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Thème
- Alexander Ekman avait annoncé qu’il allait surprendre…Il a tenu parole ! Conçu comme un processus expérimental, Play est une aventure de groupe menée tambours battants, pour une petite quarantaine de danseurs. La fantaisie y côtoie la grâce, qui elle même se déploie à travers une gestuelle d’une folle énergie, qui, elle même, semble se rire de la pesanteur, qui… On l’a compris, Play a été conçu comme une ronde joyeuse pour susciter chez le spectateur mille et une sensations, qui vont s’enchaîner, se superposer, ou se mélanger.
- La première partie est vouée au blanc immaculé. Après un réjouissant trio de cuivres en guise d’ouverture, quand le rideau se lève, tout, en scène, est immaculé : costumes, éléments de décors, tenues, aussi, des musiciens sortis de la fosse et juchés sur une estrade placée au fond du plateau. Tout est blanc donc, exceptés le pull orange vif d’un danseur et les balles vertes qui viendront, par milliers, inonder le plateau et avec lesquels les interprètes « joueront » comme s’il s’agissait d’un « élément » . Jouer, oui le mot est juste ici, tant la chorégraphie est ludique. Que ce soit dans les scènes de groupes, les solos ou les duos, il y a beaucoup d’innocence, de naïveté, de cocasserie et d’humour dans cette partie, qui fait irrésistiblement penser à l’enfance, son innocence et son espièglerie.
- Après l’entracte, la seconde partie est l’exact contraire de la première. Tout est sombre, gris et noir. Cette fois, sans aucun doute, ce sont les adultes qui ont pris possession du plateau. Ou plus exactement, les travailleurs de notre société industrielle. La gestuelle évoque la soumission à l’autorité, la répétitivité des gestes dans le travail, l’obsession des horaires et du calendrier, l’enfermement et l’individualisme. On pense aux Temps Modernes de Chaplin, ou à Play Time de Jacques Tati. C’est percutant, virtuose, drôle aussi par moments, mais plus incisif, plus raide, plus mécanique que dans la première partie. A la fin, restera un seul danseur, qui se dévêtira (pas complètement). Image splendide de la solitude de l’homme face à l’éternité.
Points forts
- Quelle bonne idée que celle d’Aurélie Dupond d’avoir commandé une pièce à Alexander Ekman. Le nouvel enfant terrible de la danse a joué le jeu en choisissant de créer, sur mesure, pour le Ballet de l’Opéra de Paris. Trois mois d’improvisations et de propositions avec trente-sept des cent cinquante danseurs de la troupe, mélangés sans distinction de leur grade, pour aboutir à ce Play, interprété à la perfection, et qui mêle mouvements d’ensemble, duos et solos. Cette pièce, qui s’étend sur toute la soirée et emprunte à tous les vocabulaires chorégraphiques, foisonne d’idées. Elle est spectaculaire, acrobatique, cocasse, aérienne par moments, à d’autres, très ancrée, mais de bout en bout, énergique. Elle fait exulter les corps. La joie des danseurs contamine la salle.
- C’est fou, aussi, les trouvailles visuelles de ce Play. Une forêt de cubes blancs qui montent et descendent des cintres jusqu’à servir de mini estrades aux danseurs pour des solos très spectaculaires; la fosse d’orchestre transformée en piscine qu’on remplit presque à ras bord de 60 OOO balles de plastique vert ; d’énormes ballons blancs lancés sur le public, et pour sa plus grande joie, à la fin du spectacle… Tout flatte l’œil et l’égaie…
- L’oreille aussi est enchantée, grâce à la partition du Suédois Mikael Karlsson. Pour ce Play, le compositeur désormais attitré d’Alexander Ekman, a concocté une étonnante musique électro-jazz, sur laquelle vient par moments s’ajouter la voix envoûtante de la chanteuse de gospel Calesta « Callie » Day.
Quelques réserves
Quel bonheur de dire qu’on n’a détecté aucune faute dans ce spectacle, ni de goût, ni d’interprétation. Tant pis pour les grincheux, qui trouveront peut-être qu’il manque un peu d’inventivité dans l’écriture. Ici, ce qui prime, c’est le jeu, l’élan et le travail de troupe.
Encore un mot...
Le moins qu’on puisse dire c’est qu’Alexander Ekman n’a pas raté son entrée au répertoire de l’Opéra de Paris. Il n’est qu’à entendre les ovations et les cris de joies des spectateurs à l’issue de chaque représentation. Play porte la troupe à son meilleur, soulève, par sa beauté, son inventivité, son humour aussi, perceptible jusque dans sa noirceur.
On n’attend qu’une chose : le retour de Ekman à Garnier.
Une phrase
« Alexander nous demande beaucoup d’improviser, de travailler sur la spontanéité. Il nous donne une idée, une sensation, un rythme, un début de mouvement et nous le développons ensemble…Cette façon de travailler implique de ne pas être dans la répétition, mais dans le moment présent. C’est assez intimidant. Si Alexander fait preuve d’une grande auto-dérision, il est extrêmement respectueux des danseurs ». ( Stéphane Bullion, Etoile du Ballet de l’Opéra).
L'auteur
Né le 12 janvier 1984 à Stockholm, Alexander Ekman est l’une des personnalités les plus bouillonnantes de la scène chorégraphique contemporaine, l’une des plus créatives aussi. Ce qui n’est pas surprenant de la part de ce danseur-chorégraphe suédois qui s’est réapproprié le « Etonne moi » lancé par Jean Cocteau à Serge Diaghilev lorsque ce dernier créa sa compagnie.
Alexander Ekman, qui a dansé au Nederlands Dans Theater puis chez Cullberg, est un petit surdoué, derrière lequel se dissimule un travailleur infatigable.
En 2005, il avait reçu le Premier prix au Concours chorégraphique international d’Hanovre. En 2011 il était parti travailler comme professeur et chorégraphe à la Julliard School de New York.
Créée en 2010, sa pièce Cacti a été reprise par quinze compagnies. Quant à son Lac des Cygnes, écrit en 2014, il a fait le tour du monde.
Connu pour son sens du rythme et son humour décalé, Alexander Ekman a déjà collaboré avec plus de quarante-cinq compagnies dans le monde, dont La Compañia Nacional de Danza à Madrid, le Ballet de l’Opéra de Vienne ou encore le Ballet national de Norvège. Un record pour un créateur qui n’a que 33 ans !
Play est sa première création pour l’Opéra de Paris.
Commentaires
le « Etonne moi » lancé par Jean Cocteau à Serge Diaghilev...
Etonnant, détonnant...
Vu PLAY le 29.12.2017
Hyper créatif
Hypra gracieux...
avec humour. Puisque l'on joue
Je n'arrive pas a me dé-scotcher de la captation de culturebox !
Génialissime !!!
Joli parfois, sans consistance souvent. Et lorsque metteur en scène y va de son message, la puérilité le guette (enfants insouciants / adultes gris et ternes). Très décevant.
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