PEGGY SUE S’EST MARIÉE
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Thème
1985. Mère de deux enfants, Peggy Sue Bodell est en plein naufrage sentimental. Charlie, son rocker de mari et elle sont en instance de divorce. Lors d’un gala réunissant d’anciens élèves de son lycée, Peggy est élue reine de la soirée. Mais lorsqu’elle aperçoit Charlie dans l’assemblée, elle s’évanouit, dépassée par son émotion. Quand elle se réveille, elle est à l’infirmerie, 25 ans en arrière, l’époque où alors toute jeune fille, elle était tombée amoureuse de Charlie… Peggy va retraverser ses années lycée avec…la maturité d’une femme de 40 ans!
Points forts
Le charme de cette comédie irriguée de jeunesse et de nostalgie. On y trouve une célébration mélancolique de ces temps où tout pouvait advenir, qui ne sont plus, n’adviendront plus jamais.
Coppola s’amuse à nous rappeler qu’au fond nos vies d’adulte ne sont jamais que le résultat des décisions, grandes ou petites, que nous avons prises au cours de notre adolescence, sans soupçonner jamais leur importance future.
La reconstitution des Sixties dans laquelle on comprend que le réalisateur a mis beaucoup de ses souvenirs personnels.
L’interprétation portée par un casting sans faille, où brillent un Nicolas Cage étonnant de liberté (par moments, quand même, un peu trop en roue libre) et une Kathleen Turner épatante, aussi charmante que touchante. Un casting d’où émerge aussi, dans l’un de ses tous premiers rôles, un Jim Carrey à la présence déjà très forte, malgré sa jeunesse.
La musique, délicieuse, signée John Barry et qui est accompagnée par quelques standards des années 60.
Quelques réserves
Le charme patiné de cette comédie agit de la première à la dernière image.
Encore un mot...
Le propre des grands artistes est d’arriver à « signer » les œuvres qu’on leur commande. S’il fallait une preuve supplémentaire que Francis Ford Coppola est de ceux-là, on pourrait la trouver dans ce film que le cinéaste accepta pour éponger ses dettes. Bien que le budget en ait été modeste et le sujet, finalement, assez intimiste, on reconnaît dans ce Peggy Sue s’est mariée la patte de l’Américain, non seulement réalisateur hors norme mais artiste sensible aussi, hanté par les questions de l'innocence perdue et de la nostalgie. Quand on regarde ce film, dont Carlotta Films propose aujourd’hui une réédition en version restaurée, il est impossible de ne pas penser à Camille redouble, que Noémie Lvovsky tourna en 2012. Peut-être, justement en hommage à son aîné américain.
Une phrase
« Coppola, c’est quelqu’un qui s’est souvent mis en danger économiquement, financièrement. On pourrait le comparer à tous ces cinéastes un peu fous, un peu « bigger than life », à certains grands hommes de la Renaissance aussi, à de grands artistes comme Léonard de Vinci qui, en quelque sorte, était une sorte de touche à tout. Je crois qu’il y a chez Coppola un désir de cet ordre là, d’être sur plusieurs fronts à la fois » ( Nicolas Saada, journaliste aux Cahiers du Cinéma).
L'auteur
A la fois réalisateur, producteur, scénariste et distributeur, Francis Ford Coppola, né le 7 avril 1939 à Detroit dans le Michigan, est aujourd’hui l’une des figures les plus légendaires du cinéma américain.
Bien que souffrant, enfant, d’une poliomyélite qui le tient le plus souvent alité, il commence, à dix ans, à tourner des films d’amateur. Ayant songé un temps à devenir dramaturge, il optera quand même définitivement pour le cinéma après avoir assisté à une projection d’Octobre d’Eisenstein..
C’est au début des années 60 qu’il entame vraiment sa carrière professionnelle, avec, notamment, Dementia 13 et Broadway Finian’s Rainbow. En 1969, il fonde à San Francisco avec son ami George Lucas les studios American Zoetrope. Si en 1971, il gagne un Oscar pour le scénario de Patton, il ne conquiert sa réputation de grand réalisateur qu’après avoir dirigé les deux premiers volets du Parrain, récompensés tous les deux par l’Oscar du meilleur film .
Pendant quelques années, malgré quelques échecs (dont Gatsby le Magnifique), le réalisateur, qui n’aime rien tant que jouer à pile ou face, ne quitte plus jamais longtemps le devant de la scène ciné, recueillant le plus gros succès critique de sa carrière en 1979 avec Apocalypse Now, qui dépeint la guerre du Vietnam avec un lyrisme inégalé.
Tout sera remis encore plusieurs fois en question, à cause de paris démesurés qui mèneront le cinéaste au bord de la faillite et de la folie. Mais comme le Phénix, il arrivera toujours à renaître de ses cendres, imposant son style, même dans des films de commande, comme Peggy Sue s’est mariée sorti en 1986.
L’année dernière, ce créateur si singulier, si éclectique et si infatigable a annoncé préparer un projet de longue date, Megalopolis.
En dehors de ses activités touchant au cinéma, Coppola, qui est le père de Sofia et Roman Coppola, est aussi vigneron, producteur de sauce tomate et d’huile d’olive, éditeur de magazines et hôtelier.
Bonus vidéo : Réparer le présent, analyse de Jean-Baptiste Thoret, historien du cinéma; bande-annonce originale.
Et aussi
- MON GRAND-PÈRE ET MOI de TIM HILL – Avec Robert De NIRO, Uma THURMAN, Rob RIGGLE…
Lorsque, du jour au lendemain, les parents de Peter lui demandent de déménager au grenier pour laisser sa chambre à son grand-père, veuf depuis peu, le petit garçon, qui a dix ans, voit rouge. Il décide de déclarer officiellement la guerre à son papy. Entre les deux belligérants, un pacte est conclu.Tous les coups sont permis, à condition de ne mettre en danger, ni leur propre vie, ni celle de leurs proches. Chacun constitue son équipe, Peter, fait appel à ses copains d’école, Ed, à ses deux plus vieux copains, des retraités restés aussi farceurs que potaches. Entre le grand-père et le petit-fils, ça va commencer fort, aucun des deux n’étant décidé perdre la partie…
Depuis Maman j’ai raté l’avion (1990), on n’avait plus eu beaucoup l’occasion de voir des comédies familiales «made in Hollywood» sur le grand écran. Délaissées au profit des films d’animation ou des blockbusters Marvel, on en avait presque oublié le plaisir enfantin qu’elles pouvaient donner, quand elles sont réussies, c’est-à-dire lorsqu’elles arrivent à faire rire, ensemble, grands et petits. C’est ce qui se produit avec Mon Grand-père et moi. Grâce à la drôlerie naïve de son scénario (l’amour vache entre un grand-père et son petit-fils), l’efficacité de sa réalisation et surtout son casting 5 étoiles. Robert De Niro, Uma Thurman et Christopher Walken en tête, les acteurs jouent comme des enfants farceurs. Leur plaisir de porter ce film est si contagieux qu’on en oublie (presque) la lourdeur de certaines répliques et le côté attendu de certains gags. A la fois tendre et potache, signé Tim Hill (le scénariste de Bob l’éponge), Mon Grand-père et moi est un DVD idéal pour un après-midi en famille. De 7 à 77 ans.
Recommandation : Bon
Sortie vidéo DVD – Editions Universal Pictures
Pas de bonus vidéo.
- MISS de RUBEN ALVES - Avec Alexandre WETTER, Pascale Arbillot, Isabelle Nanty, Thibault de Montalembert…
A 9 ans, Alex a un rêve : être élu un jour Miss France. Mais quinze ans plus tard, devenu orphelin, il stagne dans une vie monotone. Une rencontre imprévue va réveiller ce rêve oublié. Il décide alors de jouer le tout pour le tout et de se présenter au concours Miss France en cachant son identité. Au gré des étapes de ce concours sans merci, épaulé par une famille de cœur haute en couleurs, Alex va partir à la conquête du titre, de sa féminité et surtout de lui-même.
Pour son deuxième film, Ruben Alves (La Cage dorée) a choisi de signer une fable qui interroge les notions de «différence» et de féminité. Le sujet était casse-gueule. Si le cinéaste n’a pas su éviter tous les clichés, il a réussi à en tirer une comédie tendre et populaire qui ne tombe jamais ni dans le voyeurisme ni dans la grivoiserie. Son casting est formidable qui réunit, entre autres, un Thibault de Montalembert exceptionnel en travesti. Dans le rôle d’Alex, le mannequin androgyne Alexandre Wetter est lui aussi sensationnel, de justesse, d’émotion et de… beauté.
Sorti 8 jours avant le confinement du 30 octobre dernier, Miss avait vu sa carrière stoppée net. Espérons que son édition en DVD, et Blu-ray la relance. D’autant que son réalisateur avait courageusement résisté à l’appel (pourtant insistant) des plate-formes.
Recommandation : Bon.
Sortie vidéo DVD, Blu-ray – Editions Warner Bros
Bonus vidéo : 5 scènes coupées, bêtisier, galerie photos.
- JABBERWOCKY de TERRY GILLIAM - Avec Michael Palin, Annette Badland…
A la mort de son père, le jeune Dennis décide de tenter sa chance en ville dans l’espoir de conquérir le cœur de sa dulcinée Griselda restée au village. Pendant ce temps, un monstre surnommé Jabberwocky fait régner la terreur sur tout le pays. Face à la menace, le roi Bruno promet la moitié de son royaume et la main de sa fille à qui terrassera la bête…
Avec Jabberwocky, le futur réalisateur de Brazil et de Las Vegas Parano signait son premier film en solo, un premier opus dont il dit qu’il fut son «échappatoire» des Monty Python. Assez inexplicablement, cette fable fantastico-médiévale, aussi délirante que jubilatoire et inspirée du poème éponyme de Lewis Caroll, n’était jamais sortie en vidéo en France. La voici donc éditée en Blu-ray dans une sublime version restaurée 4K. Pour les fans du réalisateur, c’est un évènement. Pour ceux qui ne connaissent pas son univers, c’est une voie royale pour le découvrir.
Recommandation : Excellent
Sortie vidéo DVD, Blu-ray restauré 4K – Editions Carlotta Films
Bonus vidéo :
Jabberwocky bonne absurdité : le making of avec Terry Gilliam, Sandy Lieberson, Michael Palin et Annette Badland
Valerie Charlton : naissance d’un monstre comment la créatrice du monstre a été engagée, remerciée puis réengagée sur le film ; ouverture originale du film (celle de 1977)
Des croquis à l’écran : carnet de dessins réalisés par Terry Gilliam croisés avec les extraits auxquels ils font référence
Jabberwocky de Lewis Caroll : (le poème lu par les acteurs du film)
La bande-annonce originale (1977) et la bande-annonce 2019.
– LE CHARME DISCRET DE LA BOURGEOISIE de LUIS BUNUEL – Avec Fernando Rey, Delphine Seyrig, BULLE OGIER, Jean-Pierre CasselL…
- LE FANTÔME DE LA LIBERTÉ de LUIS BUNUEL - Avec Adriana Asti, Julien Bertheau, Jean-Claude Brialy, Michel Piccoli…
Mon premier (1972), qui est le trentième et antépénultième film du réalisateur espagnol, relate l’histoire de trois notables qui essaient de planifier un repas ensemble, mais qui, à cause d’évènements imprévus, aussi absurdes les uns que les autres, n’y arriveront jamais…
Mon second (1974), qui, pour sa part, est l’avant-dernier film du cinéaste, développe une histoire «abracadabrantesque» et surréaliste à partir de la lecture, à des bourgeois parisiens par leur bonne, d’un roman sur la guerre napoléonienne en Espagne…
Mis à part qu’ils ont été réalisés par le même homme, qu’ont en commun ces deux films dont le premier raconte l’histoire d’un dîner qui n’aura jamais lieu, et l’autre, après une première scène inspirée d’un tableau de Goya, est bâti selon le principe du « marabout -bout d’ficelle - selle de ch’val-etc », bien connu des enfants ? La réponse est qu’ils ont été scénarisés et dialogués par Jean-Claude Carrière, cet immense, prolifique et inclassable homme de lettres français disparu le 8 février dernier à l’âge de 89 ans.
Profiter de la re-sortie récente de ces deux films en DVD ( le 1er janvier dernier) pour rappeler à quel point le cinéaste espagnol et le «conteur» français (comme il aimait à se définir) furent inséparables pendant plus de 20 ans, après leur première rencontre en 1964 à Cannes. Les deux futurs complices en écriture avaient 38 ans d’écart. Mais quand on aime, on ne compte pas ! Leur différence d’âge ne leur posera jamais aucun problème. Partageant un même goût pour l’humour, la dérision, l’inattendu, l’insolite et le goût des…belles et bonnes choses, ils seront frères de plume. La fougue imaginative et provocatrice de l’un se nourrira de la créativité littéraire et poétique de l’autre, et vice versa.
Ensemble, le cinéaste et le scénariste coécriront six films, qui comptent parmi les meilleurs du réalisateur. Deux d’entre eux, Le charme discret de la bourgeoisie et Le Fantôme de la Liberté viennent donc de ressortir (séparément) en DVD, Blu-ray, accompagnés de bonus vidéo comprenant de passionnants entretiens avec l’écrivain récemment disparu. L’occasion de mesurer son apport à l’œuvre du réalisateur de Tristana (un des autres films qu’ils ont tous les deux co-scénarisés).
Recommandation : Excellents
Sorties DVD, Blu-ray – Editions Studio Canal.
Bonus vidéo : pour Le Fantôme de la liberté, un documentaire de Pierre-Henri Gibert intitulé Buñuel, la transgression des rêves et une interview de Jean-Claude Carrière. Pour Le Charme discret de la bourgeoisie, un documentaire de Luc Lagier intitulé Une promenade parmi les ombres, une analyse critique du Professeur Peter W. Evans (expert du cinéma espagnol) et une interview de Jean-Claude Carrière.
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