Tu ne tueras point

Mel Gibson fasciné par la violence: parfois dérangeant
De
Mel Gibson
Avec
Andrew Garfield, Vince Vaughn, Teresa Palmer, Sam Worthington, Luke Bracey, Hugo Weaving, Rachel Griffiths.
Notre recommandation
3/5

Infos & réservation

Thème

A l'âge de 18 ans, Desmond Doss (Andrew Garfield) n'en peut plus de voir ses copains s'engager pour le pays. Nous sommes au début de 1945. Le Japon résiste encore au rouleau compresseur américain. A son tour Desmond Doss devient soldat, un soldat pas comme les autres. Dès les premiers moments de l'instruction, la nouvelle recrue se distingue en refusant de porter un fusil. « Je ne suis pas venu pour tuer mais pour soigner », dit-il à ses camarades médusés. En fait il est entré dans l'armée comme infirmier. 

Avant de pratiquer cette activité à temps plein, il lui faudra affronter l'incompréhension de ses chefs qui vont tout tenter pour le faire réformer. Mais il tient bon. Et le voilà bientôt avec son bataillon au pied de la falaise d'Hacksaw, en Asie, défendue férocement par les Japonais. C'est là que le vrai Desmond Doss deviendra un héros et, au final, se verra remettre la médaille d'honneur des mains du président Truman en octobre 1945, accompagné d'un éloge soulignant « son extraordinaire bravoure et sa détermination à toute épreuve face au danger ». Pas mal pour un objecteur de conscience qui passait pour un pleutre... 

Points forts

L’intrigue est astucieuse, conduite sans précipitation. Le spectateur se demande qui est ce gringalet perdu au milieu de ces brutes épaisses. Qu’est-ce qu’il fait là ? Erreur d’aiguillage dans la vie d’un post-ado ? Et puis les éléments divers se mettent en ordre de bataille…
 
Ce jeune homme a une fiancée infirmière, interprétée par la ravissante actrice australienne Teresa Palmer. Auprès d’elle, il apprend les rudiments de sa future tâche. Cette femme a compris le combat de son amoureux et va le soutenir contre vents et marées. Si la réalité fut sans doute plus prosaïque, le romanesque gibsonien fonctionne à plein régime.
 
Même traitement pour la famille du conscrit. Le père, interprété par Hugo Weaving, ne se remet pas de sa guerre, celle de 14/18 où la plupart de ses amis ont été engloutis. Il sombre dans l’alcool et la violence envers son épouse, ce qui paradoxalement, renforce les convictions non violentes du fils. Il s’en expliquera à l’un de ses camarades de combat. Là aussi, si l’intrigue est sans doute en partie inventée, elle est belle pour le propos du film.
 
Pour qui aime les scènes de guerre au cinéma, ou pour qui les supporte, la façon dont Mel Gibson filme les assauts successifs contre la falaise est époustouflante et d’une violence extrême. On croit toujours qu’on ne pourra pas aller au-delà, faux, on y va, toujours plus dur. Il y a chez ce cinéaste un certain culte pour la mort violente et les morceaux de corps éparpillés. Au XIXe siècle, Mel Gibson aurait pu être Delacroix ou mieux encore Goya. 

Quelques réserves


Pas sûr que cette violence extrême se justifie à l’écran. On peut dire les choses sans en montrer toute l’horreur. Le film dure deux heures onze minutes : certaines scènes de bataille auraient pu être raccourcies. Premier point négatif. 

Le deuxième concerne la musique omniprésente soulignant les moments romantiques comme les séquences guerrières. Il y a chez Gibson un syndrome de la musique d’ascenseur ou de supermarché : chaque image doit être sonorisée, pour lui le silence n’est pas cinématographique. 

Troisième et dernière critique négative : notre héros a un frère aîné qui s’engage avant lui. On le voit un jour autour de la table familiale en uniforme, sous l’œil excédé du père. Puis il disparaît pour toujours de l’écran. Qu’est-il devenu ? A-t-il disparu au montage afin que le film ne fasse pas trois heures ? 

Encore un mot...

On a signalé les fortes convictions religieuses de Mel Gibson qui, paraît-il, flirte avec les catholiques intégristes. Cela peut agacer. Dans cette histoire forte, elles servent de sous-basement à l’intrigue qui ne peut s’expliquer que par une foi solide et sans concession.

« Tu ne tueras point » : notre jeune héros prend ce commandement - édicté dans la Bible par Moïse après sa rencontre avec Yahwé sur le mont Sinaï – au pied de la lettre. Cette intransigeance fait la grandeur de Desmond Doss qui n’a jamais voulu que son histoire devienne un film jusqu’à ce qu’au soir de sa vie, on le convainque qu’elle était exemplaire alors qu’il la trouvait normale. Cette grandeur rejaillit sur le film tout entier.

Une phrase

« Desmond soutenait que les vrais héros étaient ceux qui avaient laissé leur vie sur le champ de bataille. Dans un paysage cinématographique dominé par des super-héros fictifs, j’ai pensée qu’il était temps de rendre hommage à ce héros tout à fait réel ». Mel Gibson.

L'auteur

Cinquième d’une famille de onze enfants, Mel Gibson est né dans l’État de New York en 1956. Il a douze ans quand ses parents quittent les États-Unis pour l’Australie. Il étudie au National Institute of Dramatic Arts de l’université de Sidney, fait ses débuts professionnels au théâtre et se fait remarquer par le cinéaste australien George Miller qui lui offre le rôle titre du premier Mad Max (1979). 

Devenu en un seul film l’acteur le plus demandé dans son pays et une star internationale, il enchaîne avec un personnage à l’opposé, le jeune handicapé du film « Tim » de Michael Plate, qui lui vaut l’Australian Film Institute Award du meilleur acteur. Il remporte une nouvelle fois ce prix avec « Gallipoli » de Peter Weir. Puis il joue dans « L’année de tous les dangers » du même Peter Weir. En 1984, il est engagé dans son premier film américain et sa carrière d’acteur se partage alors entre de multiples films d’action, comédies et films plus ambitieux qu’il finira par tourner lui-même. 

Sa première réalisation, « Bravehaert », remporte cinq oscars. En 2004, il filme « La passion du Christ » qui nous renseigne sur ses puissantes convictions religieuses et ses penchants violents - le chemin de croix est sanguinolent. Puis vient « Apocalypto » en 2006, sur la disparition de la civilisation Mayas. Son nouveau film, « Tu ne tueras point », puise à ces deux sources, le christianisme et l’histoire.

Ajouter un commentaire

Plain text

  • Aucune balise HTML autorisée.
  • Les adresses de pages web et les adresses courriel se transforment en liens automatiquement.
  • Les lignes et les paragraphes vont à la ligne automatiquement.

Vous pourriez aussi être intéressé