-Coté, Alexandre Delvecchio, ou autres Bernard Henri Levy, Benjamin Masse-Stamberger, Alain Finkielkraut… Témoignages d'une pensée politique décomplexée qui monte ?
Quelques réserves
1- Dans la lignée des livres qui posent sur le présent un regard sans angélisme ou "politiquement incorrect", une fois encore, déprimés s'abstenir !
2- Ce livre pourrait paraitre partisan. Rendez-vous compte, une analyse critique de près de 50 ans de libéralisme économique et sociétal ! Pour autant, sa lecture apprend que ces "choix" ressemblent plutôt à une importation de valeurs et de méthodes considérées comme universelles et démocratiques, mais qui ne le sont pas nécessairement.
3- Quelques formules à l'emporte pièce qui ne rendent pas le propos plus convainquant même si elles traduisent sans doute l'exaspération d'être peu entendus ou reconnus.
4- Une conclusion en forme de manifeste, certes utile, mais très incantatoire.
Encore un mot...
Il faut retenir de ce livre que le "Soft Totalitarisme" qu'il dénonce est l'affirmation d'une pensée unique et hégémonique pour gouverner le présent autant que pour conduire l'avenir. Natacha Polony et le Comité Orwell nous invitent à relire les concepts de transmission, de culture, de nation, d'identité, de modèles économiques et sociaux.
Avec notre mauvaise habitude de poser les idées dans des cases (droite, gauche, centre, "extrêmes"), il ne manquera pas de censeurs pour enfermer cet essai dans le "néo conservatisme" et pour en rejeter le contenu en bloc. Mais ce livre propose une analyse qu'il serait plus avisé de dire "inclassable". Ni de droite, ni de gauche. Rentrer dans l'une ou l'autre de ces cases ne donne pas "raison" par essence. Le propos n'est pas de convaincre que le vérité sort de ces pages. Il est de considérer des points de vue qui sortent du discours convenu. Pour paraphraser un auteur : pour ne pas vivre comme des individus "lobotomisés" ! Cela peut irriter, déprimer, interpeler. Cela peut aussi faire du bien à nos neurones parfois paresseuses !
Une phrase
- "Ce livre est l'histoire d'un formidable hod up… sur cette liberté conquise au terme d'un processus de plusieurs siècles sur tous les pouvoirs… sur le consensus politique et social issu de l'après guerre, et qui avait permis aux pays occidentaux d'atteindre une prospérité et une réduction des inégalités sans précédent dans l'histoire du monde." P 22
- A propos des travaux de Branko Milanovic. "… Son dernier livre, qui consacre dix ans de travaux a pourtant jeté un pavé dans la mare en montrant comment trente ans de libre-échange ont bouleversé les inégalités de revenus dans le monde et ont fragilisé les classes populaires des démocraties occidentales". p 83
- "Les GAFA (Google, Apple, Facebook, Amazon) auxquels il faut ajouter Microsoft… détiennent 80 % des informations personnelles numériques de l'humanité… [Leur poids] est devenu tel que le pouvoir économique et financier américain ne peut plus rien leur refuser". p 89 et 90
- "… Dans les faits, plus il y a d'Europe, moins il y a de patriotisme, et plus le besoin d'identité de substitution, régionale ou confessionnelle, grandit." P 168
- "La tyrannie des minorités imposée par l'utopie diversitaire des années 80 s'est accompagnée d'une tyrannie de la repentance. Tandis que la culture ou la religion des minorités étaient portées au pinacle, l'histoire et la culture française étaient "diabolisés". p177
- "Au pays de Voltaire, il est presque devenu impossible de critiquer l'islam sans être accusé de stigmatiser, d'amalgamer ou d'essentialiser des populations". P 186
L'auteur
Natacha Polony est journaliste, chroniqueuse, "essayiste". Beaucoup l'écoutent sur Europe 1 pour sa revue de presse matinale, l'on regardé sur France 2 ou Canal Plus.
Elle a co-fondé et préside le Comité Orwell, qui vise à rendre au métier de journaliste une voix libre de toute influence.
Outre ses prises de position, "entre Jean Luc Mélenchon et Nicolas Dupont Aignan", publiées de Marianne au Figaro, elle a écrit depuis 2005 huit livres pour dénoncer les dérives de l'éducation, de la dilution de la souveraineté.
"Bienvenue dans le pire des mondes" est le fruit d'un travail collectif qui a rassemblé 9 auteurs, membres du comité Orwell.
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