L'Odyssée
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Thème
En 1948, Jacques-Yves Cousteau (Lambert Wilson), 38 ans, s’établit avec son épouse Simone (Audrey Tautou) et leurs deux garçons, Jean-Michel, 10 ans, et Philippe, 8 ans, dans une belle maison surplombant la Méditerranée, à Sanary, sur la Côte d’Azur. Officier de la marine, il a mis au point le premier scaphandre autonome pour respirer sous l’eau, invention qui lui permet l’achat de cette résidence où il ne va pas rester longtemps. Avec Simone, fille d’amiral qui ne rêve que de vivre sur un bateau, ils acquièrent la Calypso. Les voilà partis sur les mers du monde après avoir laissé leurs enfants en pension (l’un des aspects les moins sympathiques du grand bonhomme; il y en a d’autres dans ce film qui ne cache rien). C’est ainsi que démarre cette belle carrière de découvreur et de cinéaste des fonds marins. « Cousteau représente le dernier grand explorateur, dit Jérôme Salle, il a d’ailleurs découvert le dernier monde inconnu, le monde sous-marin ». Le cinéaste brosse un portrait à la fois public et intime de Cousteau, avec ses enfants qui deviendront ses adjoints, Philippe (Pierre Niney) qui mourra jeune dans un accident et Jean-Michel (Benjamin Lavernhe) qui l’accompagnera jusqu’à ce qu’une brouille les sépare. Seule, Simone, son épouse, restera jusqu’au bout sur la Calypso et en sera le vrai capitaine, son mari traversant souvent l’océan en avion à la recherche de fonds américains et aussi de conquêtes féminines (oui, ce film ne masque rien).
En fin de compte, « L’Odyssée » offre au spectateur un fabuleux périple qui se clôt dans l’Antarctique, dernier joyau que Cousteau offrira aux admirateurs de ses films documentaires et de ses séries télévisées.
Points forts
- Premier atout de « L’Odyssée », Lambert Wilson qui se spécialise, après l’Abbé Pierre, dans les icônes françaises. Il campe un personnage égocentrée et charismatique, capable de séduire les financiers américains les plus suspicieux pour réaliser des documentaires sur le monde alors inconnu des grands fonds marins. « Cousteau est un personnage égoïste et faible dans sa haine du conflit, sa fuite devant les tensions familiales ou professionnelles, souligne l’acteur, mais qui aurait pu vous convaincre de le suivre au bout du monde ou de sortir votre carnet de chèques pour financer ses projets ! ». Lambert Wilson sait montrer avec délicatesse les failles d’un personnage qui mène sa carrière à toute allure en se débrouillant comme il peut dans une vie privée brouillonne.
- Deuxième atout, Audrey Tautou qui endosse avec enthousiasme le rôle de première dame d’un homme très public tandis que l’épouse reste discrète tout en étant très présente. C’est elle qui pousse son mari à acquérir la Calypso. Elle en fait son repère, son royaume, son refuge quand l’homme de sa vie court le monde pour récolter de l’argent, elle est la patronne et c’est ainsi que l’équipage de la Calypso la considère. Lorsqu’elle découvre les trahisons de son compagnon, elle a les mêmes réactions dignes et colériques d’une Simone Signoret lisant dans un journal l’idylle de Montand et de Marilyn. Sûr qu’Audrey a pensé à Simone en composant ce rôle qui la hisse en haut de l’affiche.
- Jules Vernes des temps modernes, Cousteau n’a cessé de sillonner les mers. De la Croatie où la Méditerranée est restée intacte - telle que le commandant l’a connue - aux Bahamas, de l’Afrique du Sud à l’Antarctique, dernière grande exploration de Cousteau, le réalisateur a reconstitué ces fabuleux voyages qu’il offre au spectateur ébloui et conquis.
- La saga familiale de Cousteau est passionnante dans son humanité et sa fragilité. Un soir où il regarde les étoiles sur la plage méditerranéenne avec ses garçons, il leur dit : « le monde est immense et nous sommes tout petits, à son échelle, nous n’existons qu’une fraction de seconde ». Cet aspect-là du personnage est particulièrement réussi et émouvant.
- Et puis il y a la mort prématurée du fils préféré.
« Jan, la veuve de Philippe, le cadet, est venue sur le tournage, dit le réalisateur. Je l’avais rencontrée il y a trois ou quatre ans à Washington où elle vit. En la voyant pleurer près de quarante ans après la mort de son mari, j’avais trouvé son histoire d’amour et de vie tellement belle, que j’ai décidé de donner plus d’importance à Philippe dans le film… ».
Quelques réserves
La partie documentaire nous laisse un peu sur notre faim. Certes le tour du monde est fabuleux, on l’a dit. L’Antarctique est redoutable comme il se doit avec ses tempêtes incontrôlables. Mais le fond des mers est parfois décevant. Il n’y a pas foule devant la caméra… D’ailleurs le réalisateur avoue avoir numérisé des espèces aujourd’hui disparues, c’est dire…
Encore un mot...
Cousteau était aussi un grand cinéaste qui a connu son heure de gloire au Festival de Cannes en 1956 avec la palme d’or accordée au « Monde du silence », coréalisé avec Louis Malle. On lui a reproché le massacre des requins provoqué pour le film. Et son alliance d’un moment avec les entreprises pétrolières pour le financement de ses documentaires : il avait accepté de remplir le rôle de tête chercheuse dans de nouveaux gisements à détecter. Mais dès le début des années 1960, il a obtenu des scientifiques réunis à l’Institut océanographique de Monaco que l’on n’enfouisse pas les déchets nucléaires au fond de l’océan. Vers la fin de sa vie, il a fait adopter par l’ONU un moratoire qui protégeait l’Antarctique pendant cinquante ans. Et ce que dénoncent aujourd’hui les associations à propos de l’industrialisation, de la surpêche, du réchauffement climatique, tout avait été prédit par Cousteau.
Une phrase
- « Cousteau et l’Abbé Pierre ont successivement été numéro un et numéro deux du classement du Journal du Dimanche pendant des années ! Avec le recul, c’était beaucoup plus risqué de me faire jouer l’Abbé Pierre que Cousteau: j’étais trop jeune à l’époque, trop grand… Là, j’ai des points communs physionomiques avec le commandant, un côté grande bringue, le même genre de nez ». Lambert Wilson
- « Ce film nous a permis de voir de nos yeux toute la beauté du monde et les périls qui pèsent sur elle… » Audrey Tautou
- Cousteau, « Un homme extraordinaire. Je l’ai rencontré en 85 dans un colloque. Il nous a bouleversés en nous parlant de la souffrance des océans ».
Jean-Christophe Rufin, « Le parfum d’Adam »
L'auteur
Jérôme Salle, 49 ans, est l’homme des films à grande envergure comme « Largo Wintch » 1 et 2 (2008 et 2010) ainsi que « Zulu » (2013), film policier à grand spectacle dans l’Afrique du Sud au temps de l’Apartheid, projeté en clôture du 66e Festival de Cannes en 2013. Le cinéaste s’est fait connaître en 2005 avec un polar corsé, « Anthony Zimmer », qui bénéficiait d'une belle distribution -Sophie Marceau, Yvan Attal et Sami Frey- et qui a décroché une nomination aux Césars pour la meilleure première œuvre.
Son nouveau film, « L’Odyssée », dépasse en ampleur tous ses précédents.
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