La nouvelle vie de Paul Sneijder

Bienheureuse re-naissance
De
Thomas Vincent
Avec
Thierry Lhermitte, Géraldine Pailhas, Pierre Cursi, Guillaume Cyr
Notre recommandation
4/5

Infos & réservation

Thème

Paul Sneijder (Thierry Lhermitte), cadre supérieur dans une entreprise de Montréal, sort tout juste de l’hôpital à la suite d’un accident d’ascenseur. S’il s’en est tiré avec une jambe cassée, il a perdu sa fille aînée dans la catastrophe. Son épouse (Géraldine Pailhas) voit avec une inquiétude croissante Paul se retrancher dans un mutisme sans retour. Elle devient quasiment hystérique quand il décide de changer de vie. L’ex-cadre supérieur va sonner à la porte d’une entreprise canine pour un emploi de promeneur de chiens. Avantage : il sera toute la journée à l’extérieur et pourra oublier les ascenseurs meurtriers ; inconvénient : il devra ramasser les crottes, ce qui n’améliorera pas son image auprès de l’épouse acariâtre.

Points forts

- Pour qui aime les chiens, ces animaux qui aiment les humains avec autant d’aveuglement, ce film est un délice puisqu’on voit un homme se reconstruire à leur contact. Cette nouvelle occupation permet aussi à Paul de découvrir la nature après des années de vie au bureau.
 
- Le film a été tourné au milieu du fleuve Saint-Laurent, sur l’île des Sœurs, une banlieue chic de Montréal et une ville nouvelle pour nouveaux riches. « Une sorte de paradis standardisé, explique le réalisateur, avec de grosses villas façon “Desperate Housewives”. C’est un endroit très confortable mais sans âme ». À partir de ce lieu, on peut s’enfoncer dans la forêt, goûter au silence de l’hiver et au réveil du printemps.
 
- Un acteur existe surtout par la force de persuasion d’un metteur en scène. Et Thomas Vincent savait ce qu’il voulait faire avec Thierry Lhermitte. Le comédien est au plus haut de son art avec un jeu minimal. « Dès qu’il y avait une once d’ironie dans mon regard, il me l’enlevait », dit Thierry Lhermitte qui joue un homme éteint par le malheur mais pas complètement passif pour se laisser emporter.
 
- Ce film plaira aux amis des chiens et aussi aux amis des hommes. Il y en a deux qui viennent en aide à Paul: le patron de l’entreprise canine joué par un gros et grand acteur canadien dont le registre est d’habitude comique, Guillaume Cyr; et l’avocat des ascenseurs défaillants qui, paradoxalement, devient l’ami de Paul. C’est Pierre Curzi qui l’interprète, l’un des comédiens canadiens du fameux « Déclin de l’empire américain » (1985). On aimerait croiser ce genre d’homme intelligent et généreux quand tout vacille autour de soi.
 
- Enfin, il y a Géraldine Pailhas, que l’on voit plutôt, d'habitude, dans des rôles calmes et qui se transforme, ici, en mégère haut de gamme quand elle comprend que son mari dégringole avec application de l’échelle sociale où il était monté si haut. Elle est « une société anonyme à elle toute seule », ironise son mari pour la décrire. Et elle est capable du pire pour sauvegarder son statut. N’en disons pas plus.

Quelques réserves

Il y a peut-être des points faibles dans ce film. Nous laissons aux spectateurs le soin de les détecter. Pour notre part, nous aimons tant le propos et le nouveau Paul Sneijder que nous n’avons aucune volonté ni envie de les pointer.

Encore un mot...

Le scénario est adapté d’un roman de Jean-Paul Dubois qui a su saisir ce mal des grandes métropoles où l’homme des bureaux a perdu tout contact avec sa nature. Il faut une catastrophe pour remettre les choses à l’endroit. Et une intrigue de près de deux heures pour sauver un cadre supérieur en déroute. Ce film n’est pas un cri d’alarme : juste un constat. A nous, spectateurs, d’en goûter les leçons.

Une phrase

« L’ascenseur est une des incarnations de l’absurdité qu’il y a à empiler les gens les uns au-dessus des autres et à devoir construire des ascenseurs pour les faire monter. Mais le débat entre nature et contre-nature n’est pas ce qui m’obsède le plus. C’est l’idiotie managériale qui me heurte. Sneijder a été un agent de ça, un bon petit soldat, il s’est nié, il a nié sa fille, sa famille. Il a été un lâche, et l’histoire du film, c’est comment il se prend cette lâcheté en pleine face et comment il décide de se réformer. » Thomas Vincent

L'auteur

Thomas Vincent, 52 ans, né à Juvisy-sur-Orge, est le réalisateur d’une poignée de bons films comme « Karnaval » (1999), avec Sylvie Testud, qui a ébloui la critique en tant que premier film et séduit les spectateurs, « Je suis un assassin » (2004), avec François Cluzet et Karin Viard, ou encore « Le nouveau protocole » (2008), avec Clovis Cornillac et Marie-Josée Croze, qui faisait par avance écho aux accidents récents concernant des essais de médicaments.

L’hérédité doit un peu compter dans le talent du réalisateur puisqu’il est le fils de l’actrice, scénariste et réalisatrice Hélène Vincent et du metteur en scène de théâtre Jean-Pierre Vincent. Son nouveau film, « La nouvelle vie de Paul Sneijder », lui fait monter une marche supplémentaire vers le firmament des grands cinéastes.

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