A peine j'ouvre les yeux

Révélateur, émouvant, et prometteur
De
Leyla Bouzid
Drame
Avec
Baya Medhaffar, Ghalia Benali, Montassar Ayari, Aymen Omrani Lassaad Jamoussi, Youness Fehri.
Notre recommandation
4/5

Infos & réservation

Thème

A Tunis, dans l' été 2010, juste avant la Révolution, Farah, 18 ans, lutte pour chanter avec son groupe de rock, se libérer de l’étreinte familiale et vivre ses premières amours avec le leader des musiciens. Un rappel bienvenu, minutieux et essentiel sur la peur paranoïaque et l’univers dictatorial que vivait la Tunisie de Ben Ali.

Points forts

- La découverte, à travers l’épatante Baya Medhaffar, de la pulsion vitale qui animait une jeunesse étouffée par le régime.

- Le rappel que la révolte couvait déjà en 2008 dans les mines de phosphate du désert tunisien. Un fait peu connu mais édifiant.

- La schizophrénie de la société tunisienne est subtilement rendue par la façon dont la réalisatrice oppose ,d’un côté, l’angoisse quasi hystérique de la mère ainsi que la menace permanente de la police et, de l’autre, la sensualité et l’envie de liberté qu’incarne le lien les deux jeunes amoureux.

- Les chansons du film, écrites par Khyam Allami, le leader d’Alif ensemble, collent parfaitement au récit et sont remarquables.

- L’exploration des bas-fonds de la ville, sa vie nocturne, ses bars, etc. apporte une touche judicieuse tout comme l’incursion dans le désert.

- La scène finale où la mère (Ghalia Benali), chanteuse très connue et aimée en Tunisie, pousse enfin sa fille à assumer son désir. Scène par ailleurs réelle, qui s’est déroulée durant le casting !

Quelques réserves

On peut regretter que Leyla Bouzid ait ôté toute référence religieuse, dans le but de “rester à hauteur de l’héroïne”. C’est oublier que les religieux étaient eux aussi pourchassés et intégrés au peuple, d’où leur influence; et partant de là, s’inscrivaient dans le “décor”.

Encore un mot...

Alors qu’elle tournait ce beau film, émouvant, prometteur et éclairant la situation de la Tunisie d’aujourd’hui, la réalisatrice aconstaté que les Tunisiens avaient quasiment tout oublié de la peur et de l’ambiance paranoïaque qu’ils avaient vécues sous les Ben Ali. 

Ce film mérite vraiment les récompenses qu'il a obtenues: Prix du Public et Label Europa Cinemas (Venise), Bayard d’Or du meilleur 1er film (Namur).

Une phrase

- “J’espère que j’aurai tes rêves. Je te les rappellerai.” Mahmoud à sa femme.

- “On a tous des ennuis. Sinon à quoi servirait la musique ?” Borhene, le leader du groupe et petit ami de Farah.

L'auteur

Née à Tunis en 1984, Leyla Bouzid quitte son pays pour venir étudier la littérature française à Paris et intègre la Fémis section réalisation. Pour sa fin d’études, elle tourne Soubresauts(Mikhobbi Fi Kobba), à Tunis, peu avant la Révolution, puisZakaria, dans le Sud de la France. A peine j’ouvre les yeuxest son premier long-métrage.

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