Making of

Une comédie qui raconte le tournage d’un film social qui va virer au désastre. Formidablement bien mis en scène, drôlissime, mais pas seulement…
De
Cédric Kahn
Avec
Denis Podalydès, Jonathan Cohen, Stefan Crepon, Emmanuelle Bercot…
Notre recommandation
4/5

Infos & réservation

Thème

Simon, réalisateur aguerri (Denis Podalydès) débute le tournage d’un film racontant le combat d’ouvriers pour sauver leur usine, un combat  dramatique reconstitué à partir d’une histoire vraie. Mais malgré son expérience, entre les magouilles de son producteur (Xavier Beauvois), les râleries de ses techniciens, à cran pour cause d’heures sup non payées, et les pétages de plomb de  son acteur principal à l’ego surdimensionné (Jonathan Cohen), Simon va être vite dépassé par les évènements. Bientôt abandonné par ses financiers, au bord du burn out, il va en plus devoir affronter un conflit social avec sa propre équipe. Sur ce tournage, qui va partir en sucette, son seul allié sera Joseph, un jeune figurant fou de ciné à qui il a confié le making of de son film (Stefan Crepon)…

Points forts

  • De Chantons sous la pluie à  La Nuit Américaine en passant par Les Ensorcelés et Mulholland drive, Le Mépris, ou le récent Ça tourne à Séoul, la liste est longue des films qui ont raconté ce qui peut se passer sur un tournage : engueulades, histoires d’amour, jalousies, vacheries… La singularité de Making of est qu’il montre le 7° art, non  sous l’angle d’une machine à fabriquer les rêves, mais en tant que travail : il scrute essentiellement les rapports sociaux qui se créent sur un plateau. Pour y arriver le cinéaste a eu l’idée de  fabriquer un chaos sur le tournage d’un film dont le thème est un combat social entre des ouvriers qui veulent conserver leur usine et leur direction qui veut la brader parce qu’elle ne rapporte plus assez. Idée lumineuse puisqu’on va vite comprendre, à la faveur de sa désorganisation, qu’un tournage fonctionne en fait comme une usine, qu’il est un endroit où, quand l’esprit d’équipe éclate, les frictions entre les uns et les autres peuvent être violentes. « J’avais envie, explique Cédric Kahn, de faire un film politique, social, humain, sur le cinéma ».
  •  « Un film drôle aussi » ajoute-t-il. Et de ce  point de vue là son objectif est également atteint. Bourré de personnages  inénarrables et hauts en couleurs,  Making of est une comédie hilarante. D’autant plus qu’elle est portée  par une distribution de haute volée : Denis Podalydès est désespérément drôle dans son rôle de réalisateur submergé par les emmerdements, Jonathan Cohen, génialement  jubilatoire dans son personnage d’acteur égocentré et mégalo, Stefan Crepon formidable dans celui d’un cameraman débutant chargé malgré lui du making of… 

Quelques réserves

Une ou deux baisses de régime qui n’entament toutefois pas la réussite du film.

Encore un mot...

Décidément  Cédric Kahn est dans une forme cinématographique éblouissante…
Après le dramatique Procès Goldman sorti en septembre dernier, le prolifique Cédric Kahn est déjà de retour sur les écrans, et avec un autre très grand film. Making of est une comédie aussi désopilante que  passionnante : sous le prétexte de nous faire gondoler avec les coulisses d’un tournage catastrophe, elle en profite pour dresser un état des lieux de la création cinématographique française. Les idées reçues en prennent un sacré coup ! Vous pensiez que le cinéma est un milieu de nantis qui se la coulent douce en engrangeant des cachets royaux ? Après avoir vu  Making of  vous allez changer d’avis. Et en plus, vous vous serez bien amusé. Le sérieux sous le rire… Trop fort Cédric Kahn !

Une phrase

« Cela faisait très longtemps que je voulais parler de cinéma. C’est un milieu que j’ai eu l’occasion et le temps  d’observer et j’y vois des situations et des choses un peu folles qui s’y produisent au nom de la création…Depuis que j’ai 20 ans, ce sont toujours les mêmes choses qui me heurtent et m’émerveillent…En ce sens Making of est un projet ancien…Ce n’est pas un film sur le cinéma en tant qu’objet d’art ou de fantasme, mais sur le cinéma en tant que travail.Cette distinction est très importante pour moi. Beaucoup de choses que je raconte dans ce film pourraient sûrement se transposer ailleurs » ( Cédric Kahn, cinéaste).

L'auteur

Taraudé par le cinéma dès sa plus tendre enfance, Cédric Kahn, né le 17 juin 1966 dans la Drôme, monte à Paris, tout de suite après l’obtention de son bac. En quelques années, il parvient à se créer un chemin dans le milieu du cinéma. En 1986, il devient l’assistant du monteur Yann Dedet sur le film Sous le soleil de Satan de Maurice Pialat. Sa carrière s’accélère et se diversifie. Il signe son premier court métrage en 1989; son premier scénario (avec Brigitte Roüan) en 1990; son premier long métrage, Bar des rails (sélectionné pour Venise) en 1993, puis, en 1994, son deuxième long,  Trop de bonheur, qui lui vaudra le Prix Jean Vigo. Pour fuir l’étiquette de « cinéaste naturaliste » qu’on lui a tout de suite collée,  il va alors faire preuve d’un bel éclectisme dans le choix de ses sujets.

En 1998, il décroche le prix Louis Delluc pour LEnnui, tiré du livre de Moravia ; en 2001, il est sélectionné en compétition à Cannes pour Roberto Succo, inspiré par le parcours du tueur en série italien ; en 2004, c’est Feux rouges, un thriller adapté d’un roman de Simenon ; en 2005, lAvion, qui porte à l’écran une bande dessinée ; suivront Les Regrets, Une vie meilleure, Vie sauvage (avec  Mathieu Kassovitz), La Prière, pour lequel  le jeune Anthony Bajon obtiendra l’Ours d’Argent à Berlin en 2018. Après Fête de famille en 2019, le cinéaste, qui se fait de temps à autre acteur (Marche ou crève, lEconomie du couple, Noublie pas que tu vas mourir…) s’offrira un break de quatre ans. Un break bénéfique puisqu’en septembre dernier, son Procès Goldman, a (à juste titre) obtenu un beau succès critique et public. Logiquement, Making of, qui est son treizième long métrage, devrait recevoir le même type d’accueil .

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