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Thème
De nos jours, à Nancy, un début d’été…Sophie, dite Fifi, 15 ans, se retrouve coincée dans l’appartement HLM où elle vit toute l’année avec une famille aussi fauchée que chaotique et où, en tant que grande sœur, elle a la charge des « Petits ». Un jour, alors qu’elle raccompagne chez elle son amie Jade qui s’apprête à partir en vacances, elle en profite pour lui subtiliser en douce les clés de sa jolie maison du centre-ville, qui devrait être bientôt désertée et dans laquelle elle compte bien s’installer pendant ces mois de vacances.
A peine s’y est-elle posée, elle tombe sur Stéphane, 23 ans, le frère aîné de Jade, revenu de façon inattendue. Incroyablement, ce dernier, au lieu de la chasser, l’accueille avec chaleur, lui propose de revenir et lui offre même un petit job. Malgré leurs différences d’âge et de milieu social, une relation douce va se nouer entre elle, fille à la fois sage et délurée de la France d’en bas et lui, rejeton lunaire de bourgeois aisés….
Points forts
En matière de cinéma, la curiosité est parfois un joli défaut. La preuve avec ce film, qu’on aurait pu laisser sur le chemin, si l’on n’avait pas bien regardé son affiche en tête de laquelle, Céleste Brunnquell et Quentin Dolmaire. Ce film est le premier d’un jeune « couple » de cinéma venu du court métrage et donc inconnu dans l’univers du long. Quelle belle idée, Jeanne Azlan et Paul Saintillan (c’est leur nom) ont eue, de faire se rencontrer dans une circonstance un peu rocambolesque (le conte de fée n’est pas loin!) deux jeunes gens, une ado et un jeune homme pas tout-à -fait encore adulte, appartenant chacun à un milieu social différent. De nos jours, avec une entrée en matière pareille, d’autres scénaristes auraient embrayé sur le « spectaculaire », c’est-à-dire la bagarre ou les coups de théâtre. Ces deux-là nous embarquent au contraire dans une histoire décalée, simple et pourtant en rien « cul-cul », puisque mine de rien, les deux héros de cette chronique estivale abordent des thèmes sérieux comme la différence de milieu social, les interrogations sur l’avenir quand on est jeune aujourd’hui, etc…
Ce film est d’autant plus agréable à suivre qu’il est porté par deux comédiens exquis: Céleste Brunnquell, très jolie et charismatique, révélée en 2019 dans Les Éblouis de Sarah Suco et Quentin Dolmaire, nommé aux Césars 2015 dans la catégorie « Révélation » pour sa prestation dans Trois souvenirs de ma jeunesse d’Arnaud Desplechin. Ces deux jeunes acteurs forment un tendre duo qu’on n’oublie pas de sitôt, tant est grande leur subtilité de jeu, chacun dans leur registre : elle, délicieuse de naïveté et de maturité; lui plus sombre, plus lunaire, doux et singulier.
Quelques réserves
Il est difficile de reprocher quoi que ce soit à cette chronique adolescente douce, sensible et attendrissante, filmée en adéquation parfaite avec son contenu et son interprétation : sans esbroufe et avec délicatesse. Si on devait la comparer à une technique picturale, on pourrait dire qu’elle relève de celle de l’aquarelle…
Encore un mot...
Comment ne pas recommander ce film - d’inspiration autobiographique, nous dévoilent ses auteurs - qui nous replonge avec douceur, légèreté et bienveillance dans cette période de doute et en même temps d’espoir et de promesses que fut notre adolescence. On le recommande d’autant plus qu’il est merveilleusement interprété par deux comédiens dont les différences de jeu (elle, est lumineuse, lui, plus ténébreux) s’accordent comme rarement. Il y a longtemps qu’on n’avait pas vu un récit d’apprentissage doté d’un tel charme.
Une phrase
qui seront deux :
- « Il y a un aspect conte, dans ce film. On avait envie d’emmener nos personnages dans une espèce de rêve éveillé à deux. » (Jeanne Aslan).
- « On est assez complémentaires, Jeanne et moi…On a beaucoup réécrit le scénario. Au bout de cinq années d’écriture, on s’est rendu compte qu’on avait envie de faire le même film. Et après tout, comme on avait fait le scénario ensemble, pourquoi ne pas continuer ensemble et confronter nos envies à la mise en scène. » ( Paul Saintillan, cinéaste).
L'auteur
Née en Turquie, Jeanne Aslan passe sa jeunesse dans le Nord-Est de la France. Alors qu’elle est encore très jeune, le cinéma devient son refuge et son école. En 2004, elle réalise son premier court-métrage Jeux de mains (l’histoire d’une rencontre entre une manucure et un garagiste qui rêvait d’être pianiste), puis en 2011 son second, 20 ans et de la poussière.
Pour sa part, Paul Saintillan étudie les lettres et la philosophie avant d’intégrer la Fémis. En 2007, son film de fin d’études, Margot mise à nu est sélectionné dans de nombreux festivals dont Premiers Plans à Angers. En suivront d’autres, qui seront diffusés sur Arte et Canal +.
En 2017, le jeune réalisateur commence à écrire avec Jeanne Aslan ce qui va devenir, pour chacun, son premier long métrage, FIFI. Présenté dans de nombreux festivals, ce film en est presque toujours reparti avec un prix. Parmi eux, celui du meilleur film dans la section nouveaux réalisateurs de San Sebastian. Les cinéphiles attendent déjà le second long métrage que ce jeune couple de cinéastes est en train d’écrire.
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