Patients
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Thème
C’est un film qui commence par une image surexposée et un peu floue : celle du plafond d’une chambre d’hôpital éclairée, crûment, au néon. Première vision, très réaliste, de quelqu’un qui vient d’ouvrir les yeux après une sorte de coma, que la lumière éblouit, qui « accommode » mal et ne peut bouger la tête….
Entièrement tourné au Centre de réadaptation de Coubert, en Seine et Marne, « Patients » va raconter la lente résurrection (morale) et la douloureuse rééducation (physique) de Benn. Un gamin qui, à vingt ans, s’est retrouvé comme « cloué » sur un lit, avec, pour seul horizon, du moins les premiers jours de son réveil, un plafond blafard. Comment surmonter « ça », ce coup dur, inimaginable même dans les pires cauchemars ?
On s’apprête à sortir son mouchoir. Contre toute attente, on va rire, parce que, dans le « quartier » jeunes d’un centre de rééducation, qu’on soit tétra, para ou trauma crânien, la vie et la gaité arrivent quand même à sourdre. Car vingt ans reste l’âge de toutes les bêtises, de toutes les séductions, de toutes les pulsions, de toutes les révoltes et de tous les emportements, même si votre corps vous enferme.
Dans ce film témoignage, le comique ne va pas cesser de désamorcer le tragique. On est face à des handicapés lourds, mais dès que les larmes montent aux yeux, le burlesque, ou l’auto-dérision ou le cocasse vont les empêcher de couler.
Points forts
Dans une de ses interviews, Grand Corps Malade dit que son film culte est « La Vie est belle » de Roberto Benigni, parce qu’il traite d’un sujet grave (la Shoah) avec beaucoup d’auto-dérision, d’humour et de cynisme. C’est exactement dans cet esprit que le slameur-auteur-réalisateur a conçu ce « Patients », tiré de sa propre vie. S’il ne cache rien de ce que furent ses souffrances (physiques et morales) pendant sa rééducation, il réussit à les évoquer avec ce sens de la distanciation qui apporte humour et élégance au pires situations. Malgré son sujet et son cadre, son « Patients » échappe donc au pathos, au misérabilisme et au nombrilisme. De la part d’un cinéaste qui signe son premier film sur un sujet pareil, c’est un joli tour de force !
Inutile de chercher : « Patients » ne ressemble à aucun autre film traitant du handicap. Grand Corps Malade et son co-réalisateur, Mehdi Idir, ont trouvé, comme des grands, la « forme » et le style de leur film. Ils l’ont entièrement tourné du point de vue de son héros.
Et ce héros, Ben, est doté d’un solide sens de l’humour et de la formule. Ses réflexions sur les aberrations kafkaïennes du système hospitalier, ses vannes avec ses copains, ses conversations avec ses parents et ses échanges avec son kiné, en témoignent tout au long du film. Les dialogues de « Patients » ont été écrits au cordeau de l’efficacité.
Il faut dire que ces dialogues sont portés par des acteurs exceptionnels. Notamment Pablo Pauly qui incarne Ben. Regard goguenard, justesse de ton incroyable, photogénie aussi, le jeune comédien, qu’on avait découvert dans « Discount », crève l’écran.
Quelques réserves
Franchement, je n’en vois pas.
Encore un mot...
Avoir, à vingt ans, un accident dont on vous dit qu’il peut vous laisser grabataire jusqu’à la fin de votre vie… et puis, malgré les mauvais augures, réussir à se remettre debout et à remarcher…. Grand Corps Malade voulait absolument dire qu’il est, parfois, possible de s’en sortir.
Il voulait aussi , par le biais de ce témoignage, rendre hommage à tous ceux qui, personnels soignants et « poteaux » d’infortune, l’avaient aidé à s’échapper de cet enfer de l’immobilité, puisque cette histoire là, ce fut sa propre histoire. Un livre, d’abord, puis ce film, tourné dans le centre de réadaptation fonctionnelle, où l’ancien sportif réapprit à vivre.
Oscillant entre humour et émotion, cynisme et compassion, cocasserie et impudence, ce « Patients » éclaboussé de lumière, réalisé avec un sens étonnant du cadrage, donne un peps inespéré. Même si on en sort le cœur noué, (parce que, quand même, ce qui est montré là est terrible), il se reçoit comme une formidable leçon de vie, de dignité et de courage.
Il est rare que la comédie tutoie le drame, à cette hauteur là, avec cette simplicité là.
Une phrase
« J’aimerais avant tout que les spectateurs se réjouissent de découvrir de nouveaux acteurs, qu’ils retiennent leur nom, et que le film puisse modifier leur regard sur le handicap. Même si l’effet ne dure qu’un temps ».
Grand Corps Malade
L'auteur
C’est un jeune homme qui voulait devenir basketteur professionnel, et qui, ses rêves brisés à la suite d’un terrible accident, va réussir à survivre en devenant « artiste ».
De son vrai nom Fabien Marsaud, celui que l’on connaît sous le pseudo de Grand Corps Malade est né le 31 juillet 1977 au Blanc Mesnil en Seine-Saint Denis dans une famille aisée. Grand ( I,96m), longiligne, sportif, il se passionne très tôt pour le basket, et après le bac, passe un diplôme d’études universitaires générales en Sciences et techniques des activités physiques et sportives. Le 16 juillet 1997, il plonge dans une piscine dont le niveau d’eau est insuffisant. Il se fracture une vertèbre et se réveille tétraplégique. On lui annonce qu’il ne pourra sans doute plus marcher.
Mais le jeune homme de vingt ans va se battre, retrouver une certaine mobilité, obtenir un diplôme d’études supérieures spécialisées de management sportif et entrer au service marketing du Stade de France.
Parallèlement, il va écrire et slamer. En 2006, son premier album, « Midi 20 », lui vaut un début de notoriété. Au fil de la sortie de nouveaux albums dont « Enfant de la ville » en 2008 , « Troisième temps » en 2010, cette notoriété ne cessera plus de croitre.
En 2012, dans un livre qu’il intitule « Patients », le slameur décide de revenir sur son accident et son combat pour retrouver sa mobilité.
C’est ce livre qui donne, aujourd’hui, ce film éponyme. Grand Corps Malade, qui est resté un homme d’équipe, en cosigne le scénario avec Fadette Drouard, et la réalisation avec Mehdi Idir, l’auteur de ses clips musicaux.
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