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Rue du Conservatoire de Valérie Donzelli - Documentaire.
Surprenante Valérie Donzelli ! Pour son sixième long métrage, la réalisatrice du récent L’Amour et les forêts adapté du roman éponyme d’Eric Reinhardt (César 2024 de la meilleure adaptation) et du plus ancien La guerre est déclarée (Grand Prix du Jury au Festival de Cabourg en 2011), se lance dans le documentaire. Un projet né de la proposition que lui a faite une élève du Conservatoire national d’art dramatique de Paris de réaliser un film sur son premier travail de mise en scène avec ses camarades de promo. Un Hamlet très personnel tiré de l’œuvre de William Shakespeare dont le rôle-titre sera confié à une femme. La cinéaste est à un moment difficile de sa vie (rupture, déménagement) mais elle commence à filmer les répétitions et interroge les jeunes interprètes sur leurs doutes et leurs certitudes à l’aube de leur envol professionnel. Le résultat est ce film, tendre, bienveillant, fantaisiste, un peu foutraque aussi, mais d’un dynamisme fou, qui dit bien le feu intérieur qui anime ces futurs comédiens. Rue du Conservatoire : comme un portrait en creux de sa si singulière et fougueuse cinéaste.
Recommandation : 3 coeurs
Dominique Poncet
Les Barbares de Julie Delpy - Avec Julie Delpy, Sandrine Kiberlain, Laurent Lafitte, India Hair…
À Paimpont, petit village breton, les habitants vivent en pleine harmonie. Dans un élan de solidarité, la mairie propose d’accueillir des réfugiés ukrainiens. Sauf que ce sont des Syriens qui se présentent un beau jour devant les villageois, à la surprise générale. Entre les figures historiques de Paimpont et les nouveaux arrivés, les problèmes ne font que commencer…
Julie Delpy n’est jamais là où on l’attend. Menant une brillante carrière de réalisatrice depuis plus de vingt ans entre la France et les Etats-Unis, l’actrice française est aussi à l’aise au pays de l’Oncle Sam (Two Days in New York, On the Verge…) qu’au beau milieu du terroir français. Son nouveau film, Les Barbares, est une réjouissante comédie noire, tourné au beau milieu de l’Ille-et-Vilaine. La peur de l’étranger, la bien-pensance, le populisme sont autant de thèmes battus en brèche dans ce long-métrage qui ne brille pas toujours par son scénario mais qui est heureusement sauvé par sa joyeuse troupe d’acteurs. Mention spéciale à Sandrine Kiberlain, hilarante en propriétaire de supérette portée sur la bouteille.
Recommandation: 3 cœurs
Antoine Le Fur
Ma vie, ma gueule de Sophie Fillières - Avec Agnès Jaoui, Angelina Woreth, Valérie Donzelli, Laurent Capelluto…
Elle a sans doute été aimée, sans doute été une bonne mère, sans doute aussi été une collègue fiable et une copine attentive.Mais voilà, aujourd’hui, Barberie Bichette, qu’on appelle parfois, à son grand désespoir, « Barbie », a atteint aujourd’hui 55 ans. Comment faire à cet entre-deux âge? Comment se comporter? Comment se supporter? “Barbieva” prendre le large dans la sauvage Ecosse. Et, miraculeusement, la vie va de nouveau lui tendre les bras…
En écrivant et en réalisant ce portrait d’une femme de cinquante ans, la cinéaste Sophie Fillières (morte à la fin du tournage à l’âge de 58 ans) savait-elle qu’elle signait là son ultime film? Quoi qu’il en soit, dans ce qu’elle dégage d’ humour, de subtilité, de nostalgie, de poésie et aussi de flou, et même de dépression (un peu trop ?), l’héroïne de Ma vie, ma gueule, interprétée avec une justesse folle par Agnès Jaoui semble ressembler comme deux gouttes d’eau à la femme que fut cette cinéaste singulière. Déchirant.
Recommandation: 3 coeurs
D. Poncet
Jour de colère de Jean-Luc Herbulot - Avec Joey Starr, Asia Argento, Joaquim Fossi…
Frank (JoeyStarr) est un impitoyable tueur à gages que rien ne semble pouvoir impressionner. Et pourtant, le jour où sa route croise celle de Virgil Hilsher (Joaquim Fossi), un dangereux sociopathe, il est très loin d’imaginer ce qui l’attend…
Il faut s’armer d’indulgence devant ce Jour de colère, sorte de croisement hybride entre le polar, le film fantastique et le drame romantique. Malheureusement, même avec toute la bonne volonté du monde, difficile d’adhérer à cet objet filmique non identifié qui frôle à de très nombreuses le ridicule. Un ratage complet que même son casting prometteur n’arrive pas à sauver.
Recommandation : 1 cœur
Antoine Le Fur
Toxicily de François-Xavier Destors et Alfonso Pinto- Documentaire.
Au Nord de Syracuse en Sicile, la baie d’Augusta abrite l’un des plus grands complexes pétroliers d’Europe. Accueilli comme un espoir de vie meilleure par la population lors de son implantation il y a 70 ans, ce gigantesque consortium va, en fait, au mépris des lois, empoisonner l’environnement (animal et végétal) et les hommes (depuis sa mise en route, on ne compte plus, là-bas, les cas de stérilité, les déformations de nourrissons et les morts par cancer), cela, dans une omerta assourdissante imposée notamment par la mafia et les responsables politiques locaux. Plutôt que de faire commenter ses images édifiantes par des spécialistes environnementaux, Toxicily , réalisé par le documentariste François-Xavier Destors ( Rwanda, La surface de réparation, Norilsk l’étreinte de glace) donne la parole à ceux qui, sur place, ne cessent de dénoncer, jusqu’à présent en vain, ce désastre écologique et humain. Émouvant et révoltant.
Recommandation: 3 cœurs
D. Poncet
Speak no evil de James Watkins- Avec James McAvoy, Mackenzie Davis, Aisling Franciosi…
Louise (Mackenzie Davis) et Ben (Scott McNairy) sont un couple d’Américains en vacances avec leur jeune fille Agnes (Alix West Lefler) en Italie. Sur place, ils font la rencontre de deux touristes britanniques, Paddy (James McAvoy) et Ciara (Aisling Franciosi). Les deux couples se lient d’amitié. Quelques semaines plus tard, Louise et Ben reçoivent une carte de Paddy et Ciara les invitant à venir passer un week-end chez eux dans leur ferme. Le séjour, qui s’annonçait idyllique, va cependant virer au cauchemar…
À l’origine, il y avait un film dano-néerlandais réalisé par Christian Tafdrup, sorti en 2022. Deux ans plus tard, Speak No Evil a droit à son remake américain, du même nom. Un long-métrage assez similaire dans sa construction, malgré un dénouement différent. S’il met un peu de temps à démarrer, le film de James Watkins (Eden Lake, Bastille Day…) se révèle tout de même assez efficace et bien effrayant dans sa seconde partie. Un divertissement tout à fait honnête et idéalement calibré pour les amateurs de sensations fortes.
Recommandation : 3 cœurs
Antoine Le Fur
Ni chaînes, ni maîtres de Simon Moutaïrou- Avec Ibrahima Mbaye, Camille Cottin, Benoît Magimel…
1759, Isle de France (actuelle île Maurice). Dans la plantation d’Eugène Larcenet (Benoît Magimel, terrifiant de cruauté doucereuse), Massamba (Ibrahima MBaye) est chargé de surveiller ses semblables, tous esclaves. Une nuit, pour échapper à l’enfer de sa condition, sa fille, Mati, s’enfuit. Une redoutable chasseuse d’esclaves (Camille Cottin) est chargée de la retrouver. Pour tenter de la sauver, Massamba n’aura plus d’autre solution que de s’échapper à son tour. Par cet acte, il rompt avec l’ordre colonial et devient un « marron ».
Pour son premier long métrage en tant que réalisateur, le scénariste franco-béninois Simon Moutaïrou (Boîte noire, Goliath) aborde un sujet très peu traité dans le cinéma hexagonal : l’esclavagisme pratiqué par la France pendant près de quatre siècles. Si son film n’est pas exempt de maladresses (ses « effets » sont par moments trop appuyés), il frappe et émeut par la rigueur historique de son scénario et aussi par la maîtrise de sa mise en scène, à la fois réaliste et immersive.
Poignant et nécessaire.
Recommandation: 3 cœurs
Dominique Poncet
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