EMPIRE OF LIGHT
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Thème
Année 1980. Dans la petite ville côtière de Margate au Nord de l’Angleterre, Hilary ( Olivia Colman) gère tant bien que mal L’Empire of Light, un cinéma du front de mer. Cette jeune quinquagénaire sort en effet d’une grave dépression, vit seule et subit les assauts sexuels répétés de son patron (Colin Firth), apparemment sans ressentir la moindre émotion. Un jour, un nouvel employé fait son entrée dans l’établissement. Il s’appelle Stephen. Il est jeune, beau, gentil, rêveur et ambitieux (il voudrait devenir architecte).
Pour la première fois depuis longtemps, Hilary est bouleversée. Elle, si fragilisée par sa maladie, va se rapprocher du jeune homme qui, noir, souffre du racisme si souvent violemment exprimé à cette époque-là dans le royaume de Grande Bretagne. Entre ces deux-là, va se nouer une jolie amitié (et même un peu plus), placée sous le signe d’un art qui, en les déconnectant du réel, va paradoxalement leur permettre de goûter de nouveau à la vie.
Points forts
- Comme Spielberg jusqu’à son The Fabelmans, Sam Mendes ne s’était encore jamais dévoilé dans ses films. Et puis, il y a eu la Covid, le confinement qui s’en est suivi, et le temps de réflexion qui l’accompagna. Privé de partenaire d’écriture, le réalisateur en profita pour rassembler ses souvenirs d’enfant aimant de sa mère, dévorée par une bipolarité, et d’ado cinéphile, fou amoureux de salles de ciné. Et, pour la première fois, il se mit à concocter, tout seul, un scénario, en hommage à l’une et en souvenir des autres, presque disparues aujourd’hui.
- Et voilà que sous la plume de cet immense metteur en scène de théâtre qui avait attendu d’avoir 35 ans pour se lancer dans le cinéma, naquit cette histoire qui mêle, audacieusement, l’intime ( les problèmes mentaux de sa mère) et le public (le cinéma), avec une générosité bouleversante.
- Comme à son habitude de grand directeur d’acteurs, Sam Mendes n’a laissé à personne le choix de sa distribution. Il a pris les meilleurs interprètes pour chacun de ses personnages. Exemples : il a confié à l’insurpassable Olivia Colman le soin de jouer Hilary - celle qui, dans son film, représente sa mère -, au très subtil Colin Firth celui d’être le libidineux propriétaire de l’Empire of light (en total contre-emploi) et, au très sexy et prometteur Michael Ward celui d’interpréter Stephen, celui qui fait succomber Hilary.
Quelques réserves
Sans son indéniable beauté plastique et l’esthétisme de ses cadres qui le cimentent magnifiquement, le film pourrait, par moments, donner l’impression de manquer de cohésion en raison du nombre de ses thèmes (la dépression, la solitude, le racisme, l’amour, etc…).
Encore un mot...
Quatre ans après son saisissant 1917, le réalisateur d’American Beauty (1999) livre son film à la fois le plus personnel et le plus nostalgique, puisqu’il évoque cette époque bénie où la magie du cinéma fonctionnait si bien qu’elle permettait d’oublier, le temps d’une projection, les blessures personnelles et les injustices sociétales et raciales. Porté par une distribution cinq étoiles, des images somptueuses (signées du génial Roger Deakins, elles ont décroché une nomination aux Oscars 2023 !), une construction impeccable, et aussi un propos qui sonne comme une ode à la fraternité, Empire of light a tout pour séduire les amoureux des salles obscures et du cinéma, avec un C majuscule. Poétique, nostalgique et splendidement raffiné.
Une phrase
« Je suis comme Stephen Frears : je fais des films à chaque fois très différents, sinon, je m’ennuierais; J’aime déstructurer ma manière de travailler… Un long métrage c’est un peu comme un train. Je descends d’un train, et je monte dans un autre train qui file dans une tout autre direction » ( Sam Mendes, Sud-Ouest, 26 février).
L'auteur
Après ses études à Cambridge, et avant de travailler essentiellement dans le cinéma, Sam Mendes, né Samuel Alexander Mendes le 1er août 1965 à Reading (Grande Bretagne), se tourne d’abord vers le théâtre. Il entre au Chichester Festival Theatre, puis à la Royal Shakespeare Company où il fait ses débuts de metteur en scène, en montant notamment Troïlus et Cressida et Richard III. En 1992, il devient le directeur artistique de la prestigieuse Donmar Warehouse de Londres où il crée, entre autres, La Ménagerie de verre, une adaptation scénique de Cabaret et la Chambre bleue, d’après Georges Simenon.
A la fin des années 90, il décide de passer derrière la caméra et tourne American Beauty, qui se solde par un succès international et de nombreux prix, dont l’Oscar et le Golden Globe du meilleur réalisateur. En 2008, marié alors avec Kate Winslet, il la dirige dans Les Noces rebelles. En 2010, la Metro-Goldwyn-Mayer lui confie les manettes de Skyfall, le 23ème volet des aventures de James Bond. Son succès vaut au cinéaste d’avoir la charge du volet suivant, 007 Spectre, qui sort en France en 2015. En 2019, c’est 1917, qui lui vaut trois Oscars. Empire of light, qui sort cette semaine en France, est en lice pour les Oscars 2023.
Depuis 2017, ce jeune quinquagénaire est marié à Alison Balsom, dont il a eu une petite fille. Entre deux films, ce créateur infatigable retourne à Londres pour mettre en scène du théâtre dont il dit qu’il lui a appris à tenir le public en haleine.
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