Nous finirons ensemble
9 ans après "Les petits mouchoirs", on retrouve la même bande dans "Nous finirons ensemble". Film plus "dur"sur des désormais quadras à qui la vie ne fait pas beaucoup de cadeaux et qui n'en font pas beaucoup non plus. Un cinéma vérité mais qui sait rester ludique, chaleureux et brillant.
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Thème
Au bord de la faillite, le moral complètement à plat à la veille de ses soixante ans, Max (François Cluzet), est parti se ressourcer dans sa maison du cap Ferret avec sa nouvelle compagne, Sabine (Clémentine Baert). Et soudain, sans avoir prévenu, sa bande de copains qu'il n'a pas vue depuis plus de trois ans, débarque pour lui fêter son anniversaire. Max s'étonne, râle, tempête et s'effondre... intérieurement. Il a mis sa maison en vente, a prévu de la faire visiter, mais pas question de le dire aux copains qui ne savent rien du désastre de sa situation financière.
Va débuter un week-end de dupes et de faux semblants où chacun va s'amuser, du moins au début, à jouer la comédie du bonheur de ces retrouvailles, alors que chacun (ou presque) trimballe des galères...
Deux heures et seize minutes plus tard, on aura assisté, parfois dans de grands éclats de rire, parfois au bord des larmes, à un (beau) film choral sur les grandeurs et les vicissitudes de l'amitié.
Points forts
- Neuf ans après, Guillaume Canet a eu envie de réunir de nouveau les personnages des Petits mouchoirs. On ne peut pas parler de « suite », car le laps de temps qui s'est écoulé entre les deux films ne l'autorise pas. C'est plutôt comme si le cinéaste avait eu soudain besoin de faire le point avec d'anciens amis ; amis qui certes, s'étaient entredéchirés, mais qui, surtout, s'étaient beaucoup aimés.
- C'est une belle idée car, entre trente et quarante ans, les individus évoluent, dans leur rapport à eux-mêmes, et dans leur relation aux autres. En général, ils sont plus mûrs, et surtout plus cash. Leur vie est encore devant eux, mais ils ont moins envie de faire des concessions. « Je t'aime comme tu es, mais toi, tu me prends aussi comme je suis ». Chez les quadra, compassion, compréhension, et vérité, même cruelle, font souvent bon ménage. Pour y être passé, le scénariste Guillaume Canet savait de quoi il allait parler, et surtout, comment. Si son film sonne si juste et si vrai, c'est sûrement parce qu'il y a mis beaucoup de son propre vécu.
- Comme on est dans une fiction, il a truffé son scénario de coups de théâtre, de chassés croisés et de rebondissements de toutes natures. Il se passe toujours quelque chose dans ce Nous finirons ensemble, mais toujours quelque chose d'ancré dans une possible réalité. Ce qui, forcément, rend ses personnages attachants et a pour conséquence de déclencher une foule de sentiments divers, voire contradictoires, chez nous, les spectateurs, qui les regardons s'ébattre le temps d'un week-end.
- Evidemment, on retrouve ici les comédiens qui avaient beaucoup contribué au phénoménal succès populaire des Petits Mouchoirs. François Cluzet, Marion Cotillard, Gilles Lellouche, Laurent Lafitte, Benoît Magimel, Valérie Bonneton... Mais de nouveaux sont arrivés comme Clémentine Baert et José Garcia. Leur plaisir à jouer ensemble est tel qu'on n'aurait pu trouver mieux pour ce film, qui au fond, ne semble avoir d'autre objectif que celui de célébrer l'amitié, la vraie, celle qui résiste aux pires coups de gueule et aux plus profonds désaccords.
- Dans ce nouvel opus, il y a les mots, plus resserrés, plus efficaces encore que dans les Petits Mouchoirs et il y a, également, l'image, plus forte, plus belle et plus "chiadée", et qui pour l'œil, est un régal. Il faut dire que la photogénie du cap Ferret n'est pas pour rien dans ce festin visuel....
Quelques réserves
- 135 minutes exclusivement consacrées aux péripéties d'une bande de copains en week-end: forcément, sur la quantité, certaines paraissent un peu longuettes ou superflues. Mais elle sont si peu nombreuses qu'au final, elles n'altèrent pas la dynamique du film.
Encore un mot...
La maturité et l'expérience vont bien à Guillaume Canet. Plus le temps passe et plus ses films sont aboutis, à la fois plus profonds, plus ludiques, visuellement plus fluides, plus brillants. Peut être que « la bande » de Guillaume finira ensemble, comme il l'est annoncé dans le titre. Mais nous on se dit qu'on aimerait bien, mettons dans une dizaine d'années, le vérifier.
Une phrase
« Le titre m'est venu de deux films qui ont beaucoup compté pour moi : Nous ne vieillirons pas ensemble de Maurice Pialat et Nous irons tous au Paradis d'Yves Robert. Nous finirons ensemble n'est pas vraiment une suite aux Petits Mouchoirs. C'est un film à part entière. Simplement on y retrouve les mêmes personnages, dont certains ont beaucoup changé. Nous finirons ensemble est beaucoup plus cynique que Les Petits mouchoirs: on dit les vérités en face au lieu de les taire » (Guillaume Canet scénariste-réalisateur).
L'auteur
Né le 10 avril 1973 à Boulogne-Billancourt, Guillaume Canet est un acteur, réalisateur, scénariste et producteur français.
Ses parents étant éleveurs de chevaux à Rambouillet, il commence par vouloir devenir cavalier de saut. A dix huit ans, une mauvaise chute l'oblige à tourner casaque. Il se tourne alors vers son autre passion, l'art dramatique, s'inscrit au Cours Florent, puis se fait remarquer au théâtre dans La Ville dont le Prince est un enfant.
En 1995, après plusieurs téléfilms, il fait sa première apparition au cinéma, dans un court-métrage, Le Fils unique de Philippe Landoulsi. Deux ans après, il joue dans son premier long, Barracuda, un thriller de Philippe Haïm dans lequel il donne la réplique à Jean Rochefort. La même année, il est nommé pour le César du meilleur espoir masculin pour En plein cœur de Pierre Jolivet. En 2000, il part tourner La Plage de Danny Boyle, avec comme partenaire Leonardo DiCaprio.
Il va continuer à « faire l'acteur », mais, parallèlement, il se lance dans la réalisation. D'abord avec plusieurs courts, puis en 2002, avec un premier long Mon Idole qui fera plus de 500.000 entrées. Il reprend ensuite son métier de comédien (Jeux d'enfants, Narco, Joyeux Noël, etc ...) jusqu'en 2006, où il réalise Ne le dis à personne avec François Cluzet, qui connait un succès international. En 2010, il scénarise et met en scène Les Petits mouchoirs, l'histoire d'une bande de copains à laquelle participe ses amis acteurs, dont François Cluzet, Gilles Lellouche, Jean Dujardin... Malgré la tiédeur de la critique, le film réalise la seconde performance de l'année derrière Harry Potter, presque 5,5 millions d'entrées. Suivent, en 2013, Blood Ties et en 2017, Rock'n'Roll.
Suite sans vraiment l'être des Petits Mouchoirs, Nous finirons ensemble est le sixième long métrage de ce cinéaste qui est aussi, depuis longtemps, l'un des acteurs chéris du cinéma français, puisqu'il compte à son actif plus de 60 rôles. Côté vie privée, Guillaume Canet est marié à Marion Cotillard avec qui il a eu deux enfants.
Et aussi
- « Cœurs ennemis » de James Kent- avec Keira Knightley, Jason Clarke, Alexander Skarsgård...
En 1946, Lewis Morgan, officier supérieur de l'armée britannique, est chargé de la reconstruction de la ville de Hambourg qui a été dévastée par les bombardements. Le temps de sa mission, on lui assigne d'aller habiter, lui et sa femme, Rachel (qui l'a rejoint), une splendide demeure appartenant à un architecte allemand. La maison est scindée en deux: le propriétaire et sa jeune fille émigrent dans ses étages supérieurs, Rachel et Lewis, investissent, eux, son rez-de-chaussée. Les premiers temps, la cohabitation est difficile. Rachel éprouve de la méfiance pour celui qu'elle considère toujours comme un ennemi. Mais, petit à petit, ce rejet va faire place, chez la jeune femme, à un sentiment plus troublant. Un amour va se nouer sur les ruines de la guerre.
Adapté d'un best-seller de Rhidian Brook (Dans la maison de l'autre), ce Cœurs ennemis a un double mérite : celui de nous plonger dans une page d'Histoire encore peu exploitée au cinéma (la difficile reconstruction de l'Allemagne après la défaite, sous le contrôle des Alliés) et celui de nous faire vivre une jolie histoire de triangle amoureux.
Le manque d'aspérité de ce film (pourtant très élégant), signé du britannique James Kent, est compensé par la qualité d'interprétation des ses trois acteurs principaux. Notamment Keira Knightley, – vue récemment dans Colette –, qui joue ici les femmes amoureuses avec une superbe retenue.
Recommandation : bon
- « 68, mon père et les clous » de Samuel Bigiaoui - Documentaire.
Dans les années 60 et 70, Jean Bigiaoui est un militant maoïste très actif, un pilier de la Gauche Prolétarienne. Un temps, il devient aussi l'assistant de Joris Ivens, l'un des grands noms du documentaire. Et puis, tout d'un coup, à presque 40 ans, parce qu'il a également besoin de travail manuel, cet intello pur jus laisse tout tomber. Il ouvre « Bricomonge », un magasin de bricolage, où entre autres, il va pouvoir vendre des clous. Sa boutique devient vite une sorte d'agora du quartier, le salon de tous les bricolos du coin, des plus orfèvres en la matière, aux plus calamiteux. En 2012, c'est la débâcle financière, et Jean doit mettre la clef sous la porte. La fermeture de « Bricomonge » sonne la fin d'une époque.
Pendant les années où la boutique turbine à tout va, le fils de Jean, Samuel commence à filmer son père, les clients, les employés, les simples visiteurs. Comme ça, pour le fun, sans objectif précis. Le jour où son père lui apprend la mise en vente du magasin, le cinéaste amateur se met à filmer de façon acharnée, fait parler ceux qui fréquentent le magasin ou y travaillent. Son père se confie, philosophe entre deux ventes. Samuel amasse petit à petit de la matière pour un documentaire. Le voici. C'est un petit bijou d'humour et de nostalgie, un « précipité » d'humanisme et de douceur.
Recommandation : excellent
- « Gloria Bell » de Sebastián Lelio- Avec Julian Moore, John Turturro
Divorcée depuis plusieurs années, Gloria (Julian Moore) est devenue, à cinquante ans, une femme lumineuse et indépendante qui va s'étourdir, la nuit, dans les dancings pour célibataires de Los Angeles. Un jour sa route croise celle d'Arnold. Son cœur s'emballe, son corps défaille, d'autant plus qu'Arnold prétend être libre. Ce qui, assez vite, s'avèrera inexact. Passé le temps (incompressible) du chagrin, mêlé de colère, Gloria va se découvrir une force insoupçonnée qui lui permet de comprendre qu'elle peut désormais s'épanouir comme jamais avant...
Cette histoire vous dit quelque chose? Normal! elle est celle de Gloria, que le cinéaste chilien Sebastián Lelio avait tournée en 2013. L'actrice Julian Moore qui l'avait vue projetée au Festival de Berlin a demandé au cinéaste de lui en écrire un remake.
Le risque était que cette nouvelle version ne soit qu' une pâle copie de l'original. Elle est tout aussi formidable. Ecriture ciselée, réalisation d'une fluidité remarquable et surtout interprétation impeccable. Dans son rôle de mec englué dans son passé et son indécision, John Turturro nous ferait pleurer de compassion. Quant à Julian Moore, sensibilité à fleur de peau et liberté de jeu incroyable, elle trouve là l'un de ses meilleurs rôles, porte parole de ces femmes de la cinquantaine qui, malgré leur solitude, ne veulent renoncer ni à la vie, ni au bonheur.
Recommandation : excellent
- « Her Job » de Nikos Labôt - Avec Marisha Triantafyllidou, Dimitris Imellos...
De nos jours, à Athènes. Mère de famille illettrée, Panayiota est complètement sous la coupe de son macho de mari et de ses tyrans d' enfants. Crise oblige, son mari étant au chômage, cette femme soumise, sans aucune autonomie ni reconnaissance, va se mettre à la recherche d'un emploi. Un centre commercial recherche des femmes de ménage. Elle décroche un des postes. Elle ne s'en rend pas compte, mais c'est le début d'une autre aliénation. Elle va découvrir l'injustice sociale. En contrepartie, elle va connaître les joies de la solidarité féminine...
Inspiré d'une histoire vraie, filmé sans pathos, avec une grande simplicité et une belle efficacité, Her Job est une chronique édifiante sur la dure réalité du monde du travail en Grèce, surtout pour ceux qui sont en bas de l'échelle sociale. C'est aussi un émouvant portrait d'une femme qui croyait, comme beaucoup, aux vertus émancipatrices du travail. Il est défendu ici par Marisha Triantafyllidou, une comédienne formidable.
Recommandation : bon
- « Coming Out » de Denis Parrot - Documentaire.
Quelques mots souvent bredouillés, parfois « balancés », avec ou sans témoin... Depuis quelques années, de plus en plus de jeunes gays, lesbiennes, bi ou « trans » choisissent les vidéos sur Internet pour faire leur « coming out ». Avec plus ou moins de maladresse, tous disent leur souffrance de vivre leur différence face à leur famille. Une souffrance parfois si insoutenable qu'elle a pu insuffler, aux plus fragiles, l'idée de suicide.
Le réalisateur français Denis Parrot, qui a visionné plus de 1000 témoignages venus du monde entier entre 2012 et 2018, a eu l'idée d'en réaliser une compilation. Cela donne ce documentaire, souvent poignant ou bouleversant. Réalisé sans aucun commentaire, il a pour mérite de dresser un état des lieux de « la différence » aujourd'hui. Le constat est édifiant.
Recommandation : bon
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