Perfect Day
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Thème
Sur les hauteurs des Balkans, en 1995, lors d’un cessez-le-feu, travaillant pour l’ONG Aid across borders et sous la responsabilité d’un certain Mambru, un petit groupe d’engagés est chargé de retirer du puits d’un village un cadavre qui y a été jeté pour contaminer l’eau. La nécessité de trouver une corde, l’arrivée de Sophie, une jeune Française, le retour de Katya qui fut momentanément la maîtresse de Mambru, le chaos général, les facéties de l’adjoint B, la rencontre du petit Nikola et les absurdités réglementaires imposées par la Forpronu vont être autant d’occasions aussi drôles que dramatiques de suivre une série de péripéties, toutes authentiques et profondément, parfois désespérément, humaines.
Points forts
L’hommage fort, émouvant et salutaire rendu par Fernando Leon de Aranoa au travail ingrat et fondamental des égoutiers de l’humanitaire, chargés d’assurer l’installation et la maintenance des points d’eau. Avec The Search, Michel Hazanavicus abordait, lui, les ONG dans leur version noble (secours aux humains).
L’absence de pathos racoleur et de moralisme condescendant aisément justifiables pour traiter un tel sujet. A la place, un humour à froid, constant, destiné à déminer le drame sans l’éluder pour autant. A perfect Day c’est Mash version 2016, le cynisme subversif d’Altman propre aux 70’s ayant fait place à des considérations plus désabusées dans lesquelles Benicio Del Toro le dispute à un Tim Robbins en substitut de Donald Sutherland. Il est vrai que, tourné dans une région montagneuse difficile d'accès et la guerre étant achevée, les personnages n’étant pas médecins mais dédiés à la viabilité des sanitaires et des points d’eau, la situation se prêtait à cette fausse légèreté de ton.
Par delà l’humour, tout est dit, montré ou suggéré par petites touches de ce que représenta la décennie des guerres qui ravagèrent la Yougoslavie, causant 300 000 morts dont deux tiers de civils, et le déplacement de 4 millions de personnes.
La pluie qui annonce à nos héros leur calvaire à venir avec le débordement prévisible des égouts tout en faisant (enfin!) remonter le cadavre du puits, est une merveille de métaphore pour dénoncer l’absurde.
Quand arrive la sublime et bouleversante séquence finale reliant les moments clés du film via la chanson Where are all the flowers gone (pas la version de Joan Baez, dommage !), on ne peut que remercier Fernando Leon de Aranoa d’avoir choisi la bonne distance et de nous offrir une lueur d’espérance.
Quelques réserves
Aucun sur le plan formel même si, tous les goûts étant dans la nature, des esprits chagrins pourront regretter le côté mélodramatique de l’ultime séquence voire le choix du ton général.
Quant au fond, tiré du roman de l’ex-présidente de Médecins sans Frontières, Paula Farias, “Dejarse a Llover” (“il va pleuvoir”) et des expériences du réalisateur, lequel a travaillé aux côtés d'humanitaires dans des pays en guerre, je ne me sens pas légitime à juger, jauger ou estimer leur pertinence...
Encore un mot...
“L’humour à froid est l’arme du film pour aborder les événements avec distance : piquant, âpre, décapant – désespéré aussi – tout au long du film, souvent en plein cœur de la tragédie. Sûrement parce que c’est dans ces moments qu’il est indispensable.
Le film s’attache à la routine de ceux qui travaillent là où rien n’est routinier. Il évoque les forces et les faiblesses de ces travailleurs, leurs erreurs, leurs décisions, leurs petits malheurs. Sans jamais perdre de vue que l’héroïsme est lié à l’effort consenti plus qu’aux seuls actes”. Fernando Leon de Aranoal.
Le bilan est très simple à faire: le réalisateur tient absolument toutes ses promesses.
Une phrase
- “Ta maison est partout où on a besoin de toi.” Mambru à B.
L'auteur
Né le 26 mai 1968 à Madrid, Fernando Leon de Aranoa suit des études en "sciences de l'images" à l’Université Complutense. A sa sortie, il écrit pour la télévision et pour des humoristes puis pour ses propres films, à commencer par le court Sirenas, en 1994. En 1996, il réalise son premier long métrage, Familia, quiraconte la journée d'anniversaire d'un quinquagénaire rêvant d'une famille parfaite (Goya du meilleur “révélation réalisateur”). Il sort en France deux ans plus tard après avoir été adapté et joué au théâtre en Espagne. Survient la consécration internationale en 2002 avec Les lundis au soleil (Los lunes al sol), l’histoire de deux chômeurs galiciens qui perdent l’espoir de rebondir. Pour la première fois, Fernando Leon de Aranoa a recours à deux acteurs très célèbres : Javier Bardem et Luis Tosar. Parmi les dizaines de prix qu’il reçoit, citons la Coquille d'or à Saint Sébastien, le prix Jules-Verne à Nantes, et cinq Goya à Madrid. Il enchaîne avec Princessas et Amador, primés dans de nombreux festivals et par l’Académie Espagnole du Cinéma.
Il publie aussi des recueils de nouvelles et signe deux documentaires: Caminantes (2001), qui traite de la marche des zapatistes jusqu'à Mexico (primé à La Havane, New York et Los Angeles); et le segment “Buenas noches, Ouma", deInvisibles (2007), projet commun avec Mariano Barroso, Isabel Coixet, Javier Corcuera et Wim Wenders, Goya du meilleur documentaire. A Perfect Day est son sixième long métrage de fiction.
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