Sully
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Thème
Souvenez-vous, le 15 janvier 2009, un Airbus A320 se pose sur l’Hudson à New York; le pilote, Chelsey Sullenberg, surnommé Sully, aussitôt fêté en héros dans le monde, vient de sauver cent cinquante cinq personnes, équipage compris.
Clint Eastwood a minutieusement reconstitué l’événement en deux temps.
D’abord l’enquête qui a suivi le crash pour savoir si Sully (Tom Hanks) et son copilote, Jeff Skiles (Aaron Exckhart), auraient pu poser leur appareil sur un terrain proche – question importante pour les assureurs, l’avion qui a finalement coulé dans le fleuve coûtait 60 millions de dollars.
Le réalisateur a, dans un deuxième temps, illustré l’enquête, passionnante, de prises de vue spectaculaires faisant revivre la descente de l’appareil, puis le sauvetage des passagers.
Points forts
Comme dit le responsable de l’enquête, il est rare qu’on puisse discuter avec un pilote dont l’avion vient de s’abîmer… Les enquêteurs en profitent donc pour cuisiner l’homme et son adjoint pour tenter de les mettre en difficulté. Les assureurs sont intéressés par l’idée que ce professionnel aguerri, qui vole depuis quarante-deux ans et n’est pas loin de la retraite, ait pu faire une erreur, cela permettrait de lui faire endosser la responsabilité de l’accident.
Clint Eastwood montre tous les épisodes de l’avion en perdition, à commencer par la collision, à 850 m d’altitude au-dessus du Bronx, avec une nuée d’oies qui vont bousiller les deux moteurs et obliger l’avion à planer pour ne pas chuter (les oies ne s'en tireront pas, elles). Planer n’est pas suffisant et il faut atterrir vite. Mais où ? Les pistes sont trop éloignées par rapport à l’état de l’avion.
Le réalisateur a heureusement évité les longues scènes habituelles à ce genre de film catastrophe où l’on voit les passagers embarquer et échanger paisiblement leurs impressions avant l’affolement. Le cinéaste s’est consacré aux circonstances de l’accident ainsi qu’à l’attitude extraordinaire du pilote - interprété avec sobriété et justesse par Tom Hanks - qui conserve un calme olympien le temps de la descente en planeur qui dure moins de trois minutes et demi (298 secondes).
Si vous allez voir ce film, ne partez pas avant le générique de fin puisque c’est à ce moment que le réalisateur a placé une série de photos et de prises de vues réelles. On y voit même une vidéo où le pilote fait un speech devant les passagers, remerciant les sauveteurs venus avec sept ferrys autour des ailes de l’avion. Ensuite, le pilote, plein de calme, a dû faire une dépression carabinée. On voit d'ailleurs l'un de ses cauchemars à grande échelle au début du film, je ne vous en dis pas plus.
Quelques réserves
"Sully" est une épure, aucun temps mort dans cette tragédie avortée. C’est une histoire positive et optimiste de bout en bout, filmée avec doigté. Impossible de lui trouver un point faible.
Encore un mot...
Le film s’inspire du livre de Chelsey Sullenberger et de Jeffrey Zaslow, « Highest Duty ». Il s’attache aussi à des événements inconnus du public. La productrice Allyn Stewart a longuement parlé avec le pilote. De même que le scénariste Todd Komarnicki : « Sans le savoir, dit-il, Sully s’est préparé toute sa vie à accomplir cet exploit ». L’équipe du cinéaste a également contacté la plupart des sauveteurs pour qu’ils apparaissent dans le film. Le capitaine du premier ferry qui s’est approché de l’avion pour prendre en charge les passagers regroupés sur les ailes a repris du service pour le film. Deux plongeurs ont à nouveau sauté d’un hélicoptère pour secourir une passagère qui avait glissé dans l’eau et une dizaine de membres de la Croix Rouge présents le jour de l’accident ont renouvelé les mêmes gestes. Enfin, les présentateurs des journaux télévisés de New York jouent leur propre rôle. Une anecdote amusante, le pilote a contacté sa bibliothèque de quartier pour signaler la disparition d’un livre qu’il avait emprunté et qui a été noyé… C’est dire l’intégrité d’un personnage qui a tenu à revisiter deux fois la carlingue de bout en bout pour voir s’il ne restait personne à bord avant d’accepter de rejoindre les sauveteurs. Un dernier mot : vers la fin de l’enquête, Clint Eastwood filme les simulations effectuées avec des pilotes et un appareil ad hoc pour reconstituer la descente. C’est de la fiction mais cela s’est réellement passé ainsi. Ces simulations montrent que le pilote n’avait pas d’autre choix que celui qu’il a décidé en quelques secondes. Dans tous autres les cas, l’avion se serait écrasé sur des buildings. Fin de l'enquête.
Une phrase
- « Aujourd’hui, personne ne meurt ». Un sauveteur à un passager secouru.
- « Par les temps qui courent, à New York, il est rare qu’un avion apporte du bonheur ». Un expert.
- « Quiconque sait affronter l’adversité sans paniquer fait preuve d’un tempérament supérieur à la moyenne et s’avère un personnage de film intéressant ». Clint Eastwood
L'auteur
La carrière de Clint Eastwood, 86 ans, pourrait être rassemblée en quatre chapitres.
Après des études médiocres et des boulots alimentaires, il se fait remarquer pendant son service militaire pour son physique avantageux - il mesure un mètre quatre vingt quinze et il n'est pas laid. Il est donc approché, au début des années 1960, par le réalisateur d’une série télévisée, « Rawhide », dont le thème est la vie quotidienne des cowboys accompagnant la transhumance des troupeaux. Fin du premier chapitre.
Ce marchepied télévisé lui ouvre la perspective d’aller tourner en Espagne avec un cinéaste italien alors peu connu, Sergio Leone. Ce sera « Pour une poignée de dollars », « Et pour quelques dollars de plus », « Le bon, la brute et le truand ». Le succès mondial est au rendez-vous. Fin du deuxième chapitre.
Dans les années 1970, Eastwood se filme lui-même en inspecteur Harry, un redresseur de tort qui a fait longtemps passer, à tort, l’acteur-réalisateur pour un macho sans nuance.
Depuis la fin du siècle dernier, le quatrième chapitre de sa vie est rythmé par la sortie d’un film annuel dont les titres l’ont hissé au sommet de l’olympe des cinéastes : « Bird », « Impitoyable », « Million dollar baby », « Mystic River », « Mémoires de nos pères » et « Lettres d’Iwo Jima », « Gran Torino », « Invictus » et aujourd’hui « Sully », son trente-cinquième film.
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